CITÉS-SAMBA

Regard sur l'aspect JEU des récentes émeutes

http://mai68.org/ag/885.htm
http://kalachnikov.org/ag/885.htm
http://www.chez.com/vlr/ag/885.htm

Le chômage
la polygamie
la discrimination
la misère
l'urbanisation
l'islamisme
la défaillance parentale
la faillite du système scolaire
la défaillance du système judiciaire, social, etc, etc

........

     Que le lecteur veuille bien m'excuser si j'en oublie. Le ponpon revient sans doute à une grande presse internationale (anglo-saxonne notamment) qui voit les dangers de l'islam partout. On aura compris la nécessité politique de ce mensonge ainsi que sa possible crédibilité, à l'abris de la distance et des barrières nationales.

     On aura noté aussi le crétinisme électoraliste flagrant qui fait allusion à la polygamie. Mais que voulez-vous ! Lorsqu'on veut être élu par les cons, il faut bien dire des conneries !...

     Quoiqu'il en soit des stupidités, la règle est bien de se précipiter chacun sur son prêt-à-porter.

     Selon son parti, il s'agit immédiatement d'instrumentaliser de faire coller l'événement avec "sa" raison. Il faut évidemment agir vite de façon à donner au lecteur une explication qu'il fasse sienne. Car ce lecteur a besoin de certitudes. C'est d'ailleurs pour cela que chaque matin, il achète Libé ou le Monde. "La lecture des gazettes, la prière du matin de l'homme moderne" disait déjà notre mécréant de Hegel en 1807...

     Pourtant, comme l'a bien dit Villepin à CNN, ce mouvement est très particulier. Il a sa "spécificité".

     Mais quelle spécificité ? et surtout, "spécificité" par rapport à quoi ? Poser la question de cette manière, c'est déjà y répondre. C'est dire que les éléments analytiques proposés habituellement (voir plus haut) ne suffisent pas.

     Observons. On peut se rendre compte :

     1) de l'âge des acteurs (préado et ado)
     2) de l'absence totale d'organismes jouant le rôle de guide.
     3) pas de revendications précises de types sociales, religieuses, urbanistiques, scolaires, etc
     4) pas de coordination dans l'action
     5) des périmètres d'action restreints cantonnés autour de l'habitat
     6) le non-emploi d'armes meurtrières qui pourtant existent dans les cités. On s'est contenté de brûler des voitures, des poubelles, de lancer des cocktails Molotov et des pierres. Activités déjà connues et régulières les soirs de nouvel-an (entre autre). Le nombre de bâtiments incendiés reste relativement restreint au regard du nombre des "émeutiers"*.

     On a pu aussi remarquer que l'absentéisme scolaire n'a pas été durant cette période significativement plus élevé. Le jour au collège, la nuit, aux feux !

     Du côté des parents, perplexité voire consternation.

     Il me semble que les ingrédients essentiels sont réunis pour désigner le phénomène par un mot passablement oublié "le jeu".

     C'est une activité essentielle de jeunes.

     En général, le jeu ne regarde pas les adultes. On ne va pas chercher un adulte pour jouer. Ceux-ci sont d'ailleurs souvent décontenancés par le jeu.

     Le jeu se fixe un objectif immédiat, pratique : mettre un but, faire partir les flics, faire partir Sarkosy...

     Le jeu se déroule dans un périmètre déterminé, là où on est bien de préférence. Les Champs-Elysés ne conviennent pas. C'est peut-être un bon lieu pour des événements révolutionnaires mais ils ne sont pas un bon terrain de jeu pour nous.

     Le jeu est limité dans le temps. Rien ne nous empêche de faire la bagarre à une heure du matin et suivre à 9h notre cours de français avec l'intérêt ou le manque d'intérêt habituel.

     Il ne s'agit pas de zigouiller du flic. Ils faut les faire reculer ou bien, mieux encore, peut-être faire qu'ils nous prennent au sérieux et reviennent plus en force.

