26 octobre 2001
| Preuves 
        des terribles tortures subies par la jeune basque lratxe Sorzabal aux mains de la Garde Civile | 
   
  Preuves des terribles tortures subies par la jeune basque
  Iratxe Sorzabal 
  aux mains de la Garde Civile 
   
  
  Iratxe Sorzabal 
  âgée de 29 ans, est détenue le 30 mars 2001 par des agents 
  de la Garde Civile en civil à 9 heures 30 alors quelle sort de chez elle 
  à Hernani (Guipuzkoa). Elle est placée en régime incommuniqué 
  dans le cadre de la loi antiterroriste. La loi prévoit dans ce cadre 
  une détention de 72 heures maximum mais, à la demande de la police, 
  ce délai peut être prolongé de 48 heures à condition 
  que le juge l'accepte. Dans le cas d'Iratxe Sorzabal, cette prolongation est 
  accordée alors même que suite aux mauvais traitements subis, elle 
  a déjà été conduite à l'hôpital. En 
  outre, Iratxe Sorzabal est présentée au juge de l'Audience Nationale 
  le 4 avril à 11 heures alors que le délai de garde à vue, 
  établi par la loi, est écoulé depuis déjà 
  deux heures. Iratxe Sorzabal est présentée au juge toujours incommuniquée, 
  c'est à dire sans l'assistance d'un avocat de son choix, elle refuse 
  donc de répondre aux questions du juge Ismael Moreno mais lui relate 
  cependant le traitement quelle a subi. 
Témoignage
          Dans 
  une déclaration minutieuse, Iratxe Sorzabal raconte les effrayantes tortures 
  qu'elle a enduré alors qu'elle se trouve aux mains de la Garde Civile 
  pendant les cinq jours de sa détention incommuniquée, surtout 
  pendant les trois premiers jours car les deux jours suivants on lui fait apprendre 
  la déclaration que la police veut qu'elle effectue devant le juge. Suivent 
  ici des extraits du témoignage de Iratxe Sorzabal, extraits tirés 
  de la plainte déposée auprès du tribunal. 
   
            « Dans 
  le véhicule nous sommes cinq, quatre gardes civils et moi. Je suis à 
  l'arrière entre deux d'entre eux. Je peux voir le visage de ceux qui 
  sont devant ainsi que de celui qui se trouve à ma gauche. Sitôt 
  dans le véhicule, le chef me dit : " bon, ici toutes ces 
  conneries de droits, de juges et autres merdes sont terminées, à 
  partir de maintenant tu vas savoir ce qui est bon ! Tu entends fille de 
  pute ? ". Ils me frappent sur la tête. Ils me mettent un 
  masque sur les yeux et les coups sur la tête se succèdent ainsi 
  que les insultes et les menaces. A part le conducteur, les trois autres me frappent 
  avec force sur la tête. Celui qui se trouve à ma droite sort un 
  appareil qu'il tenait entre les jambes et commence à me donner des décharges 
  électriques sur le côté droit. Celui qui se trouve à 
  ma gauche prend un sac en plastique et me le met sur la tête m'empêchant 
  de respirer au point de m'asphyxier. Les coups sur la tête donnés 
  par celui de devant sont constants. Celui qui se trouve à ma droite me 
  tripote la poitrine. Les électrodes, le 
  sac en plastique, les tripotages et les coups sont permanents au milieu des 
  cris, des insultes et des menaces. Je perds connaissance au moins à deux 
  reprises, j'urine sous moi. Avant de perdre connaissance, je parviens à 
  déchirer le sac en plastique avec les dents à plusieurs reprises, 
  ils en placent alors un nouveau. A la fin, vu que je déchire les sacs, 
  ils décident alors d'en mettre trois l'un sur l'autre. 
   
