( 15 février 2000 )
Effectivement, comme tout bon petit révolutionnaire, je préférais les indiens aux cow-boys. Et j'ai été, quand j'étais étudiant, un bon petit guevariste. J'essaie aujourd'hui de réfléchir de manière plus critique, plus globale sur la situation, d'amener des propositions nouvelles. A ta manière, tu fais la même chose, mais nous n'arrivons pas encore aux mêmes conclusions.
Tu parles de manque de connaissances historiques, mais je ne vois pas à quoi ça fait référence. Sur l'équateur, c'est certain, je le dis d'ailleurs dans le texte, je n'en connais que ce que j'ai pu voir sur le net récemment, et le dossier du PCOF. Au fait, veux-tu que je te l'envoie ?
Sur
le régionalisme Les exemples de passage à droite de courants régionalistes sont
nombreux. A l'heure actuelle, il est difficile de qualifier comme de gauche
les nationalistes corses qui font des attentats racistes contre les " colons
". Tu cites l'exemple des basques durant la seconde guerre mondiale. C'est arrivé
également en Bretagne, où certains régionalistes ont négocié avec le Reich la
création d'un état indépendant, qui a failli aboutir. Les flamands ont fait
de même. L'idéologie de l'Europe des régions s'est largement constituée au sein
de la waffen SS, au fur et à mesure que celle ci s'est enrichie de bataillons
issus des pays conquis par le Reich (dont le LVF). Leur objectif était de liquider
le parti nazi, d'en finir avec le pangermanisme et de créer une nouvelle Europe
fondée sur le respect des nationalités. C'était la conséquence logique du nationalisme,
l'application stricte du " droit des peuples à disposer d'eux même " qui avait
porté les révolutions " romantiques " du XIXe siècle et abouti aux accords de
paix Ca ne signifie pas que tout les régionalistes soient des nazis en puissance,
bien sûr. Mais l'extrême-droite est extrêmement à l'aise dans le régionalisme,
qui repose sur les même bases que le nationalisme en changeant d'échelle. En
outre, du point de vue révolutionnaire, c'est une impasse majeure. Quelques
soient les revendications portées par les mouvements nationalistes " de gauche
", ils aboutissent au même résultats : sitôt l'indépendance acquise, ils se
comportent en bons gestionnaires du nouvel état, dont ils forment la classe
dirigeant (c'est à dire, je maintiens, une bourgeoisie d'état). On peut en citer
de nombreux exemples, dont l'OLP en Palestine. C'est ce qui me fait dire que
la révolution ne peut être que mondiale, et non une accumulation de révoltes
locales.
Si j'ai écrit au
PCOF, qui m'avait envoyé un document sur l'équateur, c'est précisément pour
dire cela. Je connais très mal cette organisation, mais j'ai lu leur presse
récemment, et j'ai été surpris de voir que, pour des " marxistes-léninistes
", ils avaient des positions plutôt moins nationalistes sur le pays basque que
la majeure partie des trotskistes, par exemple. A vrai, dire le texte a glissé
sous mon clavier, c'est à la limite de la sciptomanie...
Sur
le Che et l'extrême-droite
Je t'envoies si
joint une page sur le Che, récupérée sur le site d'Unité
Radicale (fusion du GUD et de Nouvelle Résistance), une organisation qui apporte
son soutien critique à Bruno Mégret. Cela dit, je vais essayer d'en lire plus
sur le Che, au moins pour savoir pourquoi les fachos tiennent tant à la récupérer.
C'est ce que j'ai commencé à faire pour Gramsci, et je comprends mieux maintenant
les raisons de leur fascination. D'ailleurs, Togliatti, l'ami stalinien de Gramsci
et le secrétaire général du PC italien, a tenté un " appel aux fascistes " ,
sans grand succès.
A propos de staliniens,
j'ai remarqué que parmi les liens de ton site, il y a le CEPS, qui publie des
textes de Staline et de Enver Hoxha, ces grands démocrates internationalistes
! J'espère seulement que c'est une facétie de ta part... Je craint qu'on puisse
effectivement être nationaliste de plusieurs pays en même temps. C'est pour
cela que les fachos français vont se battre aux cotés des serbes, des croates,
des karens, etc. Cela ne veut pas dire que c'était nécessairement le cas pour
le Che, évidemment. Mais je me méfierais par exemple du témoignage de Ben Bella.
