2 aout 2001
Mais commençons par le début : qui suis-je ? J'ai été
élevée en pleine campagne au milieu du maïs, du foin et des
escargots de Bourgogne. Toute petite déjà, je
regardais les étoiles et je rêvais de devenir ingénieur,
histoire de construire un vaisseau spatial du type de celui du capitaine Albator,
qui dès 1979 se battait contre l'unique gouvernement de la Terre. De
là est né mon goût pour la science-fiction. Des interrogations
du style "sommes-nous seuls dans l'univers ?" ont dû aussi apparaître
à cette époque.
Aujourd'hui, je ne construis pas de vaisseaux spatiaux mais des outils informatiques.
A côté de cela, je publie un
fanzine et depuis trois ans, je représente en France une association
internationnale, la SETI
League. SETI signifie "Search for Extra-Terrestrial Intelligence". De nombreux
projets d'écoute du ciel à la recherche d'intelligence extraterrestre
ont porté ce nom là, entre autre celui de la NASA, interrompu
par le Congrès US en 1993. Suite à cela, deux américains
se sont dit que ce genre d'étude ne pouvait pas fonctionner à
échelon nationnal, ni dépendre des bons sentiments de mecs dont
la principale préoccupation est de se faire réélire. Ils
ont donc fondé une association, la SETI League rassemblant des amateurs
désireux de construire une antenne ou simplement d'apporter leurs idées
au projet. Les discussions y sont plutôt techniques, l'ambiance très
bon-enfant.
Lorsque j'ai accepté de représenter l'association en France, j'envisageais surtout de mettre des informations à disposition des non-anglophones en traduisant quelques pages du site américain. Ce qui fait qu'à la sortie de l'économiseur d'écran SETI@HOME, il n'y avait pas beaucoup d'autres pages web sur SETI et je me suis retrouvée face aux journalistes sans vraiment y avoir été préparée. J'ai pris une sorte de douche froide en découvrant leurs méthodes de travail et me rendant compte que les témoins que l'on voit dans les reportages des JT ne sont que des acteurs débutants. Bien sûr, j'ai rencontré de bons journalistes qui maîtrisent réellement leurs sujets et possèdent une certaine éthique. Malheureusement, ce n'est pas le cas de tous et aujourd'hui, j'ai plutôt tendance à éviter ces individus autant que possible.
Mais venons en aux faits. L'un des meilleurs articles sur SETI@HOME fut publié en juillet 2000 dans un numéro de VSD Hors-Série consacré aux OVNI. Il était écrit par monsieur Thouanel, l'un des rares journalistes français à avoir fait le déplacement aux US pour interroger les scientifiques de l'université de Berkeley. Attention, VSD hors-série n'a rien à voir avec le VSD "classique", si ce n'est qu'il a le droit d'utiliser le même logo vu qu'il est financé par le créateur de VSD qui a ensuite du vendre son magazine à un grand groupe !
Lorsque monsieur Thouanel m'a demandé d'écrire un article pour
le numéro de 2001 en m'invitant à améliorer un article
qui se trouvait sur mon site web, j'ai tout naturellement accepté et
lui ai envoyé un texte, malgré les quelques boutons d'allergie
que font surgir le sujet des OVNI. Le 9 novembre 2000, il m'écrivait
des états-unis "Pour revenir a votre article... Je l'ai lu... Il est
excellent. Je vais le retravailler une fois de retour en France, et quand je
dis retravailler, en fait c'est relever les points qui pourraient sembler
incomprehensibles pour le lecteur moyen."
Jusqu'à la parution du numéro le 13 juillet 2001, nous avons échangés
quelques messages courtois sur divers sujets mais n'avons pratiquement pas reparlé
de l'article, auquel je n'attachais pas une grande importance il est vrai.
Lorsque j'ai découvert le numéro en kiosque, je l'ai survolé avec un léger malaise. J'ai écrit ça moi ? J'étais en voyage à Paris pour la convention de science-fiction francophone et je n'avais pas le texte original sur moi, ni le temps de lire VSD. A mon retour, j'ai pu constater les dégats. Oups ! La moitié du texte avait été coupée. Ce n'est pas dramatique. Tous les journalistes font ça, ne serait-ce qu'à cause de la limitation de place. Mais tout de même, j'avais profité de l'occasion pour parler de l'Afrique et de la colonisation. Toute cette partie semble avoir été censurée (en rouge italique dans le texte).
