17 janvier 2001

 


BULLETIN ABC-Dijon # 23       janvier 2001

"Si l'innocent-e mérite notre solidarité,
le/la coupable la mérite encore plus"


L'actualité nous a démontré que le sens de la lutte des prisonnier-e-s
politiques est totalement détourné par les médias internationaux. Les
conditions de détention qu'ils/elles subissent légitiment tout à fait la
lutte pour l'abolition des prisons. La voix des révolutionnaires est
étouffée par la répression et tournées en dérision par les médias
institutionnels. Revendiquer l'amélioration des conditions de détention
ne remet pas en question l'existence du système carcéral et c'est vers
une prise de conscience collective en faveur de l'abolition de celui-ci
que nous devons regrouper nos forces et affirmer notre soutien à la
lutte des prisonnier-e-s. Même si quelques fois les formes de lutte sont
différentes des moyens employés par les anarchistes, par exemple la
lutte des prisonnier-e-s Turques avec l'apologie des martyrs de la
révolution, nous devons faire preuve de solidarité car toutes
initiatives en faveur de l'abolition des cellules d'isolement et du
système carcéral en général doit nous permettre de faire avancer le
débat sur le problème de la prison ainsi que le mouvement
révolutionnaire. Bien sur par toute initiative nous sous-entendons que
les initiatives à ce niveau des fascistes ne peuvent être soutenues par
l'ABC, et sachant aussi que revendiquer la libération de nos camarades
n'implique pas forcément la fin des prisons pour certains groupes
révolutionnaires.
Par cela, nous voulons montrer que la solidarité internationale est très
importante et que c'est grâce à elle que les débats idéologiques
pourront avancer et bien sur que c'est grâce à elle que nous verrons
tomber les murs des prisons.
Salutations rouges et noires !

- 7 militants des GRAPO incarcéré-e-s en région parisienne -

Comme nous le signalions dans le précédent bulletin, 7 membres du
PCE(r)/GRAPO (Parti Communiste espagnol - reconstitué - / Groupe
Révolutionnaire Antifasciste du Premier Octobre) ont été arrêté-e-s le 8
novembre suite à une opération policière franco-espagnol. L'Europe
qu'ils nous préparent, c'est aussi celle des polices et de la chasse aux
opposants ne connaît pas de frontières dans l'Europe-Forteresse. En ce
qui concerne la France et l'Espagne, des dizaines de militant-e-s
basques font les frais de la coopération policière et tortionnaire
historique de ces deux pays. Le scénario désormais "habituel" pour le
basques, c'est à dire la déportation des prisonniers politiques à la
frontière des pays dont ils sont originaires avec ou sans demande
d'extradition de la part de l'Espagne, est à craindre pour ces 7
militant-e-s. Nous avions parlé des Grapo à travers le parcours de
Francesco Broton dans le précédent bulletin. Il s'agit de la branche
activiste du PCE(r), qui a débuté ses actions sous le franquisme et
continue de nos jours. Le Collectif pour un Secours Rouge a réalisé un
tract d'information sur es militant-e-s arrêté-e-s. Nous reproduisons
ici leurs adresses. Vous pouvez leur écrire votre solidarité, leur
envoyer des timbres ou des cartes postales (les femmes comprennent le
français, écrivez aux autres en espagnol SVP)
- Maria Victoria Gomez Mendez, # 893391C, MAF de Fresnes, 1 allée des
Thuyas, 94261 Fresnes Cedex
- Manuel Perez Martinez # 893329 1er D, MA de Fresnes, 1 Allée des
Thuyas, 94261 Fresnes Cedex
- Maria Rosario Llobregat Moreno #35348, MAF de Fleury, Allée des
Peupliers, 91505 Sainte Geneviève des Bois Cedex
- Isabel Llaquet Baldellou # 35347, MAF de Fleury, Allée des Peupliers,
91505 Sainte Geneviève des Bois Cedex
- Fernando Silva Sande #274269 U, MA Santé, 42 rue de la Santé, 75014
Paris
- José Antonio Pena Quesada # 297707, MA Fleury, Allée des Peupliers,
91505 Sainte Geneviève des Bois Cedex
- José Luis Elipe Lopez # 297698, MA Fleury, Allée des Peupliers, 91505
Sainte Geneviève des Bois Cedex

