28 septembre 2005

OGM - LE PROCÈS DE CLERMONT-FERRAND

http://mai68.org/ag/866.htm
http://kalachnikov.org/ag/866.htm
http://www.chez.com/vlr/ag/866.htm

     Quinze faucheurs comparaissaient le 16 septembre pour destruction de maïs appartenant à Meristem Therapeutics au tribunal de Clermont-Ferrand. Vu la qualité du débat, on aurait souhaité la retransmission dans la salle télé d’un Ferry Boat ! Quant la désobéissance civile grandit…! Récit.

Habiter Ses Paroles.

     C’est le pari réussi des Faucheurs de Nonnette face au seul message du procureur : « Il faut vous arrêter ! » Comme s’ils représentaient un péril imminent en agissant par la désobéissance civile, comme si un risque de soulèvement généralisé pouvait casser les digues étroites des lois Perben. Comme si les camarades de classe d’un jeune Camerounais pouvaient tenter de réduire en miettes la flotte aérienne d’une des premières puissances du monde, comme si tous les paysans pouvaient refuser d’acheter leurs graines chez "Mosatan" ou Limagrain, comme si l’on pouvait ne pas abdiquer devant le brevetage du Vivant, imposé par des Morts. Comme si Habiter Ses Paroles pouvait fendiller les murs des prisons, et retourner l’avis d’un juge ! Comme si on relaxait Alfred Dreyfus, Alan Parsons, August Spies, Adolph Fischer et George Engel, comme si les Rosenberg revenaient hanter les nuits de leurs juges.

     Je vous donne la fin et donc le meilleur tout de suite car je gage de votre appétit insatiable pour la liberté.

     "Trente huit ans a fait ma sœur Marie Durand…" a clamé avec foi Maître Roux en évoquant, ému, le souvenir de celle qui, refusant d’abdiquer sa foi protestante a récolté ses années d’enfermement. Cela pour le début d’une plaidoirie sur la désobéissance civile, où il rappela qu’il était interdit de faire connaître la loi sur l’objection de conscience en 1976 !

     Le coude soutenu par sa main gauche, la voix détachée et haute, François Roux expliqua avec détermination "qu‘il est plus important d’agir que de ne rien faire !" , qu’il faut se mettre en marche ! Poursuivant sa plaidoirie il questionna : « Comment le droit a-t-il changé ? » appelant symboliquement à la barre Gisèle Halimi qui appelait durant la guerre d’Algérie à l’insurrection… des consciences. Rattachant l’ici et l’ailleurs, l’avocat arma ses mots d’un appel aux résistants israéliens et palestiniens, ensemble, contre le mur en Israël ! Il conclut mi-humoristique, mi-sérieux en interpellant les juges sur leur rôle historique à propos des OGM : « Ah c’est toi qui as jugé à Clermont-Ferrand ! »

     Avant lui Fatima Kadam, qui apparut tel un ange de douceur, frappa de ses ailes les convictions de la Justice. Telle une apparition, elle fut ce baume qui caresse et qui lance des accusations contre l’ordre établi, contre les convictions certaines, contre le conformisme des habitudes : « Qui le premier est rentré dans l’espace vital de l’autre ? Pas eux ! C’est cette culture en plein champ ! » Retournement pas seulement sémantique mais profondément juste qu’elle évoqua en insistant sur l’état de nécessité, cette obligation morale à laquelle répondent les citoyens face à un péril imminent, cet état qui a obligé deux tribunaux anglais à libérer leurs prévenus dans des fauchages OGM !

     Maître Guillaneuf donna le coup de bâton sur les coopérateurs de Limagrain qui ne décident plus de rien, interpella le procureur pour lui signifier qu’il était un adversaire, pas un ennemi ! Surtout, il insista ironiquement sur les moyens démesurés employés contre les Faucheurs : hélico, gardes mobiles, détention etc.…

     Nadjiba Habiles, notre destrier qui avait forcé les portes de la caserne, non sans mal et sans la bienveillance de la Justice, fit un portrait succinct de nos personnalités et de nos motivations. Habiles, en latin c’est habile, non ? Et il fallait l’être pour passer un escadron de gendarmerie à mains nues ! Dans un couloir ! (Un des meilleurs temps au slalom géant.)