Le samedi 21 juillet, je reçois l'email de do@mai.org avec la photo du jeune italien tué à Gênes. Quel choc de bon matin ! J'en profite pour faire un tour sur le site en me disant qu'il faudrait justement que je mette un lien à partir de la page d'accueil. Le lundi 23, à 3h du matin, je n'arrive pas à trouver le sommeil et pense encore à VSD. Ne devrais-je pas aussi utiliser le web pour au moins expliquer que l'article publié ne correspond pas à ce que j'ai envoyé. Je conçois donc une page http://www.chez.com/telescope/vsd/ et mets un lien vers la page "vengeance" à partir du titre "messieurs les censeurs, bonsoir".
La réaction de monsieur Thouanel ne se fait pas attendre. Il contacte dans mon dos le directeur de la SETI League en lui traduisant la page incriminée et en m'accusant de faire de la politique. Moi qui espérais des excuses, me voilà bien servie ! Comment a-t-il osé traduire "Messieurs les censeurs bonsoirs", sans expliquer qu'il s'agissait d'une référence à Maurice Clavel ? Je réponds au directeur et explique la situation, avec une copie à Monsieur Thouanel. J'en profite pour analyser un peu plus profondément la situation et me rends compte qu'ils ont coupé un passage (3) et l'ont collé dans un autre contexte (3a). D'un article contre la colonisation et l'invasion des soucoupes volantes, ils ont ainsi fait quelque chose de plutôt pro-OVNI, en changeant par exemple le titre (1) ("Pardoxe de Fermi : La clé de l'enigme OVNI ?").
Suite à cela, je reçois une lettre d'insulte de monsieur Thouanel qui traduit sa véritable nature. J'y trouve des perles du style :
Mais assez parlé, je vous laisse découvrir et juger les modifications effectuées sur le texte initialement envoyé. Tout cela n'est qu'une anecdote. Un proverbe africain dit "le coassement des grenouilles n'empêche pas l'éléphant de boire". Les larmes et les gouttes de sang de quelques anti-mondialistes n'empêcheront pas les chefs d'état de s'assurer que la presse est bien aseptisée. Mais est-ce un raison de se taire ?
Elisabeth Piotelat
Lyon, le 2 aout 2002
Enrico Fermi (1901-1954), physicien italien, est connu pour son prix Nobel de
physique en 1938, pour avoir produit la première réaction nucléaire
en chaîne en 1944 mais avant tout pour cette histoire a priori anecdotique,
que l'astronome Carl Sagan baptisa plus tard "le paradoxe de Fermi". Pendant
l'été 1950, Enrico Fermi travaillait au laboratoire national de
Los Alamos. En se rendant à la cantine avec trois autres physiciens renommés,
il discutait d'un dessin humoristique paru dans le New Yorker. Suite
à une série de vols de poubelles à New York, le dessinateur
avait représenté une soucoupe volante posée sur une autre
planète avec des petits hommes verts tirant chacun un container de déchets.
(1) Fermi demanda à Edward Teller, le père
de la bombe H, une estimation de la probabilité que dans les dix prochaines
années nous ayons la preuve de l'existence d'un objet se déplaçant
plus vite que la vitesse de la lumière ? Il sous-entendait bien sûr
que tout extraterrestre nous rendant visite aurait découvert le voyage
supra-luminique. Teller hasarda : 1 sur 1 million. Fermi répondit que
ce chiffre était bien trop faible, et que son estimation se portait à
10%. La question s'arrêta là. Ils prirent leur repas. Tout d'un
coup Fermi se leva de table et s'écria "Mais où sont-ils ?"
