6 novembre 2001

 

De la crise globale à la guerre globale

Bien avant l’attaque contre les twins towers et le Pentagone, on parlait déjà de crise. Il suffit de relire un journal paru l`été dernier pour trouver des nouvelles sur la récession économique aux Etats Unis.

Après dix ans de croissance économique, la "locomotive de l’économie mondiale" haletait et marchait avec fatigue. L’euphorie des bourses aux USA n’était plus qu’un souvenir et on commençait à compter les premières victimes de cette maladie de l’économie.

Avant que le peu d’économistes honnêtes ne comprennent que l’on pouvait à nouveau parler de "chute tendancielle du taux de profit", le cycle économique de la production capitaliste était déjà dans sa phase descendante. « Croissance zéro et récession », ce sont les deux termes les plus redoutés par les capitalistes, pour lesquels chaque stratégie est admise y compris la guerre…

Nous ne voulons pas réduire la situation qui se déclare actuellement au niveau planétaire à l`équation "crise = guerre", mais nous pouvons être sûrs que grâce à cette guerre, des pillards capitalistes qui étaient en difficulté jusqu`au 10 septembre s’accapareront de profits énormes. En effet, pendant l’année 2001, il y a eu neuf interventions de la FED sur le coût de l`argent et deux interventions de Bush pour un total de 125 milliards des dollars. Mais la situation économique a continué à empirer. Depuis l’attaque contre les tours jumelles et avec l’approbation de Greespan, l’administration Bush a accordé une intervention supplémentaire de 100 milliards des dollars en une seule fois. Les 17 milliards des dollars donnés aux compagnies aériennes pour surmonter la crise sont en réalité utilisés pour baisser les tarifs. Les Etats Unis ont aussi déclaré que l’emprunt nécessaire à la relance de l`économie américaine sera accordé, ce qui met fin aux illusions sur le «marché réglé» et la «libre concurrence». Donc, une autre victime probable du 11 septembre sera l’OMC.

Le prétendu miracle économique américain des années ‘90 – appelé new economy – était surtout basé sur une bulle financière. L’autre face de ce fameux boom a été la sur-exploitation de millions d’immigrés qui recevaient des salaires de la faim et l`appauvrissement des millions d’ouvriers et d’employés américains. Avec l’explosion de cette bulle spéculative et la faillite des milliers de «Dot Com», la nouvelle économie est entrée en crise, entraînant avec elle la vieille économie.

En augmentant les dépenses militaires, en finançant la recherche dans le cadre du programme de bouclier spatial et de nouveaux armements technologiques, (comme déjà dans les années ‘80), le gouvernement n`a pas seulement des objectifs géo-stratégiques (contre le danger d`une alliance entre la Russie et la Chine par exemple), mais il veut aussi pallier à l`absence des investissements privés.

Les crises générales du capitalisme ont toujours mené à la guerre. Et l`histoire démontre que les guerres d`agression sont toujours liées structurellement à l’impérialisme en crise. Après la destruction, il y aura la reconstruction et on résoudra une partie des problèmes de surproduction. Peut-être que les Etats Unis réussiront à sortir de la récession, mais ils ont déjà créé les conditions pour une crise encore plus grave.

Liberté et libéralisme

En limitant les « libertés individuelles », l’opération "liberté immuable" est l’une des plus grandes opérations contre la soi-disant démocratie, dont les plus valeureux défenseurs sont toujours ceux qui l`appliquent le moins. Guerre, militarisation, nouvelles lois répressives,… Aujourd`hui chaque mot à contre-courant peut être utilisé contre ceux qui s`opposent aux lois du capitalisme: maintenant, tout est caché derrière la formule de «la lutte contre le terrorisme». Aujourd`hui rien n`est libre, ni les marchandises, ni la circulation des hommes, ni la pensée... Et tout est attribué à l’attaque qui a visé le "coeur" du système et qui jusqu’alors était considéré comme invulnérable. Mais quel est donc vraiment ce "cœur" du système?