     Mais avant tout cela, 15 Faucheurs représentant la société civile dans ce qu’elle désobéit quand les lois sont injustes (Le sont-elles jamais ?) engagèrent un combat de parole aux accents de vérité. Chacun d’eux, comme il put, avec ses mots, raconta, ses origines et les lois intérieures qui régissaient sa vie et son engagement.

     Leurs aveux étaient vérité, leur combat, puissance ! Puissance et non pouvoir, pris dans la vie, dans le peuple, dans les racines, dans la transmission.

     L’histoire, convoquée parfois, fournissait trop d’exemples. Un seul pour l'édification aurait pu couronner les autres : A Spokane (E.U) en 1909, un arrêté fut voté qui interdisait les rassemblements sur la voie publique. Des milliers de Wooblies (membres de L’IWW) prirent tous les risques pour venir se faire arrêter et convergèrent vers le centre-ville. Ils y furent arrêtés. Six cent furent placés en détention. Au bout du compte des milliers d’autres prévoyèrent de s’y rendre ! Les autorités levèrent l’interdiction et libérèrent les prisonniers.

     Un premier témoin comparut, un capitaine de gendarmerie qui rappela les faits. Il confirma que dans notre pays les renseignements ne sont pas un service défectueux puisque la police savait que la parcelle du Broc était visée. Nonnette n’était qu’un amuse-gueule. Tout bien ! L’histoire policière, c’est aussi simple que ça. Du Fouché tout craché ! Sans révolution néanmoins. Pourtant, un moment gênant survint pour clore cet exercice militaire quand M. Roux questionna habilement : « Vous étiez à Saint-Afrique lors de l’affaire du Mac Donald de Millau ?

     — Oui ! fut tout simplement sa réponse.

     Est-il utile de parler de Daniel Burtin, directeur scientifique chez Meristem qui s’emmêla les pinceaux quant aux estimations du coût de fabrication de la Lipase en milieu confiné. Ce ne sont pas seulement les diplômes, on l’a vu, qui donnent une légitimité à un chercheur. Quand viendront G.E Seralini et M. Vélot, on n’aura plus aucun doute sur cette question. Ces deux chercheurs, l’un s’attardant sur la traçabilité impossible des OGM et l’autre sur les pollutions horizontales du sol, pourfendront avec brio et panache les faibles arguments du camp adverse.

     (Des micro-organismes et des champignons chevauchés par une cavalerie d’OGM passaient alors dans la salle d’audience)

     On rappela que la stérilité du maïs n’est pas garantie et que peu de publications s’intéressaient au sujet des transmissions par le sol. Les OGM en plein champ, c’est ouvrir la pharmacie sur la Nature ! jeta Marc Vélot pour conclure son tour.

     Pour enfoncer le clou de girofle pas encore modifié, le conseil régional apporta sa contribution. Il refusait désormais de mettre un sou dans la recherche OGM prolongeant ainsi son vœu d’une région tournée vers l’agriculture biologique. Max  Thomas, maire de Nonnette mis en avance le déni qui lui fut fait quant à son pouvoir communal et qui souhaitait que tout finisse vite : « Qu’on fauche tout… ou qu’on récolte tout ! a-t-il clamé excédé comme ses habitants par les manœuvres policières incessantes.

     Vint le tour de L. Reversa, paysan de l’Aveyron qui insista sur l’impossibilité de la double filière, OGM ou NON-OGM. Les industriels, même eux, ne veulent pas d’OGM, que diable ! Et il nous appris que RAGT travaillait sur un trans-gène de Fétuque ! Ça c’est le pompon !