« Ils me disent que ce qu'ils sont en train de faire n'est rien, que lorsque nous arriverons à Madrid, là oui, je vais apprendre ce que c'est la souffrance, que ceux de là bas sont des bêtes, celui qui se trouve à ma droite dit alors que les piles de l'appareil sont usées, il les change et recommence avec les décharges. Parfois, il passe l'appareil à celui qui se trouve à ma gauche et lui aussi me provoque des décharges sur le côté gauche. Les électrodes, les coups, le sac, les tripotages, les cris, les insultes et menaces sont incessants, tout à la fois. (...)
« L'un des gardes civils me dit qu'ils vont me faire la même chose qu'à Geresta et à Basajaun, qu'ils vont m'emmener à la montagne et que là ils vont me tuer. Ils arrêtent le véhicule (ils me disent que nous sommes à la montagne) et me mettent un pistolet entre les mains. Je ne veux pas le prendre, ils m'ordonnent de sortir du véhicule et de me mettre à courir, alors eux vont me tirer dessus et me tueront, ils diront que j'ai tenté de m'enfuir et qu'ils ont été obligés de tirer et qu'ils m'ont tuée. Ils m'obligent à me saisir du pistolet et à sortir du véhicule. En criant, ils me disent de courir mais je pouvais pas bouger et je n'ai pas couru. Ils me remettent dans le véhicule alors que l'un d'entre eux dit : " allons nous en, dans le véhicule qui arrive il y a du monde, rentre dans le véhicule, il y a des gens qui arrivent ". " Espèce de garce, tu l'as échappé belle parce que des gens arrivent, sinon on te tuais sur place ! " (...).
          « Vers 
  19 h 30 le médecin légiste s'en va (j'apprends plus tard qu'il 
  s'agit d'un vrai médecin). Sitôt ce dernier parti, ils me remettent 
  le masque. 
  A partir de ce moment et jusqu'au lendemain à la mi journée, voilà 
  ce qui se passe pendant 16 heures sans discontinuer, sans aucun repos : 
  ils me mettent dans un local qu'ils appellent " le local A " 
  où se trouvent plusieurs hommes, une dizaine selon moi. Ils se succèdent 
  pour me torturer. Ils me mettent des sacs en plastique sur la tête jusqu'à 
  m'asphyxier constamment... pour cela l'un d'entre eux me saisit par derrière 
  et chaque fois que je perds connaissance, il me retient pour m'empêcher 
  de tomber sur le sol, les coups sur la tête sont constants   
  (avec la main, avec un annuaire, ce sont eux qui me disent de quoi il s'agit 
  ou avec une revue roulée, ça je l'ai vu moi même...). Ils 
  m'attachent les poignets et les pieds et me mettent une espèce de mousse 
  pour ne pas laisser de traces. Ils me roulent dans une couverture et m'immobilisent 
  ainsi avec du ruban adhésif. Ils me jettent au sol, je suis sur le dos, 
  je n'ai que la tête à l'air libre, un garde civil se place sur 
  moi et à plusieurs reprises   m'asphyxie 
  avec le sac en plastique. II m'introduit le sac dans la gorge et me bouche le 
  nez jusqu'au vomissement. Ils se succèdent ainsi, en fait ils se succèdent 
  pour me faire de tout. Ils me déshabillent (de manière très 
  violente car je n'ai plus de forces) et constituent un cercle au centre duquel 
  je me trouve. Ils m'obligent à effectuer des flexions de deux types. 
  Les unes en baissant et relevant le corps, les autres en baissant et levant 
  les bras. Pendant que je fais ces flexions, ils me frappent sur la tête 
  et commencent à me tripoter tout le corps, en particulier la poitrine, 
  les fesses et le pubis. Ils me mettent un bâton dans la main et me disent 
  qu'ils vont me le mettre dans le cul, ils m'obligent à me mettre à 
  quatre pattes sur la couverture, ils me tripotent toujours...
   
            « Cela 
  dure pendant 16 heures sans discontinuer, toujours au milieu des cris, des insultes 
  et des menaces. Ils se succèdent et me disent : " ceux 
  qui arrivent maintenant sont vraiment les méchants... " Constamment, 
  ils menacent de me violer... l'un d'entre eux défait sa ceinture et ouvre 
  sa braguette (je ne le vois pas à cause du masque mais je le sens et 
  il me dit : " maintenant tu vas me sucer la bitte ", 
  les autres ajoutent : " on va te baiser les uns après 
  les autres... " etc. etc. Les menaces contre ma famille sont constantes, 
  ils disent qu'ils vont détenir ma sur ainsi que ma mère 
  qu'ils vont violer... l'un d'entre eux parle au téléphone pour 
  donner l'ordre d'arrêter ma mère et de l'amener ici (plus tard 
  je saurais que c'est un mensonge). J'entends des cris et ils me disent que c'est 
  une de mes amies et qu'ils sont aussi en train de la torturer (c'était 
  aussi un mensonge). Ils me disent qu'ils vont me sortir d'ici en hélicoptère 
  et qu'ils vont me balancer de là-haut. Ils disent que je dois bien apprendre 
  ce qu'ils vont me dire, sinon ils vont continuer ainsi jusqu'à me tuer... 
  ils menacent de me faire la baignoire et le chevalet, car c'est tout ce qu'il 
  me reste à découvrir, ils me répètent à plusieurs 
  reprises les réponses qu'ils veulent entendre et lorsque je dis quelque 
  chose qui ne leur convient pas ils frappent plus fort, ils me répètent 
  les réponses afin que je les apprenne de mémoire   
  (...). 
   