FIES : grève de la faim du prisonnier anarchiste Michele Pontotolillo

A partir du 7 décembre 2000 à midi, je commencerai une grève de la faim
indéfinie.
Etant donné la persistance de la situation hautement répressive qui
se
vit autant dedans qu'en dehors des prisons, et avec la légitimité que me
confère le droit inaliénable de l'individu à se rebeller face à la
toute-puissance et l'arrogance de ceux qui exercent le Pouvoir,
j'informe qu'à partir de midi le 7 décembre 2000, je commencerai une
grève de la faim indéfinie pour les raisons qui sont exposées par la
suite.
Depuis quelques années, on observe une importante recrudescence de
l'action répressive des Etats Impérialistes Européens visant à
criminaliser et à réduire l'activisme des mouvements sociaux et
politiques, et entre autre du mouvement anarchiste très enraciné dans
des pays marqués de continuelles luttes ouvrières et révolutionnaires,
comme c'est le cas des états espagnol, italien et grec. Si on regarde le
panorama, ce qu'on voit est désolant. La restructuration du capitalisme
impulsé par l'emploi à grande échelle de technologies télématiques a
ouvert de nouvelles contradictions que les gouvernements ne pourront
corriger que très difficilement à travers l'usage de politiques
consensuelles. Les états et par extension la société dans son ensemble
ont tenu à s'adapter, tant bien que mal, aux exigences du capitalisme,
chaque fois plus excluant.
L'abaissement des coût de production, l'indice chaque fois plus grand
du chômage, la flexibilité et la précarisation du travail, ont entraîné
comme conséquence immédiate le prolétarisation d'amples secteurs sociaux
traditionnellement proches de la classe moyenne, l'embauche de main
d'ouvre à bas prix venant des pays du tiers-monde, le démantèlement de
l'état du bien-être sur lequel était établi le pacte social, à cours
d'argent, entre le prolétariat et la bourgeoisie, sont les aspects
concluants d'une réalité qui donne à présager non seulement un futur
incertain pour tou-te-s ceux/celles qui prennent part au processus de
production et qui sont demeurés pris entre l'esclavage du travail et
l'angoissante menée d'aller grossir les liste de chômage, mais sinon
aussi une plus probable radicalisation du conflit entre classes.
L'incertitude et l'imprévisibilité du futur, le nombre élevé d'exclus
du processus productif relégués sur le bord d'une vie de misère et de
subsistance, met en question le système d'exploitation. L'écrivain
français Jacques Attali décrit ainsi avec un réalisme accablant ce
nouveau scénario qui se profile à un rythme accéléré dans l'occident
opulent : "ce qui est en train de balayer pas seulement l'Europe, si ce
n'est une certaine manière de penser l'ordre social, est un capitalisme
totalement nouveau sur le point de surgir, un capitalisme global qui
modifiera très profondément le tissu des états et des nations du monde.
Un capitalisme impulsé par de nouvelles forces d'où émergera une
nouvelle élite et où sera prolétarisé l'ensemble des classes
traditionnelles, et où vite ne demeureront plus de salariés, mais une
vaste classe de prolétariat déclassé ; une superclasse triomphante
flottera sur les eaux fangeuses de la misère et le prix de sortie pour
quelques-uns se paiera par la marginalisation de la majorité et la
violence des 'déclassés'." Devant cette inquiétante radiographie
sociale, les états montrent de sérieuses difficultés pour l'heure à
conserver le consensus autour de leurs institutions et des protestations
populaires naissantes, dont quelques-unes unes se démarquent nettement
de la ligne d'action officielle des partis et syndicats "ouvriers"
domestiqués et fidèles serviteurs des patrons, élisant de nouvelles
formes de luttes autonomes et autogestionnaires, le démontre. Alors,
quelle est la formule adoptée par les états pour contenir, dans des
limites tolérables, le mécontentement général et la radicalisation des
luttes sociales ?
Ni plus ni moins qu'octroyer à ses organes répressifs tout le pouvoir