     Vercingétorix avec sa pipe s’appuya alors à la barre et retraça ce qui fut le combat anti-ogm dans notre pays, les débuts à Nérac avec le mélange des semences, les débats contradictoires à la Confédération paysanne, la tentative de Novartis d’implanter 35  000 hectares. Bové donc, rappela que 3000 maires, 17 régions sur 22 et combien de régions européennes, le président du Conseil Régional du Gers, s’opposaient aux OGM. Il aurait pu ajouter l’huissier de justice, des dizaines de gendarmes contaminés (à force), quelques juges et peut-être même, en son fort intérieur un procureur de la République ? Il s’éleva contre les menaces de brevetage du Vivant que faisaient peser les semenciers sur les agriculteurs du monde entier. Ainsi en Inde, des trusts et des holdings tentent de privatiser des plantes ancestrales, le Curcuma deviendrait une espèce privée ?

     Et pourquoi pas les roses ? Si c’est comme ça, on comprend pourquoi le Petit Prince n’est jamais revenu !

     Dominique Ponce a donné la vie à un fils atteint de Mucoviscidose, de forme digestive. Elle refuse la culture des OGM en plein champ. Elle demande au tribunal de ne pas criminaliser les faucheurs parce que la fabrication d’un médicament ne doit pas mettre en danger les populations. À ce moment là, on s’est vraiment demandé pourquoi on était accusé !

     Déjà qu’on avait des doutes !

     Ce que dirent les avocats de la Partie civile ne fut pas d’un grand intérêt, j’en suis désolé. Et quand ce ne fut pas les bâillements que nous réprimions devant des arguments aussi alambiqués, nous hésitions, devant notre colère, lorsqu’ils osèrent déclarer que leur recherche sur des médicaments orphelins était dépourvue d’intérêts financiers. Je rappelle à toute fin utile que sur le site de Meristem, il est écrit en toutes lettres combien de millions doivent rapporter la recherche OGM sur la Mucoviscidose et les pancréatites ! M. Baumman tenta de nous faire avaler, sans conviction, que Meristem était une petite P.M.E sans gros moyens. Nous manquâmes de nous étouffer. Et Limagrain c’est de la Roupie de Sansonnet ?

     Les plaignants réclamèrent quelques millions d’euros pour moins d’un hectare fauché. On peut se demander s’ils n’essaient pas de se renflouer vu que Meristem n’a plus que 7 millions sur les 45 levés auprès des banques. Et de se renflouer avec nous, con de Manon ! Rappelons que Meristem n’a aucun produit sur le marché, c’est une tarte–up !

     Merci à ceux qui sont venus saisir les barreaux du palais de Justice, merci à ceux qui ont pensé à nous, merci à ceux qui ont écrit, faxé, mailé, merci à ceux qui luttent tous les jours, merci à ceux qui ont bu de la bière des faucheurs plus que de raison, merci à nos enfants chez qui nous avons puisé la force d’être contre la loi, merci à nos avocats de veiller si tard, merci aux 4999 "meneurs" de cette opération, merci à ceux qui voyagent de procès en procès, merci à Marc Vélot, à Lilian Cebellos, à G.E. Séralini, à Dominique Ponce, à Bernard Juban, à Laurent reversa, à José B. Merci aux oubliés…

     Et vous savez quoi ?… ON VA GAGNER !

     C.G. l’un des quinze. Affilié à S.U.D. Fauchage.

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À LIRE AUSSI :

          * 7 septembre 2005 : OGM : APPEL À LA MOBILISATION PROCÈS DES FAUCHEURS VOLONTAIRES ! (lien cliquable) : Procès des 6 de Marsat à Riom ET des 15 de Nonette à Clermont-Fd : Voici le programme de résistance du 14 au 17 sept 2005.

          * 3 septembre 2005 : OGM : APPEL À LA MOBILISATION PROCÈS DE 15 FAUCHEURS VOLONTAIRES ! (lien cliquable) : Rendez-vous VENDREDI 16 Septembre 2005 à 8h30 Heures au Tribunal de Clermont-Ferrand (cité judiciaire)


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