16 février 2001
Qui parle ? Et, d'où parlons-nous ?
Aujourd'hui
ce sont des enseignants corses qui prennent la parole, non pour
revendiquer dans le cadre de leur profession quelques avantages, mais pour
témoigner de la situation inquiétante observée tous les jours un peu
plus. Par delà les idées politiques, les appartenances et les professions,
nous subissons la disparition de notre culture que rien ne vient remplacer.
Confrontés à une
jeunesse sans exemples et sans repères, nous révélons ce désuvrement aujourd'hui pour vous appeler à un sursaut indispensable.
Pourquoi
cet appel aujourd'hui ?
Nous vivons,
nous Corses, une situation sans précédent depuis Aléria !
Pour la première fois depuis
25 ans, le gouvernement français reconnaît tacitement
la dimension politique du problème corse. Politique car, les
25 années de troubles et de fureur ne sont plus, pour le gouvernement, le
fait d'intérêts particuliers qu'il faudrait assouvir mais, l'expression d'une
volonté de faire des choix qui engagent l'avenir de notre communauté. Pour la première fois le Peuple corse est sommé de se prononcer
par le biais de ses élus. En matière d'éducation, de tourisme,
d'agriculture, d'environnement, de justice, d'impôts, de commerce, etc., la
question nous est implicitement adressée : Que voulez vous
et que refusez-vous pour vous et vos enfants ? Qu'êtes-vous prêts à mettre
en jeu dans ce choix ?
Face à un tel défi, pour lequel nos élus n'ont
pas été mandatés, règne un fatalisme sans pareil, un silence sans précédent
de la population. Peur de la liberté, lassitude produite par les échecs passés
ou aspiration à un bonheur privé, peu importe, le résultat est le même :
l'avenir de la Corse et des corses se décide ailleurs
et sans nous !
Un
constat difficile mais indispensable :
-Notre culture et notre patrimoine disparaissent sans
que rien ne les remplace, qui permette à notre jeunesse de vivre et de vivre
bien sur cette Terre. La perte des
gestes et des savoir-faire indispensables à pouvoir vivre en communauté est
à la mesure des menaces qui pèsent sur notre patrimoine naturel.
-Aucun repère nouveau, aucun savoir-faire novateur ne
permettent d'affronter le monde moderne sans perdre ce qui fait notre richesse
et notre identité. La reproduction
stérile d'archaïsmes nous confine au ridicule, là où l'importation massive
de biens de consommation s'assimile à une fuite en avant !
Le développement économique, social, culturel et politique
profite toujours à quelques seigneurs dévoyés lorsqu'il s'appuie sur l'oubli
de la culture et de la langue qui fondent la volonté du peuple.
-L'histoire ne nous attend pas : Des enjeux nouveaux sont apparus qui dépassent
le cadre français et bouleversent notre vie quotidienne sans que nous puissions
avoir prise d'une quelconque façon sur ceux-ci.
Nous
subissons cela, tous les jours un peu plus, sans que les moyens nous soient
donnés d'en sortir !
Un peuple
ne peut maîtriser le développement économique, social, culturel et politique
qu'en cultivant son identité et pour cela, en disposant des moyens nécessaires
à la protection et à l'enrichissement de son patrimoine.
Mais, le
développement économique, social, culturel et politique ne profite au peuple
et ne devient ainsi possible que si des institutions garantissent l'égalité
d'accès aux bénéfices tirés de ce développement !
Que voulons-nous ?
« Les constats ne valent
que par la détermination qui permet de les dépasser ! »
Nous ne voulons
ni devenir une banlieue de Paris à statut particulier,
ni devenir la
Terre des seigneurs du village que l'on dit « planétaire » !
Nous
voulons des institutions novatrices qui
permettent à notre Peuple de vivre dignement sur sa terre afin d'affronter
l'étape européenne et le libre marché avec détermination et lucidité.
Nous
voulons des mesures permettant
à notre jeunesse de disposer librement de son avenir et de s'approprier son passé.
Nous
voulons une consultation raisonnée du peuple corse sur
les grands thèmes qui engagent son avenir !
Parce qu'il est devenu aujourd'hui urgent de démontrer l'existence d'un peuple digne et vivant,
nous invitons les organisations politiques et syndicales, ainsi que les associations, les groupes culturels et les personnalités insulaires soucieuses de l'avenir de la Corse et de son identité, à appeler publiquement, par voie de presse à cet indispensable sursaut.
Per un populu vivu !
Per un populu vivu !
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