Cela déclencha un fou rire dans la cantine. Etonnament,
tout le monde avait comprit qu'il était question d'extraterretres. Imaginons
en effet qu'un beau jour, pour une raison que nous ignorons, les Vogons décident
de coloniser l'espace. Leur technologie leur permet uniquement de se déplacer
à 1% de la vitesse de la lumière. En moyenne 500 ans plus tard,
ils atteignent les étoiles les plus proches de la leur. Ils s'installent
là et 500 ans plus tard repartent vers d'autres mondes. La vague de colonisation
se déplace donc à 0,5% de la vitesse de la lumière. Comme
la galaxie fait 100000 années-lumière de diamètre, en 20
millions d'années, ils l'ont entièrement colonisée. Les
plus vieilles étoiles ayant un milliard d'années, si au début
de la vie de notre galaxie une civilisation avait décidé de la
coloniser, ils devraient être partout maintenant. Or sur Terre, les Vogons
ne nous dérangent pas vraiment ! (2)L'Américain
Carl Sagan ou le Français Jean Heidmann savaient utiliser aussi bien
la presse que les télescopes pour communiquer leur passion pour l'astronomie
et diffuser l'idée que nous ne sommes peut-être pas seuls dans
l'univers, tout en combattant l'irrationnel. Ils ont tenu les ficelles décisionnelles
des hautes autorités scientifiques et politiques, ils ont écrit
plusieurs livres, sont apparus à la télévision (3a)
En 1975, l'astronome Michael Hart écrivit que la colonisation galactique
était tellement probable, que la seule conclusion possible est que nous
ne partageons pas la galaxie. Le physicien Franck Tipler va plus loin. Même
si une civilisation ne cherche pas à envahir la galaxie, il serait étonnant
qu'aucune sonde ne soit lancée. Il en déduit qu'il ne se fait
rien de mieux, ni de plus intelligent que l'espèce humaine dans les environs.
A la suite de ces deux articles, Carl Sagan utilisa le terme de paradoxe.
Depuis un demi siècle, protagonistes d'écoute de signaux extraterrestres,
amateurs de science-fiction, allergiques aux soucoupes volantes ou chercheurs
d'OVNI se donnent rendez-vous au pied de l'arbre à palabres et chacun
utilise les propos de Fermi pour défendre sa chapelle. A
l'instar d'Ellie Arroway, l'héroïne de "Contact", le roman de Carl
Sagan porté à l'écran par Robert Zemeckis, devons-nous
penser que l'univers est un beau gâchis d'espace, puisqu'aucun extraterrestre
n'est venu nous serrer la pince à ce jour ? Bien sûr, dans la fiction
nous ne sommes pas seuls et nos radiotélescopes nous permettent d'entrer
en contact. Les terriens font le voyage dans la machine construite d'après
les plans généreusement envoyés par leurs alter ego Végans.
En chevauchant un photon comme le fit Einstein, devons-nous rester accrochés
à la vitesse de la lumière à laquelle se propagent les
ondes radio pour rejeter l'idée de tout transport de matière dans
cet univers principalement constitué de vide et défendre les projets
de recherche de signaux intelligents ? Les distances astronomiques entre deux
étoiles voisines découragent-elles tout explorateur potentiel
? Chacun apporte sa goutte d'eau au pied de l'arbre à palabre dont les
racines s'enfoncent toujours plus dans le sol tandis que les plus hautes branches
touchent le ciel.
La réponse la plus simple au paradoxe de Fermi a déjà fait
l'objet de nombreux écrits : ils sont parmi nous ! Derrière cette
affirmation se dissimulent de multiples comportements. Certains sont tout à
fait louables. Par exemple, l'Association Louhannaise de Phénomènes
Inexpliqués regroupe des chercheurs d'OVNI. Depuis plusieurs dizaines
d'années, ils parcourent les routes de la Bresse Bourguignonne à
l'écoute des témoignages de paysans, à la recherche d'échantillons
ou de lueurs anormales dans le ciel. Ils mènent une étude sur
le terrain, sans se soucier des polémiques et surtout sans but lucratif.
Chaque année, ils informent le public de leurs
découvertes grâce à une exposition, où peintres,
maquettistes, astronomes amateurs et simples touristes partagent leur vision
de l'espace actuel, futur ou hypothétique. Ces petites organisations
essaient à leur échelle d'apporter une réponse au paradoxe
de Fermi en recherchant sur le terrain une preuve matérielle. Malheureusement,
l'univers ufologique apparaît beaucoup plus complexe, voire dangereux
dès que l'on s'éloigne de la terre. Certains
chercheurs d'OVNI mettent rarement la main à la pâte ou l'oeil
à l'occulaire et très vite, soucoupe volante va s'apparenter à
de stériles polémiques, à des jalousies du style "il a
utilisé MON idée dans SON livre !", etc... jusqu'à ce que
la paranoïa pointe son nez avec les premiers intérêts financiers.
