26 juillet 2003
AUROVILLE
Cher do,
Je suis maintenant à Pondichery, dans le sud de l'Inde, un ancien comptoir francais. Je séjourne actuellement dans un ashram à 50 roupies la nuit. Pour 1 dollar par jour, tu peux vivre ici.
Les trois-quart de la vieille ville francaise de Pondichery appartiennent à la secte Aurobindo et au fantome de la "Mère" ; une toquée française, fana d'occultisme, née au Maroc, de père musulman et de mère juive, à la fin du 19eme siecle ; son vrai nom est, je crois, Mirza Alfissa...
Dans les années 30, elle est venue s'installer ici et a rencontré le yogi de sa vie, Shri Aurobindo, son amant "mystique", qui après avoir goûté aux prisons anglaises (il avait été impliqué dans un attentat nationnaliste), créa une école de yoga.
La secte s'est épanouie depuis et a créé Auroville au début des années 70, dans le bush indien, à quelques kilomètres de Pondichery. En fait, la ville "sans racine" n'a pas prise, elle est tout juste esquissée. Ça voulait être une ville utopique et, aujourd'hui, ça ressemble tout juste à un minable parc forestier avec ici et là des maisons écolos, européennes, cernées de pistes de poussière rouge...
Le vrai centre d'activité de la secte se trouve dans la vieille ville "blanche" de Pondichéry, au bord de mer, dont l'Ashram Trust a racheté presque toutes les maisons, excepté le consulat et l'Alliance francaise...
La secte possède banque, police, usines, manufactures, hopitaux et maisons de retraite ; elle emploie pour des salaires de misére des milliers d'Indiens ; certains sont en procès avec la secte après avoir été salement licenciés. La méthode "autoritaire" de la secte n'a rien d'extraordinaire dans la region : le gouvernement du Tamil Nadu vient de virer 170 000 fonctionnaires après une grève "illicite" !
Aurobindo est une secte végétarienne, puritaine et fasciste. Il suffit de séjourner quelques jours dans leur ashram bon marché et manger "silencieusement" à leur cantine, à l'ombre des portraits géants de la Mère et d'Aurobindo, pour s'en rendre compte.
Les hommes et les femmes qui travaillent dans leurs hospices sont habillés d'un short bleu, vert ou rouge, et d'une chemise blanche immaculée. Les cheveux des femmes sont couverts d'un turban blanc, genre année 30. Ce sont des maniaques de la propreté, et ils respectent une discipline genre Baden-Powel... Ici on baigne dans un mysticisme surrané, abruti par le soleil et surveillé par de dévots bureaucrates...
Bien
à toi.
Himalove
PS) Je te recommande quelques livres que j'ai lus récemment : « Parias » de Pascal Bruckner, « L'Inde brisée » de V.S. Naipaul, « Dans la peau d'un Intouchable » de Marc Boulet et le livre de Guy Deleury « Inde, continent rebelle ». À travers les yeux de ces auteurs et leur sensibilité, tu peux commencer a imaginer l'Inde.
____________________________
¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯
COURRIER d'Himalove daté du 7 aout 2003 :
Cher do,
L'État de Jammu-et-Cachemire s'écrit, en anglais, Jammu and Kashmir ; sa capitale d'été est Srinagar, celle d`hivers, Jammu... J'ai lu récemment un très beau texte sur le Cachemire, écrit en 1955, par la philosophe francaise et résistante Louise Weisse.
Pour l'heure, je reste à Pondichéry, au bord de la mer.
Le nom de la Mère est Blanche, Mira, Alfassa.
On m'a viré de l'ashram parce que j'avais des rapports sexuels "bruyants" avec une Indienne, et que je n'étais pas spécialement dévot.
L'Ashram Trust s'est spécialisé dans l'accueil des riches européens du troisième âge ; des mauvaises langues murmurent qu'ils se sont enrichis en captant certaines fortunes. Pour ne pas les noircir complètement, il faut avouer que l'Ashram Trust qui a racheté toute la vieille ville de Pondichery, a su préserver le charme propret de la colonisation francaise ; les maisons sont blanches, les cathédrales (notre-Dame-des-Anges, etc.) pimpantes ; les rues, larges et balayées ; pratiquement aucune boutique, ni enseigne lumineuse ne défigure le front de mer.
Les styles architecturaux francais des XVIIe (Empire) XVIIe (baroque), XIXe, debut XXe (Modern styl) se marient avec élégance avec le style créole colonial de petites maisons à colonnade en bois de teck. La ville est riche, animée, vivante, excepté entre 12 et 15 heures pour la sieste ; tous les pauvres du Tamil Nadu se sont donnés rendez-vous ici : tu les vois couchés à même le trottoir avec bébés et vieillards. La police a interdit la mendicité pour, je cite, "ne pas déranger les touristes", mais sans grand succès...
Les flics indiens, en tenue blanche, sont coiffés d'un képi rouge "à la francaise" et manient parfaitement le lathi, stick de bambou, dont les pauvres connaissent bien la douceur...
Privilégié,
je passe mon temps à la bibliothèque de l'Alliance francaise ;
je dévore tout ce qui concerne Pondichery... J`ai decouvert que le journaliste
Thierry Ardisson avait écrit, en 1992, un roman intitulé
"Pondichery", publié par Albin-Michel ; le journaliste
a presque plagié "mot pour mot", un roman écrit dans
les années 30 par un autre journaliste, intitulé "Désordre
à Pondichery" ; ce roman a été ré-édité
aux éditions Kailash... Dans mon prochain e-mail, je donnerai le nom
de cet auteur...
Bien
à toi.
Himalove
Vive la révolution : http://www.mai68.org
ou :
http://www.cs3i.fr/abonnes/do
ou :
http://vlr.da.ru
ou :
http://hlv.cjb.net