nécessaire pour faire front à cette situation naissante, avec une
emphase obsessive et paranoïaque dans le perfectionnement de sa
machinerie pour la "lutte antiterroriste" et "l'ordre et la loi",
euphémismes politiques pour le contrôle et l'élimination de tous les
dissidents réels, potentiels ou imaginaires. Le fait que cette
répression utilise ou non ses instruments de guerre (police, matraques,
balles en plomb, montages judiciaires, détentions arbitraires, etc.)
dépend du niveau auquel s'est élevé la lutte des classes.
C'est à la vue de tout le monde le grand déploiement de tout es
puissants moyens coercitifs et répressifs desquels l'état fait l'étalage
ces derniers temps, signal inéquivoque que le conflit entre exploité-e-s
et exploiteurs a augmenté considérablement. Les premières victimes de
l'état sont, naturellement, les prolétaires rebelles qui ont pris
conscience de leur condition d'exploité-e-s et d'opprimé-e-s et
ceux/celles en première ligne de la lutte contre le Pouvoir et toutes
ses expressions.
Dans le prolétariat insurgé sont les anarchistes, insoumi-e-s
déclaré-e-s à l'imposition de l'état et du capital, et pourvus d'un
projet politique et social expérimenté dans les thèses socialistes selon
lesquelles les travailleur/ses, qui sont les uniques producteurs de la
richesse sociale, peuvent et doivent s'émanciper de la domination de la
bourgeoisie capitaliste pour être, une fois pour toutes, maîtres de
leurs vies et de leur futur.
Ceux qui connaissent, même sommairement, les principes qui animent
l'anarchisme sauront que l'anti-autoritarisme plus que viscéral et
l'anticapitalisme fondent la théorie et la pratique anarchiste;
Les anarchistes sont des ennemis déclarés de toute hiérarchie, de
quelque imposition et domination, peu importe son origine et sa
dénomination, faisant l'apologie de la vie et de la liberté, de
l'autodétermination de l'individu et des peuples, nous désirons une
société autogérée comme base sur laquelle nous puissions construire un
monde plus juste, équitable et libertaire.
Et c'est ainsi, quand le prolétariat se prépare à prendre
l'initiative
face au réveil de ses désirs d'émancipation, comme je l'ai vu de
nombreuses fois le long de mon existence, que l'état enlève le masque
qu'il porte et montre son véritable visage méprisable, violent et
criminel, qui sont pour beaucoup déguisé avec des ornements libéraux et
démocratiques. Les méthodes qu'utilise l'état pour en finir avec les
révoltes prolétariennes sont connues de tous, ses mains tâchées de sang
innocent.
A ma mémoire me reviennent le souvenir de l'infâme GAL, le bataillon
basque espagnol et d'autres bandes armées organisées par l'état qui
s'adonne à semer la peur et la terreur dans la population inerte
observant abasourdie comment tombent l'un après l'autre ceux qui avaient
questionné le système et lutté contre lui. De même nous nous rappelons
des bombes en Italie de la Palza Fontana à Milan ou de la gare de
Bologne, qui ont causé la mort de centaines de personnes, des faits qui
encore aujourd'hui n'ont toujours pas été éclairés, le temps que le
temps s'écoule et consume ces atroces tragédies. L'état italien ne tient
seulement qu'à reconnaître l'implication de quelques-uns uns de ses
hommes des services secrets dans ces actes barbares et criminels.
Pourtant, malgré tous ceux qui veulent l'occulter, nous savons tous la
vérité : les attentats furent planifiés et ordonnés depuis les plus
hautes sphères du pouvoir constitué : ce fut le terrorisme d'état qui,
dans l'intention désespérée de contrecarrer l'offensive révolutionnaire
débordante du prolétariat s'est acharné à changer et transformer
radicalement la réalité, se rendant responsable du meurtre de centaines
d'innocents;
Plus récemment, l'état italien amena un grand nombre d'anarchistes
devant les sacro-saints tribunaux de l'inquisition, accusés de faire
parti d'une invraisemblable, autant que grotesque organisation armée,
hiérarchiquement structurée, contenant des chefs jusqu'à des lieutenants
et des commandos opératifs. Tout cela accompagné d'une forte campagne de