Le vrai coeur qui soutient ce système est représenté par la recherche continue du profit CAPITALISTE. En effet, l’unique vraie liberté qui sera garantie dans les prochaines années sera celle des profits pour les capitalistes.

Ainsi, pour les capitalistes cyniques, l’action contre les twins towers de New York peut désormais servir à aider une économie globale qui, depuis trop longtemps, est moribonde et qui comporte des symptômes de déséquilibre aigu au niveau de la redistribution des richesses. Une "maladie" causée par la surproduction des capitaux qui ne trouvent plus où se valoriser. Une "maladie" aggravée par la compétition et par la guerre commerciale croissante entre les pôles impérialistes. C`est pour cela que les Etats Unis ont besoin d`un traitement pour renforcer leur hégémonie parmi les puissances impérialistes.

Mais il y a encore une victime dans cette nouvelle crise: le fameux libéralisme.

Derrière la "lutte contre le terrorisme" se cache l’essence du système: après des années d’éloges grandiloquents sur le libéralisme, voilà la fin du mythe et l`Etat est une fois de plus, le meilleur «allié» de l’économie.

Maintenant, avec la crise, l`Etat impérialiste veut redresser les dettes des banques et des entreprises et il exige des travailleurs de nouveaux sacrifices. Donc, le libéralisme ne compte pas pour les pays impérialistes mais seulement pour les pays pauvres, appelés avec hypocrisie "en voie de développement".

Le FMI et la Banque Mondiale ont imposé à ces nations, les lois du libéralisme sauvage qui ont semé, en peu de temps, famine et misère. Ils ont imposé, par diverses méthodes, le "libre" échange à sens unique: les pays dépendants doivent importer les marchandises produites par les multinationales, mais ils n`ont pas la possibilité d`exporter leurs propres produits.

Par conséquent, les matières premières à bas prix servent à payer les intérêts sur les dettes que les pays du Sud ne pourront jamais rembourser.

L’idéologie libérale dans les Etats impérialistes sert à détruire les acquis des travailleurs, à vendre les ressources nationales, à privatiser et à introduire la flexibilité. Désormais, les travailleurs devront aussi payer les coûts de cette guerre.

Ainsi, en cette période de crise, le capitalisme n`a plus de masque a porter. Les peuples et les travailleurs payent et ils payeront encore. Ils payeront cher les coûts des nouvelles «mesures» économiques, idéologiques et politiques. Et contre ces mesures, nous devons nous battre, en mettant le mot d’ordre de lutte à l’agenda du mouvement contre la guerre au niveau international.

Aujourd’hui, c`est manifestement le peuple afghan qui paie les coûts majeurs de la guerre et cela, parce qu’il a la malchance de vivre sur une territoire vital pour les intérêts impérialistes. Les peuples arabes paieront à leur tour, dans les phases suivantes de cette guerre globale. Ensuite payeront les peuples turc et colombien qui conduisent une lutte révolutionnaire héroïque contre leurs propres régimes fascistes et laquais de l’impérialisme.

Hégémonie des USA

« Ou avec nous ou contre nous ». Tels sont les mots que le président des Etats Unis a déclaré après les événements du 11 septembre, au nom de la solidarité contre le terrorisme. Une nouvelle phase dans le scénario international qui s`est ouvert pour réaffirmer l’hégémonie des Etats Unis comme puissance "globale".

Les USA veulent utiliser cette situation pour contraster le projet de renforcement de l’Union Européenne du point de vue économique et militaire, avec la possibilité de constituer une armée européenne capables d’intervenir dans les conflits. En effet, dans la phase actuelle, les Etats Unis ont utilisé l’alliance atlantique, avec l`article 5 de l`OTAN, dans le seul but d’obliger ses alliés a s`aligner.