Bien sûr, il n'y a pas vraiment de mal à utiliser l'extraterrestre
pour augmenter les ventes d'un magazine pendant l'été. C'est humain
même si cela ne fait pas avancer le schmilblick. Mieux vaut ne pas énumérer
le reste sous peine de quitter complètement le domaine de l'interrogation
légitime pour celui de la croyance. Emettre l'hypothèse
que nous ne sommes pas seuls sur Terre et en chercher les preuves, voilà
une attitude tout à fait louable, qui peut même conduire indirectement
à des développements technologiques comme en témoignent
les travaux sur la MHD de l'astrophysicien Jean-Pierre Petit. En revanche, croire
que notre ciel est envahi de soucoupes volantes ou qu'un éventuel vaisseau
extraterrestre viendra nous sauver n'apporte rien à personne, sauf à
quelques banques suisses. La frontière entre interrogation et croyance
ne présente ni barrière, ni barbelé. Certains la franchissent
simplement parce qu'un jour ils ont vu une lumière dans le ciel. Ce
phénomène doit rester inexpliqué tant qu'aucune certitude
ne vient l'éclairer. Carl Sagan disait "A postulat extraordinaire, preuve
extraordinaire". Les quelques éléments présentés
jusqu'à présents par les défenseurs de l'hypothèse
"ils sont parmi nous" ne permettent pas de résoudre le paradoxe de Fermi,
même si l'on ne peut les ignorer.
Quel est le point commun entre un gnou et un extraterrestre
? Je n'ai rencontré ni l'un ni l'autre, si ce n'est au cinéma
ou dans les média. Quelle méthode puis-je employer pour vérifier
l'existence des gnous ? A défaut de trouver un animal en vie dans un
zoo, la seule solution est d'aller en Afrique et de toucher un gnou. J'aurais
ainsi la preuve que ces animaux existent mais je serai toujours incapable de
démontrer l'existence des gnous à un interlocuteur potentiel,
en utilisant seulement ma logique. Celui-ci sera bien obligé d'accepter
mon récit de voyage, de me faire confiance à un moment ou un autre.
Le rationnalisme pur et dur ne conduit qu'à l'ignorance. Et si les extraterrestres
jouaient à l'homme invisible ? Si je peux parier qu'il y a des gnous
sur Terre sans en avoir vu, pourquoi ne puis-je pas parier qu'il y a aussi des
extraterrestres ? Une réponse au paradoxe de Fermi pourrait
donc se présenter sous la forme "Ils sont parmi nous mais ils se cachent."
Nul doute que chaque cerveau est capable d'imaginer pourquoi nos éventuels
visiteurs ne veulent pas se montrer ou pourquoi nous ne voulons pas les voir.
La science-fiction regorge d'exemples. Lorsque Calvin déclare à
son tigre Hobbes "La meilleure preuve qu'il existe des êtres intelligents
dans l'univers, c'est qu'aucun ne soit venu nous rendre visite", il n'est certainement
pas loin de la vérité ! Cependant, l'hypothèse "ils sont
parmi nous mais on ne les voit pas" ne pourra jamais être vérifiée.
Il faudrait pour cela que l'on puisse les voir... ce qui nous ramènerait
à l'hypothèse précédente "ils sont parmi nous".
Cela n'a pas empêché quelques grands scientifiques de leur souhaiter
la bienvenue... au cas où. L'astronome canadien Allen Tough a construit
un site web "Welcome ET" destiné à accueillir des extraterrestres
sur la grande toile mondiale. Petit à petit, un groupe solide s'est construit
autour de cette intiative originale, auquel vient de se joindre Arthur Clarke,
scientifique reconnu et célèbre écrivain de science-fiction.