criminalisation qui donna lieu à une véritable chasse à l'anarchiste.
Celui qui voulait vanter la révolution ou le communisme libertaire ou
qui entretenait des contacts sporadiques ave l'anarchisme fût
systématiquement persécuté et emprisonné. L'incarcération ne tarda pas à
donner des résultats, prenant la vie des compagner@s Soledad et Edoardo,
morts "par l'opération du saint-esprit" de l'état quand ils se
retrouvèrent séquestrés dans ses immondes prisons. Les choses n'ont pas
changé. L'état continue à utiliser des montages politico-judiciaires
comme arme de jet pour éteindre les feux de résistance prolétarienne qui
surgissent là où ses contradictions sont les plus aiguës. C'est le cas
des trois compagner@s anarchistes madrilènes accusés d'avoir envoyé
certains des paquets piégés à chacun des journalistes au service de la
presse espagnole la plus réactionnaire.
L'opération fût élaborée et commanditée, comme d'habitude dans ces
cas-là, des bureaux du ministère de l'Intérieur, la brigade
d'information provinciale ou, ce qui est le même, la police politique
s'assura que les accusés comparaissent devant les autorités judiciaires
chargées de leur ouvrir les portes de la prison où l'on apprend ce que
signifie la douleur, la souffrance et l'impuissance. Les preuves ?
Maintenir des relations avec les anarchistes et les prolétaires rebelles
incarcérés.
Cependant, pour que les montages politiques aient l'effet désiré, ils
nécessitent l'apport d'éléments essentiels comme le lynchage public, le
discrédit personnel et politique des réprimé-e-s et la condamnation
morale de leurs actes et de leur forme d'être, de ressentir et de
penser.
Les moyens de communication de l'état jouent un rôle crucial et
décisif
dans cet aspect, préparant le terrain pour que la répression puisse agir
impunément, se chargeant de criminaliser et de calomnier les individus,
groupes et collectifs considérés incommodants et dérangeant pour le
pouvoir.
Le jeu est des plus pervers qui se puisse imaginer : les journalistes
désignent et accusent, les jugent sentencent et les prisons exécutent.
Ces pédagogues de la conscience de masse, tant occupés à démontrer
l'indémontrable, c'est à dire que ce monde tel qu'il est organisé est le
meilleur que nous n'ayons jamais eu, excellents manipulateurs de la
réalité et inégalables artistes à la déformer, appellent à la mensongère
et calomnieuse "liberté d'expression", au lynchage médiatique sous
couvert de "droit d'information", entachant de "terrorisme" la
solidarité active faite par les réprimés politiques enfermés pour la vie
dans ce camps d'extermination du capital, dissimulant les tortures et
assassinats qui se commettent quotidiennement dans les commissariats et
dans les prisons, l'annihilation des prolétaires rebelles dans les
modules d'isolement portant l'insigne de prisonniers FIES, la
dispersion, la mort lente et agonisante des prisonnier-e-s avec des
maladies incurables en phase terminale, s'abritant dans le tout puissant
et dogmatique "Etat de Droit".
Face à ce scénario que nous pourrions qualifier de Dantesque, sans
tomber dans le dramatique, il ne reste que deux attitudes : où la
soumission aveugle à la dominance capitaliste, ou la rébellion spontanée
et passionnée contre tout ce qui nous opprime et nous esclavagise.
- fermeture des modules d'isolement et abolition des Fichiers d'Internes
en Suivi Spécial, FIES.
- fin de la dispersion
- liberté immédiate pour tous et toutes les prisonnier-e-s avec des
maladies incurables
A BAS LES MURS DES PRISONS !!!
VIVE L'ANARCHIE !!!
Michele Pontolillo, prisonnier anarchiste italien séquestré dans le
centre d'extermination de Villabona (Asturies, Espagne).
Michele Pontolillo, Prision de Villabona (M-7), 33271 XIXON, Espagne.
Depuis le 1er décembre 2000, beaucoup de prisonnier-e-s en isolement ou
pas ont entamé un mouvement de protestation pour l'obtention entre autre
des trois revendications ci-dessus épelées, allant de la grève de faim
indéfinie à toutes formes d'actions.

