23 novembre 2000
Attention à ne pas confondre jugement
politique et question juridique. Car l'enfer est ici pavé de bonnes intentions.
Imaginez un instant un monde où les rôles seraient inversés et que le danger
n'était plus le révisionnisme mais la défense de l'environnement, le pacifisme...
Le discours de ceux qui veulent limiter les dangers de l'Internet sauvage serait-il
le même ? Il faut être très prudent avec les interdictions, c'est pour cela
qu'il y a des gardes fous et que la loi Gayssot a mis si longtemps à apparaître,
et elle reste en principe un bonne loi.
Mais à la question « faut-il faire interdire aux internautes l'accès à
des objets nazis via Internet » et pire encore faire appliquer cette interdiction
pas une société privée, la réponse est clairement non.
On lit d'abord que l'affaire est le symbole du commerce odieux qui étendrait
son emprise sur la toile... Mais si on tient à généraliser le problèmes, alors
soyez certains que les boutiquiers internationaux ne seront pas gênés la moins
du monde par ces limitations. Bien naïfs sont ceux qui s'imagine qu'institutionnaliser
le filtrage selon l'origine géographique ne sera pas à double tranchant.
La justice française est dépassée, tout comme la loi et l'Etat, et ce n'est
pas parce que c'est un poncif que ce n'est pas vrai. C'est au contraire très
vrai. Elle frappe à coups de marteau
les parasites de la liberté d'expression, et évidemment fait beaucoup plus de
dégâts que les problèmes qu'elle entend régler. L'affaire Estelle Hallyday a
ouvert une brèche qui a permis à des sociétés de faire censurer des sites protestataires,
en envoyant des cabinets intimider les hébergeurs. Altern a fini par étouffer,
pendant que les commerciaux emploient des censeurs qui ne font pas dans le détail. De fait et malgré les précautions, le principe
"la liberté est la règle, l'interdiction l'exception" chancelle en France, voire
se renverse sous ces coups de butoir.
Alros que e révisionniste Faurisson, condamné en France, est allé posé
son site aux Etats-Unis et se marre bien. Son hébergeur n'a pas de filiale en
France donc est inattaquable, à moins d'une procédure d'exequatur dont
je passe le ridicule. En revanche Yahoo, pour ne pas prendre de risque, fera
du filtrage en gros, et on peux parier que de nombreux Internautes français
auront des problèmes pour accéder aux services de Yahoo USA pendant que les
croix gammées seront tout simplement disponibles ailleurs sur le Net. Et ceux
qui les veulent les trouverons c'est certain.
Au niveau du petit noyau de l'intérêt général dont la qualité est quantifiable,
c'est-à-dire la diversité, la liberté, le débat, le gain est nul, les pertes
énormes. Comme toutes les décisions passées, cette jurisprudence, pétrie de
bonne volonté, aplanira un peu plus le Net.
Les américains, qui au moins ne se bercent pas de ce genre d'illusion, laissent
faire. Et, bien que la démocratie américaine soit à vendre, les juifs n'y sont
pas en danger aux dernières nouvelles.
Lorsqu'un site révisionniste apparaît, un site anti-révisionniste fait de même.
La nature de l'écrit, l'abondance d'information pour qui veut la chercher et
le caractère forcément actif de ses acteurs transforme le débat et l'éloigne
loin, très loin des one-man-shows médiatisés de Le Pen dans sa grande époque.
Et oui, autre lieu commun très véridique, Internet est différent et les lois
qu'on y applique sont dépassées. Ces lois ont été faites contre des gens qui
utilisaient des moyens d'expressions rares (télé, radio, journaux) et à grande
audience pour aller troubler l'ordre public dans un Etat, et j'insiste sur le
terme aller. Or dans Internet la logique est tout à fait différente, on utilise
un moyen qui ne coûte rien mais qui en retour est perdu au milieu d'autres sites
en espérant attirer des gens qui vont faire la démarche de venir, comme le note
gw. Les dictatures accèdent aux pouvoir en détenant la clé d'un point central.
Pour les fascistes ce fut le monopole de la violence et de la démagogie. Pour
les staliniens la capture soudaine de l'appareil d'Etat, et ensuite la violence.
Pour la ploutocratie américaine de financement de la démocratie fédérale. Tant
mieux pour ces dictatures si les points annexes se bouchent d'eux-mêmes. Pendant
que notre télé nous débite des inepties sur une casquette de ss.gif, d'autres
prennent le contrôle des tuyaux et définissent les protocoles à leur seul avantage,
et selon des mécanismes bien opaques pour
les européens. La définition du service et de l'espace public sur Internet,
l'indépendance rédactionnelle adaptée aux nouveaux moyens de communication,
qui sont pour de vrais problèmes légaux, ça n'occupe pas beaucoup les esprits
à Matignon et l'assemblée, sinon pour annoncer des formulaires en .pdf.
Quant à votre jugement politique, transformez-le en consumérisme, boycottez les trop forts, faites mentir les services marketing.
Alexandre.
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