15 janvier 2003
Le désaveu
Cest une gifle que les travailleurs dEDF-GDF ont infligée aux « partenaires sociaux » auteurs du projet de réforme des retraites. Lopération visait sous prétexte de toilettage à lever un obstacle à la privatisation. A lexception de FO les autres principaux dirigeants syndicaux sétaient imp(r)udemment alignés sur le projet concocté par François Roussely, le « patron » dEDF. Les travailleurs, cadres inclus, ont déjoué le piège de la prétendue modernité, qui nest que le cache-sexe de la collaboration de classe. A une consultation soi-disant technique, les travailleurs ont répondu par un vote politique qui désavoue le pouvoir aussi bien que les apôtres du consensus. Personne ne sy est trompé, les médias ont fait chorus de commentaires sur cette intrusion inouïe de la voix des travailleurs dans le concert des notables. Les retraites sont une grande affaire nationale et un choix de société. Ce nest pas un problème de proportions arithmétiques entre « actifs et passifs ». Il sagit de décider si les acquis de la croissance, du PIB (cest à dire la valeur ajoutée) seront répartis aussi en faveur des salariés. Or de 1962 à 2002, le PIB a pratiquement doublé. Qui en a bénéficié, nabandonnant que des miettes indécentes au salariat ? Les patrons et les actionnaires. Ils doivent, comme dit si justement le langage populaire, rendre gorge. Et il nest pas question, par surcroît, douvrir, comme prévu, le bercail du secteur public au loup du Capital. Cest une question de défense. nationale La manifestation intersyndicale du 1ier Février se place désormais clairement sous le drapeau de la lutte. Elle exprimera la double volonté politique de défendre les retraites et le service public qui sont des combats jumelés. Il serait naïf den confier aveuglément la seule direction à ceux qui ont courbé léchine. La parole est au monde du travail, à ceux qui sont debout. Quils la prennent, en masse, par leurs mots dordre et leurs banderoles. Les organisations syndicales et politiques nen doivent être, bon gré mal gré, que les instruments. Lémancipation des travailleurs sera luvre des travailleurs eux-mêmes.
Retraites : Le chantier de démolition s'accélère
Chirac, lors de ses vux la annoncé : le Parlement aura à se prononcer sur la modification du régime des retraites en juin. Peu lui importe le coup de semonce dEDF-GDF. Raffarin entend passer en force, et le rejet par 53,3% des salariés de cette entreprise publique de la réforme du financement des retraites ne serait quune péripétie. Pour lui, pas question de changer de cap. En effet la réforme complète de lassurance maladie, la destruction du système des retraites découle dun même plan, celui de lUnion européenne traduisant les directives du FMI. En ce qui concerne les retraites, rappelons que cest lors du sommet européen de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 que Jospin et Chirac ont pris les décisions suivantes : « Il convient de réduire les incitations individuelles à la retraite anticipée et la mise en place dans les entreprises de systèmes de préretraite, et dintensifier les efforts destinés à offrir aux travailleurs âgés davantage de possibilités de rester sur le marché du travail ( ). Il faudrait chercher dici 2010 à augmenter progressivement denviron cinq ans lâge moyen effectif auquel cesse dans lUnion européenne, lactivité professionnelle. »
Un faux prétexte
La raison invoqué est le déséquilibre des caisses de retraites dû à la la progression du nombre de retraités. Faux prétexte. Le conseil dorientation des retraites (COR) évalue entre 1,6% et 1,8% du produit intérieur brut le besoin de financement annuel qu'il faudra consentir, dans vingt ans, pour équilibrer le système de retraite. Or les faits montrent que, comme les sondages, ces projections sont souvent prises en défaut. Il faut savoir que 1,6 % du PIB représente à peu près 23 milliards deuros. A titre de comparaison le trou du Crédit lyonnais que les contribuables vont éponger est de 16,8 milliards deuros ! Par ailleurs pour que les salariés du privé reviennent tous à 37,5 annuités de cotisation, il en coûterait 4,5 milliards deuros, soit 0,3 % du PIB. Une goutte deau comparée au budget militaire qui se chiffre pour 2003 à 40 milliards deuros. Autre scandale celui des exonérations accordées au patronat. Celles-ci se montent pour 2001 à 18,2 milliards, plus que ce que le Conseil dorientation des retraites a chiffré comme besoin de financement pour 2020 !