            « Le 
  samedi, vers midi, ils me conduisent dans une cellule et environ un quart d'heure 
  plus tard, ils me conduisent à l'étage au dessus, là où 
  se trouve le médecin légiste. Je doute encore en ce qui le concerne, 
  je ne sais pas si c'est un vrai médecin, mais je suis complètement 
  démolie et je décide de lui raconter le traitement dont je suis 
  l'objet, je crois que si véritablement, 
  il s'agit d'un médecin, il va m'aider et s'il ne l'est pas je me dis 
  que ce qu'ils vont me faire ne peut être pire... j'ai très peur, 
  mais je n'en peux plus... il me semble que ma tête va exploser, j'ai une 
  terrible douleur dans le cou, je ressens un épuisement physique extrême 
  et je commence à lui montrer les marques faites par les électrodes. 
  En me voyant, il me dit qu'il va m'emmener à l'hôpital. 
   
            « (...) 
    Le chef commence à me parler pour me dire 
  qu'ils sont très en colère après moi. II me dit qu'à 
  partir de maintenant, je dois faire ce qu'ils me commandent et que je dois déclarer 
  mot pour mot ce qu'ils souhaitent. II me dit que j'ai trois options :
   
            1° 
  Si je ne réalise pas la déclaration de la police, ils vont continuer 
  comme jusqu'à présent, en me torturant sans arrêt, le sac 
  en plastique, les électrodes, les coups... que le chef qui est au dessus 
  de lui connaît bien le traitement qu'ils sont en train de m'appliquer 
  et que, de ce côté ils n'ont aucun problème. 
   
            2° 
  Si de décide de déclarer, mais que je ne répète 
  pas mot pour mot ce qu'ils m'ont dit, le traitement sera alors pire que celui 
  que j'ai subi jusqu'à présent, que pendant les trois jours qui 
  restent ils vont me faire souffrir à en mourir. 
   
            3° 
  Si j'effectue ma déclaration comme ils le souhaitent, ils ne vont plus 
  me toucher et vont me laisser dormir après ma déclaration. 
   
« Ils me disent que je n'ai aucun droit et que je dois choisir une de ces trois possibilités. Je suis exténuée physiquement et psychologiquement, je leur dit que je vais déclarer ce qu'ils souhaitent ».
Analyse 
  médicale des tortures 
   
            Iratxe 
  Sorzabal est examinée par un médecin légiste de l'Audience 
  Nationale le 30 mars, mais à ce moment, elle pense qu'en fait il s'agit 
  d'un garde civil et chaque fois qu'il s'approche d'elle, elle se met à 
  pleurer, elle tremble et est incapable de parler. Le médecin déclare 
  que Sorzabal lui demande de ne pas la toucher et qu'elle présente " une 
  forte charge émotionnelle ".
   
            Le 
  lendemain, le médecin légiste revient, selon ce que déclare 
  Sorzabal, elle se sent tellement mal qu'elle décide de lui raconter le 
  traitement qu'elle a subi alors qu'elle n'est pas certaine qu'il s'agisse bien 
  d'un médecin. Le médecin constate les lésions et décide 
  son transfert à l'hôpital. Les différents rapports de l'hôpital 
  San Carlos de Madrid constatent :
   
             Céphalée 
  avec cervicalgie mécanique qui, selon la patiente, est due à une 
  agression et au fait d'avoir maintenu la tête fléchie plusieurs 
  heures durant. 
             Contractures 
  cervicales sans hématomes ou hyperémie traumatique, 
             
  Erythème sur les flancs, 
             Rx de 
  la colonne cervicale : rectification de lordose cervicale, subluxation 
  postérieure C3-C4. 
   
