( 12 février 2000 )

                  Cher Nico,

          Tu ne joues pas aux cow-boys et aux indiens, mais as-tu remarqué que, bien souvent, quand les révolutionnaires d'aujourd'hui étaient gosses, ils refusaient systématiquement d' "être cow-boy", à ce jeux ? Et que dans le jeux du gendarme et du voleur, ils refusaient systématiquement d' "être gendarme" ? Tu ne joues pas aux cow-boys et aux indiens, tu es un révolutionnaire. D'accord, mais la lutte des classes n'est-elle pas aujourd'hui le seul jeux qui mérite d'être joué ? Et ne ressemble-t-elle pas à la lutte des indiens contre les cow-boys ? Je pense aussi que la révolution est quelque chose de tellement sérieux que les individus qui jouent son jeu n'ont pas le droit de se prendre trop au sérieux. Sinon, à mon avis, ils courent sérieusement le risque de se planter, de s'enfermer dans le rôle (au sens situ) de révolutionnaire, ou pour dire les choses selon le langage de la théorie du concept : le révolutionnaire qui se prend trop au sérieux n'est rien moins que prisonnier du concept qu'il a de lui-même : au lieu d'être révolutionnaire, il est prisonnier du concept de révolutionnaire, il s'identifie à ce concept et se prend pour lui.

           " Dénoncer inlassablement le caractère illusoire de l'étatisme et du nationalisme. " Je suis bien d'accord : c'est une nécessité. J'irais même jusqu'à dire que le mot " illusoire " est peut-être insuffisant, à la place j'aurais carrément dit " très dangereux ", et, pour justifier cela, j'aurais rappelé que pendant ce qu'il est coutume d'appeler la " deuxième guerre mondiale ", les nationnalistes Basques ont failli s'allier au camp Franco-Hitler dans le seul but d'obtenir leur indépendance. Si cela ne s'est pas fait, c'est parce que Franco et Hitler ont refusé de leur promettre l'indépendance en cas de victoire. Je n'ai malheureusement pas plus de détails sur cette histoire. Peut-être en sais-tu plus que moi sur ce sujet ? Sache en tout cas que c'est le seul argument que j'ai réussi à trouver pour déstabiliser quelque peu les "révolutionnaires nationnalistes", et ceux qui leur accordent un soutien non critique, avec qui j'ai eu l'occasion de discuter. Ces gens sont des camarades qui se trompent. C'est comme les récents FTP de Marseille, certes, ils se trompent, mais avant tout, ce sont des camarades. Quand on estime avoir en face de soi des camarades qui se trompent, il faut non pas les rejeter, mais discuter avec eux, et donc accepter le risque d'avoir à prendre conscience que c'est peut-être nous-même qui nous trompons...
          Et puis, pour le dire à la Jaime Semprun, les révolutionnaires devraient partir du principe que ceux qui ne sont pas contre eux sont avec eux. Car sinon, avec qui on la fera, cette révolution ? Un tel principe dans la tolérance n'empêche en rien, c'est peut-être même le contraire, d'être extrèmement pointu sur la théorie.

           Il existe une grande mythologie sur le Che. Savais-tu que dans le village de Bolivie où il fut assassiné, et dans bien d'autres régions d'Amérique latine, il y a plein de gens qui lui font des prières, et qu'à les entendre, " il les exauce " ? Savais-tu que peu après sa mort, sa première femme écrivit un livre pour dire que che guevara n'était pas un Dieu, ni le Fils d'un Dieu ou un ange descendu sur terre, que c'était seulement un homme qui avait pu accomplir tous ces exploits, et que, par conséquent, d'autres hommes ou femmes pouvaient en faire autant, que le fait de déifier le Che rendait ses exploits inaccessibles à d'autres personnes... N'empêche, Si cette personne est tant aimée en Afrique Noire et en Amérique latine, c'est peut-être bien que malgré ses défauts, elle n'est pas si détestable que ça. Et puis, des défauts... Si le parfait existait, alors Dieu existerait peut-être. Oui, j'aime le che. Peut-être devrais-tu lire le bouquin de jean Cormier sur che guevara. Pas celui de Kalfon qui est un agent de l'état. Tu peux lire aussi, aux éditions du Rocher, "Les survivants du che", de Dariel Alarcón Ramirez dit "Benigno" et qui a fait la guérilla avec le che en Bolivie... Peut-être alors comprendrais-tu qu'il y ait des gens sur terre qui aiment le che. Même sans le mythifier.

           Le che adulé par une partie de l'extrème droite ? C'est bien la première fois que j'entends parler de ça. T'es sûr que t'as pas écrit une bêtise ?
           Le che nationaliste ? Il est né en Argentine, il a participé à la révolurion Cubaine, puis à diverses révolutions en Afrique, et à fini par mourir en tentant la révolution en Bolivie. Alors dis-moi, le che, il était nationaliste Argentin, nationaliste Cubain, nationaliste Congolais, nationaliste bolivien? Explique moi tout, car j'avoue que c'est trop compliqué pour moi et que je m'y perd un peu. Si tu lisais sur mon site la lettre de Ben Bella sur le che, tu verrais que pour guevara, l'internationalisme n'était pas seulement une théorie, mais une pratique indispensable :

http://www.cs3i.fr/abonnes/do/textes/lecheparbenbella/benbella.htm

          A propos de ta lettre ouverte aux camarades du parti communiste des ouvriers de fRANCE (petit "f" et grand "RANCE", à propos d'antinationnalisme, comme dirait le dessinateur Siné), j'ai l'impression que les " principes " essentiels qui soustendent la première partie de ton analyse (jusqu'au titre sur la décentralisation) sont bons et peut-être excellents. Même si tu sembles manquer de certaines connaissances historiques. Euh c'est pas un reproche. Par exemple, moi, je ne sais presque rien de ce qui ce passe en ce moment en Equateur. Excuse mon ignorance. Et il est déjà 4H43 du matin, ça fait déjà 3h½ que je t'écris, j'ai la flemme d'aller chercher les renseignements sur internet. Je lirais la fin de ton texte demain

          Au fait, à propos d'écriture qui prend du temps. Je suppose que tu ne verras pas d'inconvénients à ce que je mette notre échange de courrier électronique sur mon site. Il va de soi que tu peux dors et déjà en faire autant sur le tien. j'attends cependant ton accord pour le faire moi-même.

          Lors de mon prochain courrier, je t'envoies un commentaire plus détaillé sur ta lettre aux camarades ... de fRANCE.

                 Salutations révolutionnaires

                            do

P.S.) Prolétaires de tous les pays, unissez-vous.