- communiqué de l'Association des Parents
et Amis des Prisonniers Communistes -


Ce vendredi 15 décembre 2000, Pierre Carette, militant des Cellules
Communistes Combattantes, entamera sa seizième année d'emprisonnement.
Cette détention d'une durée jamais vue pour un condamné non-récidiviste
s'explique par le caractère politique des faits et par le refus de
Pierre Carette de renier son idéal communiste. Cet attachement aux
principes révolutionnaires a trouvé une de ses expressions les plus
claires dans l'impulsion par les prisonniers et prisonnière des Cellules
Communistes Combattantes de la "Plate-forme du 19 juin" à laquelle ont
adhéré des dizaines de prisonniers et prisonnières révolutionnaires,
communistes, anarchistes, antifascistes ou anti-impérialistes.
Ce samedi 16 décembre, à 10h30, nous manifesterons devant le palais
de justice de Bruxelles pour exiger la libération de Pierre Carette.
Ce jeudi 20 décembre, Pierre Carette entrera en grève de la faim en
solidarité avec le millier de prisonniers et prisonnières
révolutionnaires en Turquie (membres du DHKP-C, du TKP(ML), et du TKIP)
en grève de la faim contre la nouvelle politique pénitentiaire du
gouvernement turc. Celui-ci a entrepris un programme de construction de
prisons cellulaires/modulaires sur le mode ouest-européen et compte
placer tous les prisonniers révolutionnaires dans un régime d'isolement.
L'isolement est devenu l'arme principale des gouvernements contre les
prisonniers révolutionnaires, tant pour ses effets à court terme
(empêcher le prisonnier de participer à la vie politique) que pour ses
effets à long terme (destruction de la santé mentale des prisonniers).
Les prisonniers et prisonnière des Cellules Communistes Combattantes y
ont tous et toutes été soumis pendant 3 ans, de la 1985 à la fin 1988,
et n'en sont eux-mêmes sortis qu'en se battant au moyen de dures et
longues grève de la faim. C'est dans l'esprit de la "Plate-forme du 19
juin 199" que Pierre Carette entame cette nouvelle grève.
Ce vendredi 21 décembre, Pierre Carette comparaîtra une nouvelle fois
devant la Conférence du personnel de la prison de Louvain, instance
habilitée à le renvoyer devant la commission de libération du Brabant.
Il est temps que cesse le chantage au repentir et au reniement, et que
cesse la détention à caractère ouvertement politique, comme l'atteste
les interventions directes du ministère.
15 ans ça suffit !
Liberté pour Pierre Carette !
Solidarité avec les prisonniers et prisonnières révolutionnaires de
Turquie !