Sont-ils des croyants ? Non, l'extraterrestre n'est
pas leur religion agitant l'image du paradis ou de l'enfer pour dicter leurs
actes. De nombreux enfants écrivent au Père Noël, d'autres
déposent une bouteille de vin à côté des souliers
pour tester le comportement de ce mystérieux personnage. Finalement,
nous n'avons là que des tentatives de communication. Puisqu'ET refuse
de s'exprimer le premier, à nous de montrer que notre intelligence est
à la mesure de la sagesse d'un enfant turbulent avant Noël, c'est-à-dire
qu'avec un peu d'efforts, nous pouvons pousser notre réflexion en dehors
de la sphère anthropocentrique. De plus cet exercice philosphique ne
mange pas de pain, alors pourquoi s'en priver ?
Mais où sont-ils ? S'ils ne sont pas sur Terre, sont-ils ailleurs ? Le
raisonnement de Fermi insite à penser que non, que nous sommes seuls
puisqu'ils ne sont pas là.Pourquoi ne suis-je jamais
allée en Afrique ? Pourquoi Toto l'extraterreste n'est-il jamais venu
sur Terre ? Le tourisme ne l'intéresse pas. Il capte nos chaînes
de télévision, donc connait par coeur la vie des gnous et des
impalas dans le Serengeti. Prendre quelques photos et regarder de loin la vie
des gens ne présente aucun intérêt pour lui. Toto a également
pensé faire un voyage humanitaire, mais la vue d'un tracteur rouillé
dans le désert lui a rappelé qu'il ne trouverait pas forcément
sur Terre les pièces détachées pour sa soucoupe volante.
Et finalement, les terriens ont-ils vraiment besoin de technologie spatiale
? Déplacer les cailloux dans les cavités du jeu de l'awalé
(4) requiert plus de logique, d'intelligence et de perspicacité que d'appuyer
sur les deux touches d'une abrutissante console Pikapika. La Terre l'a toujours
fasciné. Finalement, peut-être a-t-il peur de ne pas avoir envie
de rentrer chez lui s'il s'aventure sur la planète bleue ? Plus casanier
que nomade, la nature de Toto fait qu'il n'a pas le temps d'aller sur Terre.
Même si j'ai l'envie et les moyens financiers ou matériels d'aller
en Afrique, je n'y ai jamais mis les pieds. Pourquoi ? Je pourrais trouver des
tas d'excuses sans qu'aucune soit vraiment convaincante.N'est-il
pas possible qu'une civilisation extraterrestre puisse ne pas avoir envie d'explorer
la galaxie ? Par exemple, pourquoi irais-je
en Afrique alors qu'Internet permet une communication rapide, efficace et bon
marché avec des amis situés à Alger, Casablanca ou Bobo-Dioulasso
?
Mais je ne suis qu'un cas isolé, comme la planète
de Toto. Sur les 200 milliards d'étoiles de notre Voie Lactée,
environs 14% ressemblent au Soleil. Certaines sont trop vieilles ou trop jeunes
pour avoir des planètes, qui toutes n'ont pas forcément vu une
vie intelligente se développer. Quoi qu'il en soit, ça fait tout
de même pas mal d'endroits d'où des civilisations auraient pu partir
découvrir la galaxie. Si je ne suis jamais allée en Afrique, d'autres
en sont revenus et ne pensent qu'à repartir. Ce n'est pas parce que la
civilisation de Toto est restée sur sa planète que toutes les
races de la galaxie en ont fait autant. Mais où sont-elles ? Certaines
ont pu passer quand nous n'étions pas encore là et les dinosaures
auraient oublié de nous transmettre le petit mot qu'elles ont laissé.L'Américain
Carl Sagan ou le Français Jean Heidmann savaient utiliser aussi bien
la presse que les télescopes pour communiquer leur passion pour l'astronomie
et diffuser l'idée que nous ne sommes peut-être pas seuls dans
l'univers, tout en combattant l'irrationnel. Ils ont tenu les ficelles décisionnelles
des hautes autorités scientifiques et politiques, ils ont écrit
plusieurs livres, sont apparus à la télévision. (3)
Pourtant quel pourcentage de Français ou
d'Américains ont simplement entendu le message de ces deux grands astronomes
aujourd'hui disparus ? Combien l'ont compris ? Combien l'ont retenu ? En admettant
qu'il y ait dans la galaxie au moins une civilisation qui ait eu envie de voir
du paysage,on peut résoudre le paradoxe
de Fermi avec l'hypothèse "Ils sont simplement passés sur Terre",
même si nous n'avons aucune preuve. Je
pourrais très bien visiter l'Afrique sans nouer aucun contact, sans laisser
la moindre trace. Personne ne serait en mesure de prouver que j'y suis allée.