Avec cet épisode, nous avons la confirmation que l’Alliance Atlantique est seulement un instrument que les USA utilisent quand ils veulent. Ils la convoquent, ils décident et ils la mettent de côté quand ils pensent qu`elle est une entrave pour leurs stratégies économiques et militaires de domination mondiale.

Pendant des années, les Etats Unis ont imposé la réduction du rôle des Nations Unies parce qu’ils ne veulent plus négocier les équilibres internationaux avec ceux qui entravent sa politique d`agression militaire dans le monde.

Si jusqu`à la guerre du Golfe, les pays impérialistes ont mené ces interventions militaires avec le parapluie des Nations Unies, ces dernières années, les USA ont utilisé seulement l`OTAN ou autres sièges pour ordonner ces interventions.

Cette hégémonie des Américains, qui leur permet de contrôler et d’utiliser tout ce qu`ils veulent, n`a jamais vraiment été contestée, ni par les pays de l’UE, ni par la Russie. La politique de guerre déchaînée après les événements du 11 septembre accentuera le rôle de puissance "globale" des USA et la servitude des autres pays.

L’importance de l’Afghanistan

Le processus de déstabilisation de la zone de la mer Caspienne et, en particulier, de l’Afghanistan a des racines très lointaines. Les plans impérialistes sur le contrôle de la région remontent à plusieurs années. Le pays se situe dans une zone d`intérêt stratégique, peut-être l’une des plus importantes pour le passage des oléoducs et parce qu`elle est une étape incontournable sur le chemin menant vers la Chine, nouvel ennemi potentiel des prochaines années.

Apres la débâcle des Soviétiques, battus par les moudjahidines financés et armés par la CIA, les USA ont soutenu des nouveaux jeux de pouvoir et de nouvelles alliances qui ont eu comme conséquences la dévastation d’un pays déjà au bord de la désagrégation complète. Et maintenant, encore une fois, l’Afghanistan suscite l’appétit et la convoitise. La région, donc, est disputée et appétissante pour plusieurs puissances qui veulent se garantir l’extraction du gaz et du pétrole, la présence de leurs propres infrastructures et de leurs propres installations militaires pour les défendre. D’autres pays limitrophes cherchaient des solutions pour ces problèmes vitaux. En juin du 2001, il y a eu à Shangaï, une rencontre entre six pays centre-asiatiques, convoquée par la Chine en collaboration avec la Russie pour discuter d’accords économiques et militaires pour la région.

Cette chose a fort préoccupé les Etats Unis, effrayés par l`idée que pouvaient naître de nouvelles alliances et de nouveaux scénarios alternatifs aux plans impérialistes. C`est à ce propos que les médias internationaux avaient reparlé de l’Afghanistan, qui avait été oublié depuis plusieurs années. On a commencé à parler des talibans, des violations des droits humains, de la drogue, des conditions de la femme dans ce pays. On a alors commencé à faire de la situation afghane un problème international. On remet au devant de la scène les réfugiés, les seigneurs de la guerre, la «folie fondamentaliste»  et «obscurantiste» avec laquelle les talibans «répriment» le peuple afghan.

Une question irrésolue: le monde arabe

Après les attentats contre les Etats Unis, nous avons vu une intensification des attaques israéliennes dans les territoires palestiniens. Alors que le monde entier était "distrait" par les événements américains, les troupes israéliennes ont déclenché une offensive sanglante et destructrice contre les habitations et les sièges institutionnels palestiniens.

La technique, comme les autre fois, est toujours la même: utilisation d’avions ou de tanks pour détruire et tuer, bulldozers pour achever la destruction des maisons, nouvelles installations de colons. Ces attaques ont comme objectif de rendre la situation dans les territoires encore plus invivable, en les rendant encore plus dépendants (eau, nourriture, travail) des intérêts et du contrôle israélien.