- lutte des prisonnier-e-s : communiqué
de Nathalie Ménigon et Joëlle Aubron -


Le 4 décembre 2000
Le 22 novembre, notre camarade, Jean-Marc Rouillan et cinq autres de
ses compagnons de galère étaient évacués de Lannemezan. Depuis plusieurs
mois, des détenus, politiques et sociaux, de cette centrale de sécurité
avaient réussi à constituer un réseau de solidarité active.
En mai, une vingtaine d'entre eux avait pendant une semaine refusée
le plateau en soutien à trois militants basques de la Centrale qui
avaient rejoint la grève de la faim tournante initiée par leur collectif
le 1er novembre 1999. En juin, ils avaient su fêter ensemble la chute de
la prison de Khiam au Sud-Liban. A partir du 28 septembre, ils s'étaient
solidarisés par un refus de plateau de trois jours avec la lutte d'Éric
Minetto, à cette date, Éric avait accompli 20 ans jour pour jour et
commençait une grève de la faim après qu'ai été rejetée, pour la
quatrième fois en 5 ans, sa demande, dûment motivée, de libération
conditionnelle. Et ce ne sont que 3 moments particuliers d'une
résistance s'étant développée au fil des mois contre le lent
anéantissement de la prison sans fin.
Dans la semaine ayant précédé ces transferts disciplinaires, deux
soirs consécutifs, les gardes mobiles étaient entrés en action,
déployant Famas et matraques.
Aujourd'hui, Jean-Marc est retourné au Q.I. de Fresnes et les 5
autres auraient atterri dans divers établissements pénitentiaires,
probablement également dans des Q.I.. Interpellée sur cette mesure, la
Chancellerie ose parler de "mauvaise influence sur ses camarades". Selon
les critères de la Pénitentiaire, ce sont forcément de mauvaises
influences qui amènent les prisonniers à prendre conscience de leurs
potentialités de résistance. On exclut les méchants meneurs et les
problèmes sont censé disparaître.
Disparue la réalité carcérale où tout ce qui est vital est rare,
empêché, transformé en objet de chantage ? Disparus les désespoirs et
les souffrances, les actes de résistance des emmurés vivants ? Disparu
le nombre croissant de prisonniers ayant effectué plus de vingt ans ?
Disparues les peines d'élimination, perpétuité, accumulation de peines
non confusionnables, peines incompressibles ? Disparu le "lent
assassinat façonné de mille morts quotidiennes" (1) que sont ces peines
?
En tout cas, l'Administration Pénitentiaire croit avoir une solution
: ses chambres de tortures blanches. Jean-Marc y a déjà passé sept ans.
Il doit en sortir. Maintenant.
Ce jour, Nathalie Ménigon commence un refus de repas pénitentiaires.
Elle sera relayée le lundi 11 décembre par Joëlle Aubron.
Différentes luttes et situations intra-muros requièrent également
notre solidarité.
Du 27 novembre au 3 décembre, Edurne Sanchez del Arco, militante
basque incarcérée à Bapaume, s'est solidarisée de la même manière avec
ses camarades incarcérés à Fresnes. Pour protester contre la politique
de dispersion et contre les interdictions de communiquer entre eux,
certains y ont exigé d'être placé au mitard. D'autres, à La Santé,
Fleury, Villepinte, Lannemezan, Toul,... agissent sur différents modes
pour lutter contre cette même politique d'isolement.
Depuis le 30 septembre, les militants du mouvement de libération
breton se relaient dans une grève de la faim pour le regroupement et
autres droits liés à leur réalité de prisonniers politiques.
A partir du 16 novembre, les prisonniers politiques corses,
incarcérés à La Santé, ont commencé une grève de la faim illimitée pour
être regroupés et rapatriés en Corse.
D'un collectif de militants à l'autre, les revendications se
recoupent. Les politiques de dispersion, d'isolement de tel ou tel
militant de ses camarades, d'emploi de la torture blanche par
l'isolement total pour détruire tel ou tel autre sont toutes le reflet
d'une même logique étatique. Scellé au mur de la répression, la
criminalisation ou négation de la nature politique des conflits.
Contre cette logique, nous revendiquons :
- la fermeture des Quartiers d'Isolement ;
- le regroupement politique ;
- la fin de la politique de dispersion et le rapprochement des
collectifs de prisonniers basques, bretons, corses de leurs pays
d'origine ;
- la libération des prisonniers dont l'état de santé est incompatible
avec la détention.
Joëlle Aubron et Nathalie
Ménigon
Prisonnières d'Action
Directe

(1) "Le devoir de Résistance" janvier 2000, Jean-Marc Rouillan.