     D'ailleurs, on sait qu'on risque presque rien (on a tord !). Par une nuit noire, tout près de nos couloirs et de nos caves, on peut se replier facile. Les flics non plus ne tirent pas à balles réelles. Faut pas se faire choper, c'est tout. C'est pas Bagdad.

     Un jeu commence toujours par un défi. Une présence policière inhabituelle constitue une provocation. Normalement, on ne voit jamais de flics. On a même supprimé la police de proximité et, tout à coup, tout le monde sur le pont ! Pas mieux comme défi. Et comme tout le monde voit ça à la télé, pas besoin de téléphoner au Mirail à Toulouse, ou au Havre, ou à Strasbourg (d'ailleurs ils ne se connaissent pas). Le grand jeu bien connu du gendarme et du voleur a commencé dans toutes les cités. Le chat et la souris, le fort contre le faible, Thyl l'espiègle....

     Comme c'est un jeu, vu la répression, au bout de quelque temps, ils en ont marre. Ils s'arrêtent mais ils ont bien rigolé !

     Ils avaient raison de bien rigoler. Qu'y a t'il de plus rigolo que de voir des flics s'exciter ? de les voir rêver de faire la peau ? Et en plus, on rajoute des flics, des caméras, etc. Plus de flics que d'émeutiers (de 14 à 18 ans pour la plupart, il faut rappeler !).

     Les petits cadres obéissant de Libé ou du Monde, peuvent-ils saisir que, pour quelques soirs, le pouvoir leur a livré ce qu'ils cherchent chaque jour dans leur solitude et qui n'est ni l'espoir ni la réussite mais qui s'appelle simplement le plaisir.

          Colette

* Le fait que les jeunes aient détruit parfois "leur" école, "leur" gymnase a généré chez les gloseurs patentés de droite et de gauche (de l'UMP à la fondation Copernic) des mots comme "autodestruction". Plaisante stupidité qui révèle à quel point tout ce beau monde se retrouve bien dans la marmite de la citoyenneté ! En quoi détruire le gymnase d'à côté nuit-il à soi-même ? Il faudrait pour cela que les auteurs soient victimes d'une aliénation consentie. Malheureusement pour les encadreurs d'opinion, ce n'est pas le cas ! Il leur reste malgré tout à barder les faits d'incohérence, car on doit être tous d'accord au moins sur un point : ces jeunes ont tord, il n'y a rien à "sauver" !

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RÉPONSE de do :

          Salut Colette,

     Merci pour ton intéressant regard de l'aspect jeu des récentes émeutes. Il faut remarquer en effet que personne n'avait fait allusion à cet aspect essentiel de ce qui vient de se passer en France. Je ne pense pas, cependant que l'on puisse réduire ces émeutes à leur aspect jeu, qui était aussi présent dans toutes les tentatives de révolution et, peut-être, plus encore en mai 68 que dans les autres.

     Ainsi, quand tu dis quand tu parles de périmètre restreint cantonné autour de l'habitat, tu sembles ignorer que des tentatives de rendez-vous que les pauvres se sont donnés par SMS et par divers blogs ont cherché à aller "enculer Sarko chez lui" comme le disait le message suivant qui a beaucoup circulé :

     « VENDREDI 11 NOVEMBRE 2005 GRAND RASSEMBLEMENT DE TOUTE LES CITEE D'ILE DE FRANCE SOUS LA TOUR EFFEIL

     « A 14H00 PRECISE

     « FAIT TOURNER GROS , C IMPORTANT ! !

     « DEJA SUR Y A VAL FOURRE CHANTELOU TRAPPE AVEC 400 TETES ET SARCELLE GARGE VILLIER LE BEL AVEC 300 TETES ET STAINS PIEREFITE SEVRAN AVEC 300 TETES OSSI

     « ON VA CRAME PANAME COUSIN ON VA VENIR ENCULER SARKO CHEZ LUI »

     Il me semble que si ce rendez-vous n'a pas été effectif, c'est à cause de critiques de ce genre (celle-ci est intitulée "piègeàcons" :

     http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=45987

     Pour compléter ces quelques remarques, je r'invite à lire le texte dont le lien est ci-dessous :

     http://mai68.org/ag/879.htm