Fermi stipule cependant qu'il y a eu une colonisation
de la galaxie. Lorsque des entités intelligentes arrivent quelque part,
elles s'y installent jusqu'à ce que d'autres générations
poussent la conquête un peu plus loin. Ce comportement non seulement apparaît
comme très humain, mais en plus il est criticable, voire dépassé.
Le paradoxe date de 1950. Quelques années plus tard, l'idée d'une
race cherchant à coloniser la galaxie n'aurait peut-être même
pas effleuré l'esprit de Fermi. Nul
doute qu'un extraterrestre nous traiterait de barbares en découvrant
cette période de l'histoire de France dont nous sommes si peu fiers que
les manuels scolaires oublient de mentionner les tirailleurs sénégalais.
Sur le vieux continent, la colonisation demeure un sujet tabou, la décolonisation
une blessure ouverte. Bien sûr, la France est fière de ses bons
élèves comme la philosophe ivoirienne Tanella Boni ou Check Mobido
Diarra, l'ingénieur malien sans qui des milliers de terriens n'auraient
pas entendu parler de Mars Pathfinder, le petit robot téléguidé
à la surface de Mars. Bien inconscient serait celui qui s'amuserait à
dresser une sorte de bilan de ce voyage au bout de la nuit. Imaginer ce que
serait le monde si nos ancètres n'avaient pas été si barbares
est un exercice périlleux.Mais ces erreurs
ne devraient-elles pas au moins nous insiter à banir les termes de conquête
et de colonisation de l'espace comme le préconise l'ufologue Jean-Louis
Decanis ?
Cette pirouette consistant à enterrer le paradoxe
de Fermi avec nos déchets nucléaires et autres objets encombrants
n'est pas satisfaisante. Recyclons encore et toujours..."Les
paradoxes-vérité ont une certaine clarté charmante et bizarre
qui illumine les esprits justes et qui égare les esprits faux" a écrit
Victor Hugo. Où sont-ils ? Sommes-nous
seuls ? Ces questions feront encore couler beaucoup d'encre puisqu'elles relèvent
de l'éternelle quête de l'autre, miroir de nos comportements. "L'intelligence
humaine n'est pas le nec plus ultra de ce que le cosmos a pu produire" martelait
Jean Heidmann dans ses livres et à chacune des ses apparitions médiatiques.
Les européens ont appris à leur dépends qu'il existait
d'autres esprits, ni supérieurs, ni inférieurs, mais seulement
différents comme celui de Gandhi. Pourtant constitués à
partir des mêmes gènes, nous autres terriens sommes confrontés
chaque jour au choc des cultures.
Quel pourcentage de la population a simplement levé
les yeux vers les cieux étoilés pendant quelques heures ? Combien
de mathématiciens savent jongler avec des concepts d'univers jumeaux
basés sur l'anti-matière ? Nous sortons à peine de notre
berceau. A quatre pattes sur l'argile, nous regardons notre ombre au fond de
la caverne. Une musique lointaine nous laisse présager que nous ne sommes
pas seuls. Ces notes viennent-elles d'une harpe celtique ou d'une kora africaine
? A moins qu'il ne s'agisse que du fruit de notre imagination stimulé
par le bruissement des feuilles de l'arbre à palabres ?
(1) Titre remplacé par "Pardoxe de Fermi : La clé de l'enigme OVNI ?"
(2) Que les chiffres effraient le lecteur, admettons. Dans ce cas, pourquoi ne m'ont-ils pas demandé de réécrire ce passage ? Nulle part dans le texte n'apparait l'idée fondamentale du paradoxe "S'ils existent, ils doivent être là".
(3) Passage coupé et collé dans un autre contexte. (3a)
(4) L'intertitre était une référence à l'awalé évoqué ensuite. Mais ce passage a été supprimé. S'ils n'ont pas compris ce que je voulais dire, pourquoi ne m'ont-ils pas simplement posé la question ?
(5) Jeu de mots (laid) avec les tirailleurs sénégalais évoqués ensuite. Le passage a été coupé.
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