- lutte internationale des prisonniers politiques turques -
- grève de la faim des détenu-e-s turques
contre l'installation de nouvelles cellules de torture -


Quelques faits :
Le 19 décembre, au soixantième jour du " jeûne de la mort ", des unités
spéciales de la police et de l'armée prenaient d'assaut 20 prisons. Le
bilan était alors de 31 morts ( 29 prisonnier-e-s et 2 matons ), 8
disparu-e-s et de nombreu-se-s blessé-e-s. À ce moment 250 détenu-e-s
étaient en grève de la faim qu'avait commencé l'organisation guévariste
DHKP/C, le TKP(ML) maoïste et le TKIP stalinien à la mi-octobre pour
protester contre la mise en place des prisons d'isolement dites type
"F". Environ 1100 autres prisonnier-e-s, dont aussi d'autres membres
d'organisations de gauche, étaient en grève de la faim. Une semaine plus
tôt, des négociations semblaient encore possibles. Un groupe
d'intellectuel-le-s s'était placé en tant que négociateur. Le ministre
de la justice déclarait suite à cela, que le déplacement des
prisonnier-e-s allait être repoussé jusqu'à ce que soit trouvé un
consensus au sein de la société par rapport aux conditions médicales,
judiciaires et architecturales des nouvelles prisons.
Face au but du gouvernement de transformer les cellules de 40 personnes
en cellules de une à trois personnes, les grévistes ont déclaré que le
discours du Premier ministre était trop vague et qu'ils revendiquaient
l'abandon des cellules d'isolement. Seul les prisonniè-re-s su PKK ont
stoppé la grève à ce moment la "pour manifester de la bonne volonté". En
même temps, l'état turque prévoyait depuis longtemps de restructurer les
prisons et de briser les collectifs de prisonnier-e-s. Peu de temps
après, le ministre de l'intérieur déclarait fièrement que les unités
spéciales avaient préparé une telle opération depuis plus d'un an et que
seul le fait de refuser d'arrêter la grève de la faim avait fourni une
bonne occasion. Peu de temps avant les indices qui présageaient que la
solution violente allait être retenue ne manquaient pas. Après l'attaque
d'un car de police à Istamboul par le TKP(ML), où 2 policiers furent
fusillés, il y eut des manifestations de policiers dans tout le pays,
initiées par le MHP fasciste et au gouvernement, exigeant des mesures
plus dures contre " les terroristes ". À partir de ce moment les
manifestations de soutien aux prisonniè-re-s en lutte furent attaquées,
les contacts avec les avocat-e-s et les parents suspendus ainsi que
toutes informations. De l'autre côté, le DHKP/C déclarait : "en réplique
à toutes les attaques à notre jeûne de la mort nous allons transformer
les prisons en torches flambantes et nos corps en flamme de la
révolution. Des centaines de prisonnier-e-s sont prêt-e-s." Des
spécialistes du combat psychologique n'ont pas manqué le coche.
"opération retour à la vie" était le nom de l'attaque dont le but était,
comme l'a déclaré le premier ministre : "nous voulons protéger les
terroristes de leur propre terrorisme ", et pour cela il fallait tenter
de résoudre le problème le plus calmement possible. Le peuple turc a pu
constater ce que signifiait le mot calme. Des pelleteuses détruisaient
les murs des prisons, les forces armées démontaient les plafonds des
cellules à la masse, des policiers tabassaient les parents, les
avocat-e-s et les militant-e-s pour les droits de l'homme. En arrière
plan des images télévisées, le bruit des coups de feu permanent. Mais le
public turc ne se préoccupe que peu de ces questions. Il croit à des