Un salaire différé
Il faut rappeler que cet argent est celui des salariés. Cest par la conquête de la Sécurité sociale, avec le ministre communiste Ambroise Croizat, que les retraites par répartition ont été instaurées par les salariés. Ce que les patrons appellent les « charges sociales » ce sont les cotisations de la Sécurité sociale. Ce sont des salaires différés qui au lieu dêtre versés directement aux salariés alimentent la Sécurité sociale pour payer les retraites et garantir les soins pour les malades. Ceux qui racontent quil ny a pas dargent pour les retraites sont les mêmes qui puisent à pleines mains dans les caisses de la Sécurité sociale. Le travail de démolition va se poursuivre avec la mise en place des fonds de pension, appelés par euphémisme : épargne salariale. Une épargne salariale qui va vider un peu plus les caisses de la Sécurité sociale. Cette épargne a été rendue possible par la loi Fabius du 19 février 2001 qui instaure les plans « dépargne salariales volontaires (PESV) », exonérée de cotisations. Elle constitue un prélèvement sur les salaires dune durée de dix ans. Ainsi 10,6 milliards deuros ont été détournés en 2001 des caisses de la Sécurité sociale. Cest donc à un véritable pillage de largent des salariés auquel nous assistons. Commencé sous un gouvernement de la gauche plurielle ; il ne pouvait que saccélérer avec un gouvernement de droite.
La puce à l'oreille
Les accords signés par les syndicats réformistes en I993 et 1996 ont entraîné une chute de niveau des retraites de 30%. Avant ces dates les retraités percevaient 84% de leur dernier salaire net. En 2000, le taux sétablit entre 79 % et 56%, en 2020 entre 70% et 54%, en 2040 entre 68% et 47%. Les retraites des femmes sont actuellement inférieures de 42% à celles des hommes. ( quen disent les « chiennes de garde » ?). Il faut savoir que le coût des retraites représenterait de 2006 à 2040 environ 16 à 18% du PIB (valeur ajoutée) soit autant quentre1975 et 2000. Pas de quoi paniquer. Lâge moyen de départ à la retraite est de 57 ans âge fixé par statut dans le public, dépendant de larbitraire patronal dans le privé mais seuls 45% des hommes et 42% des femmes travaillent à la veille de la retraite, en outre 5,5 millions de personnes sont au chômage ou sous-employés. Doù un déficit lourd de cotisations.
Chirac et Raffarin ont décidé de passer en force pour réviser la constitution. Ce sont donc les parlementaires, qui vont la modifier pour quelle sinscrivent dans le cadre dune « Constitution européenne ». Il ny aura pas de référendum, les Français étant jugés trop ignares pour comprendre. Ainsi de larges pans de ce qui à présent relève de la loi commune à tous les citoyens, comme la laïcité institutionnelle de lécole et lEtat, les services publics,les hôpitaux,les transports, les logements etc. seront transférés à dautres échelons créant ainsi des disparités entre les citoyens. Il nest pas inutile de rappeler que lessentiel des dispositifs législatifs a été mis en place par la gauche plurielle, notamment à « titre expérimental » pour le dossier corse. Le projet ne se contente pas de transférer des compétences de lEtat aux communes, départements et régions, mais il organise, dans le cadre de lEurope de Maastricht, une véritable explosion des compétences, une dislocation des structures Etat-Nation à lintérieur desquelles la classe ouvrière avait conquis des droits garantis par les lois comme le code du travail, les conventions collectives et statuts nationaux. Cest tout cela que Chirac et Rafarin veulent liquider. Ce nest pas faire injure à quiconque que de dire que tout le vocabulaire de lEurope maastrichtienne, celui des lois Voynet-Chevénement, le projet Raffarin, peut être comparé sur de nombreux points avec la Charte du travail du 19 avril 1941 signée par Pétain. De Gaulle avait bien tenté de reprendre ce programme de régionalisation corporatiste dans le référendum de 1969. Mal lui en pris ! Puis vinrent les lois Deferre et Pasqua qui prévoient la mise en place dans les régions de conseils corporatistes regroupant élus, syndicats ouvriers et patronaux, associations et ONG. Lobjectif étant de faire prendre en charge par les travailleurs et leurs organisations la mise en uvre des décisions politiques et économiques prises contre eux. Déjà la Confédération Européenne des Syndicats sinscrit dans cette perspective, abandonnant ce qui a toujours fondé la base des organisations syndicales, à savoir la défense des intérêts distincts des salariés face aux gouvernements et au patronat. Ainsi tout un arsenal se met en place, depuis « les budgets participatifs », « lactionnariat ouvrier » , et la volonté dintégrer les syndicats dans les conseils dadministration, les conseils économiques.
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Note de do :
Le texte ci-dessus est constitué d'extraits du numéro de janvier (N°20) du journal combat
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