            Au 
  vu des résultats des examens pratiqués, le médecin Itxaso 
  Idoiaga conclut pour sa part qu'il existe bien des signes objectifs sur :
   
             l'application 
  de chocs électriques car l'analyse de l'érythème de 10 
  centimètres de large dans le dos, depuis le coccyx jusqu'au cou, surtout 
  dans la  partie droite mais aussi dans la partie 
  gauche permet d'observer une dermite vésiculaire par brûlure électrique. 
  Ces lésions coïncidant avec la description faite dans une vaste 
  bibliographie analysant les brûlures électriques. 
               
  Traumatisme cervical avec flexion forcée de la colonne cervicale : 
  les lésions cervicales sont récentes et sont compatibles avec 
  un mécanisme de flexion forcée maintenue pendant plusieurs heures.
Ce médecin conclut par ailleurs qu'il existe des évidences subjectives sur :
             Une 
  asphyxie avec un sac en plastique, 
             Autres formes 
  alléguées. 
   
            Pour 
  parvenir à ces conclusions, le docteur Itxaso Idoiaga constate que l'état 
  psychologique de Sorzabal coïncide  parfaitement 
  avec ce que constate le médecin légiste lors de sa première 
  visite. Par ailleurs, il existe une constante dans les deux déclarations 
  faites par Sorzabal entre les symptômes qu'elle décrit et les constatations 
  des médecins, entre les symptômes qu'elle décrit et les 
  méthodes de tortures mentionnées... 
   
   
  Situation actuelle 
   
            Iratxe 
  Sorzabal a dénoncé auprès du juge les graves tortures qu'elle 
  a subies. Elle est cependant emprisonnée sur ordre du juge Ismael Moreno, 
  Tribunal Central d'Instruction n° 3 de l'Audience Nationale. Dans l'enquête 
  préliminaire 148/01, le juge accuse Iratxe d'un 
  délit d'appartenance à un groupe armé. Après plusieurs 
  mois d'emprisonnement, elle est libérée le 13 septembre 2001 sans 
  demande de caution, elle doit par contre se présenter au tribunal le 
  plus proche de son domicile, tous les quinze jours. 
   
            Depuis 
  sa mise en liberté, elle a été entendue comme accusée 
  dans deux autres dossiers pour de prétendus délits de terrorisme, 
  le juge n° 3 de l'Audience Nationale n'a pas requis la prison dans 
  aucun de ces deux cas. 
   
            Les 
  photos prises à l'hôpital ont été jointes au dossier 
  en tant qu'éléments clarificateurs. 
   
II nous faut rappeler qu'Iratxe Sorzabal a été emprisonnée en France et que n'ayant pas de dossier ouvert à l'Audience Nationale, l'Espagne n'a pas fait de demande d'extradition, elle est tout simplement expulsée de France à la fin de sa condamnation. Comme Iratxe se trouve à ce moment en grève de la faim et de la soif pour éviter d'être torturée par la police espagnole, elle n'est pas détenue après son expulsion.
Nous voulons ici rappeler les cas de tortures pour lesquels plainte a été déposée par les citoyens basques ces dernières années :
          1992 : 
  131 cas                        
  1997 : 121 cas
              1993 : 
  83                                1998 : 
  97 cas
              1994 : 
  112                              1999 : 
  48 cas
              1995 : 
  98 cas                          2000 : 
  77 cas
              1996 : 
  123 cas                        2001 : 
  55 cas en six mois.
  
   
   
  Analyse 
   
            Le 
  TAT (Groupe contre la Torture) constate une nouvelle fois que l'existence de 
  la torture dans les commissariats espagnols est bien réelle. Les photos 
  montrent dans le cas présent ce que trop souvent, dans d'autres cas, 
  il est difficile de prouver. Iratxe Sorzabal réalise un effrayant récit 
  des tortures qu'elle subit et aujourd'hui nous disposons ainsi d'une preuve 
  palpable. 
   
Malheureusement, il nous faut constater que la torture n'a pas cessé d'exister et que les basques qui en ont souffert et en souffrent sont nombreux. Selon nous, c'est le système actuel qui permet la torture dans les commissariats, c'est pour cette raison que le TAT a fait une proposition en neuf points pour l'éradication de la torture.
Observatoire 
  Basque des Droits Humains
  ikuskapena@euskalerria.org
  behatokia@euskalnet.net
  
   
Vive la révolution : http://www.mai68.org
                                      ou : 
  http://www.cs3i.fr/abonnes/do 
  
             ou : 
  http://vlr.da.ru
                ou : 
  http://hlv.cjb.net