bandes truquées et aussi au fait que depuis 1991 certaines prisons
n'auraient plus été fouillées et que les prisonnier-e-s avaient des
Kalachnikovs avec lesquelles ils/elles tiraient sur les matons. ( Le
procureur déclarait quand même que des rafles régulières avaient lieu et
qu'elles avaient permis de récolter quelques armes confectionnées par
les prisonnier-e-s.)
Contrairement à ce qu'a affirmé le ministère de l'intérieur turc, il y
eut seulement 4 personnes qui se sont immolées par le feu, les autres
furent assassinées lors des assauts. Une femme, qui les cheveux et le
visage brûlé, se faisait amener à l'hôpital, criait vers les
journalistes présents "ils nous ont brûlées vives, six femmes sont
mortes." Selon d'autres femmes de la même cellule, les forces armées
avaient lancé des grenades lacrymogènes et des grenades aveuglantes dans
les cellules. Le mélange des différents gaz s'était enflammé et les
soldats continuaient de bombarder. Les avocat-e-s qui ont réussis à voir
les détenu-e-s qu'ils/elles défendaient ont relaté que les
prisonnier-e-s avaient été torturé-e-s, battu-e-s, violé-e-s et
maltraité-e-s après leur arrestation. Environ 300 prisonniè-re-s se
trouvent en ce moment à l'hôpital, d'autres ont été transféré-e-s dans
d'autres prisons. 1005 prisonnier-e-s ont été transféré-e-s dans les
prisons de type"F" déjà finies.
Le 26 septembre, 10 prisonniers politiques ont été massacrés dans la
prison de ULUCANLAR pour avoir refusés d'intégrer des cellules
d'isolement. Depuis la mi-octobre, plus de 1000 prisonnier-e-s
incarcéré-e-s en Turquie se sont mis-e-s en grève de la faim illimitée
pour protester contre l'institution des cellules d'isolement nommées
"cellule F". Entre-temps, de nombreux militant-e-s se sont associé-e-s à
cette lutte, qu'ils soient enfermé-e-s ou dehors. Par exemple à
Innsbrück, en Autriche, 18 personnes ont entamé une grève de la faim (10
sont en grève de la faim illimitée et 8 en grève de la faim tournante).
Les prisonnier-e-s en lutte ont déclaré qu'ils/elles ne cesseraient pas
leur mouvement tant que le gouvernement turc n'acceptera pas les
revendications, c'est à dire l'annulation de la construction des
cellules F. Ces cellules F sont similaires à celles de la prison de
Stammheim, en Allemagne (célèbre prison de haute sécurité où furent
assassiné-e-s membres de la R.A.F. dans la nuit du 18 au 19 octobre
1977). Elles combinent les formes sophistiquées de torture physique et
psychologique, comme la privation sensorielle qui détruit
psychologiquement et physiquement les détenu-e-s à petit feu. L'état
turc voit peut-être dans ces cellules le moyen d'en finir avec les
prisonniers politiques. Les prisons de ce pays sont célèbres pour les
atrocités commises derrière les murs par les matons et l'administration
pénitentiaire, et pour les épouvantables massacres entraînant toujours
des dizaines de morts et blessés lorsque des prisonniers s'organisent et
se révoltent. La Turquie veut maintenant se doter d'un système carcéral
d'avantage axé sur la torture blanche, la mort lente, comme cela se
pratique dans la plupart des pays d'Europe et spécialement à l'encontre
des prisonniers politiques.
Dans les prisons françaises également des prisonniers politiques
turques (du DHKP-C) se sont mis en grève de la faim en solidarité avec
leur camarade et constituent ainsi une gigantesque communauté de lutte.

Suite et fin du bulletin #23 dans un message suivant...




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