La situation dans le Moyen Orient a revêtu, après les attentats, une importance encore plus vitale. Les Etats Unis ont déclaré la "guerre contre le terrorisme" avec laquelle ils veulent régler leurs comptes avec toutes les forces de la résistance arabe. Etats rebelles, organisations anti-impérialistes et peuples insoumis seront les prochains objectifs de cette guerre qui continuera pour des années, comme le disent les représentants-mêmes de la Maison Blanche. Un règlement de compte où l’impérialisme met en jeu la stabilité et la paix sociale pour les prochaines années.

C`est seulement pour cet intérêt momentané que Bush et Blair demandent de la "modération" dans la répression au boucher Sharon. Les intérêts impérialistes dans la région n’ont pas changé, et les fausses promesses de Bush et de Blair sont purement destinés à gagner du temps. La libération du peuple palestinien et du monde arabe n’aura pas lieu par de gentilles concessions accordées à des bourreaux impérialistes. Quiconque pense à cela, que ce soit Arafat ou un autre, ne rend pas service à la cause arabo-palestinienne. Seule une lutte anti-impérialiste qui implique les peuples d`une bonne partie des pays arabes, pourra donner aux Palestiniens et à tous les peuples du Moyen Orient la paix et la justice qu`il réclament depuis trop longtemps.

De la “liberté immuable” à la “rébellion immuable”

Les attentats du 11 septembre ont donné le prétexte à une guerre permanente, déjà projetée et préparée depuis longtemps, qui est maintenant dans sa phase opérationnelle. L'idéologie raciste, déjà instrument de la propagande de la réaction bourgeoise, est maintenant une arme contre l'unité de classe des travailleurs, pour en corrompre la conscience, pour vaincre la résistance des peuples contre la guerre et enrôler les prolétaires dans les campagnes chauvinistes pour l`isolement et la répression des mouvements anti-capitalistes et anti-impérialistes. Dans l`application de ces mesures, la droite néo-libérale et la gauche social-impérialiste européennes font la course pour être les plus fiables.

L’escalade de la violence provoquée par la campagne "liberté (impérialiste) immuable", a même posé le mouvement composite contre la globalisation, qui s`était fortement exprimé a Gênes, face à une bifurcation: faire mine de rien et avoir des illusions sur la possibilité de réforme "par le bas" des institutions impérialistes, ou bien se dresser ouvertement contre les logiques impérialistes de cette nouvelle guerre, contre l`OTAN et contre tous les instruments de la mort de l’Occident capitaliste, contre les sacrifices de guerre imposés aux prolétaires, contre le racisme anti-arabe nourris par les médias bourgeois, au côté des luttes de résistance des peuples contre les agressions impérialistes.

Mais, donc dans cette situation, quel est le rôle d`une coalition anti-impérialiste?

Cette coalition ne peut pas être seulement fondée sur l`opinion, mais elle doit se concrétiser comme mouvement contre la guerre et contre les instruments de l`impérialisme (contre l`OTAN, par exemple), en valorisant les différentes expériences et en les développant avec des plate-formes de lutte communes.

Nous croyons que notre lutte doit dénoncer cette tendance à la guerre qui n`est pas «accidentelle», mais qui est permanente et latente dans toutes les contradictions internationales. Comme réalités anti-impérialistes nous devons rendre visible tout cela en cherchant des instruments qui contribuent à la liaison stable et à la construction des positions anti-impérialistes dans les mouvements de masse. Ces positions aujourd`hui sont toujours plus explicites au niveau mondial, dans les luttes des peuples exploités comme dans les luttes anti-capitalistes de l’hémisphère Nord. A travers le développement d`un mouvement international contre la guerre et contre l`exploitation par la dictature des monopoles, la perspective de sa liaison au niveau planétaire pour le dépassement du capitalisme n’est aujourd`hui pas aussi utopique que c’était le cas il y a quelques années. Ce sera une tâche difficile, mais pas impossible, parce que comme disait le comandante Ernesto "Che" Guevara: "l`unique lutte perdue est la lutte qu`on abandonne".


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