Si tu as le temps, lit le bouquin de Pierre Péan sur François Genoud, le banquier
du FLN. Ce brave citoyen suisse, possesseur des droits éditoriaux de la majorité
des anciens dirigeants nazis, ami proche de Léon Degrelle (le leader incontesté
des nazis européens jusqu'à sa mort récente), alimentait Ben Bella en gardes
du corps recrutés dans les milieux néonazis français. Autrement dit, le nationalisme
révolutionnaire ne date pas d'hier...
Je crois surtout que nous avons réellement changé de période. Si le nationalisme a pu ( ? ? ?) incarner d'une certaine manière l'anticapitalisme populaire dans les pays du tiers-monde, il est aujourd'hui plus que jamais une doctrine réactionnaire. Sur ce point, je suis particulièrement intransigeant.
Sur la théorie du concept
Mon
imprimante donne des signes d'amélioration. Je vais donc pouvoir imprimer le
texte et le lire autrement que sur écran, ce qui ne sera pas de trop. J'avoue
que le c et les C et les k, ça me donne un peu le tournis, mais je crois que
je ne suis pas le premier à te le dire. C'est un effet majeur de ce que tu décrit
: il manque de concepts pour définir le concept ! J'ai quand même, à première
lecture, l'impression de voir des choses anciennes. La question sur la non-identité
des mots et des choses a fait l'objet de beaux débats du côté du XIIIe siècle,
et celle de la non-identité des perceptions et des choses, a constitué la base
du sensualisme au XVIIIe s. Dans tous les cas, elles ont servis de support à
des critiques sociales, ce qui est plutôt encourageant pour toi. Quand au problème
de traduction des concepts, c'est également un grand classique de la linguistique.
En bon matérialiste
de base, j'ai eu la vague sensation que c'était très métaphysique, dans la mesure
où il s'agissait effectivement d'un discours sur le physique, mais que c'était
très peu nourri d'exemples, ou que ceux ci tombaient un peu à plat. Mais je
préfère lire une seconde fois, parce que je ne suis vraiment pas sûr d'avoir
tout saisi, ce serait idiot de critiquer à côté de la plaque.
Deux choses cependant, il m'a semblé que tu manquais d'éléments sur la " pensée conceptuelle " chez les animaux, c'est à dire leur capacité à généraliser pour créer des catégories (arbre au lieu de chaque arbre), ou encore leur pense " politique ". Là dessus, j'ai quelques références à te donner si ça t'intéresses, même si je ne suis pas spécialiste de la question.
D'autre
part, sur la préhistoire (et là, par contre, je suis dans mon domaine), je crois
qu'il vaudrais mieux étudier les choses de plus près.
Le passage du "
paléolithique " au " néolithique " sont des choses complexes, qu'on peut difficilement
résumer à la sédentarisation. D'ailleurs, l'homme contemporain n'est pas nécessairement
sédentaire. Il existe de nombreux peuples nomades, qui ne " conceptualisent
" pas moins que nous.
On considère actuellement
qu'au proche orient, la sédentarisation précède de plusieurs millénaires l'économie
" néolithique " (élevage puis agriculture). Certains chercheurs comme J. Cauvin
parlent effectivement d'une " révolution idéologique " précédent le néolithique,
mais leur argumentation (en partie influencée par des auteurs d'extrêmement
comme Mircea Eliade...)me laisse rêveur. D'autre part, ce que l'on sait des
populations paléolithiques indique nettement des capacités " conceptuelles "
très élevées. On peut discuter sur ce point, si ça t'intéresse.
Voilà pour ce mail un peu long,
À bientôt
Nico
Pour jeter un coup d'oeil à la page dont parle Nico, Allez sur ce site fasho, et, dans le moteur de recherche, écrivez guevara, puis cliquez sur le premier lien en haut des résultats : http://members.xoom.com/NRresistance/index.htm ( attention, éloignez vous de votre ordinateur pour pas dégueuler dessus en voyant ce site )
Vive la révolution : http://www.mai68.org
ou :
http://www.cs3i.fr/abonnes/do
ou :
http://vlr.da.ru
ou :
http://hlv.cjb.net