20 janvier 2006
IRAK
Les attentats contre les civils sont commis par les USA !
Dans cette interview donné à Silvia Cattori, Subhi Toma dénonce que : « Il y a chaque jour des communiqués de la résistance [irakienne], diffusés via Internet, qui dénoncent les massacres de civils qu'ils attribuent aux services spéciaux liés à l'occupation. Mais les médias occidentaux n'en parlent pas. »
http://mai68.org/ag/906.htm
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http://www.chez.com/vlr/ag/906.htm
Lien originel : http://www.oulala.net/Portail/article.php3?id_article=2130
Irak : « La résistance grandit de jour en jour »
Subhi
Toma, qui a connu lemprisonnement durant le règne de Saddam Hussein,
na pas accepté que les Etats-Unis aillent renverser les autorités
de son pays. Il se bat aujourdhui pour réclamer le départ
des troupes doccupation, alerter lopinion sur les graves violations
des droits humains et appeler le monde à soutenir la résistance
patriotique irakienne.
S.C.
S.C. - Les Irakiens ont-ils tout perdu ?
Subhi Toma : Oui, ils ont tout perdu. Leur pays est dans une situation effroyable. La majorité des Irakiens ressentent cette guerre comme un crime abominable. Un crime qui a détruit une nation, démantelé un pays, la Mésopotamie dont ils étaient si fiers. Il ny a plus dEtat, il ny a plus rien. Les Américains ont réduit la Mésopotamie à un magma de tribus, de milices, de communautés religieuses, ils ont démantelé les structures de lEtat, réduit à néant ladministration. Il y a des maladies que les Irakiens ne peuvent plus soigner, alors quavant il y avait en Irak un système de santé très performant. Les médecins sont assassinés, contraints de sexiler. Les gens nont plus accès quà 4 heures délectricité par jour. Lenvironnement a été totalement pollué par lusage, par larmée anglo-américaine, darmes interdites, comme luranium appauvri, les bombes au phosphore blanc. Les stations dépuration ont été bombardées et seulement 40% de leau est encore potable. Loccupation a jeté les enfants dans la rue. 40% des enfants irakiens ne fréquentent plus lécole. Ils sont exposés à toutes sortes dabus, surtout aux abords des bases américaines, où les soldats ont amené drogues et prostitution.
S.C.- Etes-vous retourné en Irak ?
Subhi Toma : Je suis entré en Irak le 3 mai 2003. Bagdad venait dessuyer trois semaines de bombardements. Le 1er mai Bush a déclaré : « Voilà la guerre est finie ». Jai vu des bandes de pilleurs sattaquer aux banques. Cétaient des gangs dArabes de toutes origines qui avaient été entraînés dans des bases militaires américaines en Hongrie, en Roumanie, en Pologne et que larmée avait embarqués en Irak à cet effet. Jai vu les soldats qui depuis les tanks leurs faisaient des signes pour les encourager à continuer daller piller et casser. Cest ainsi quils ont pillé tous les trésors dans les musées, vidé tous les coffres de banques. Ce que je vous raconte, dautres que moi lon vu, lont rapporté, je ninvente rien.
S.C.- Ce sont ces bandes que les télévisions ont montrées en train de sattaquer aux symboles du régime de Saddam Hussein pour nous faire croire quil y avait des Irakiens qui applaudissaient larrivée des troupes américaines ?
Subhi Toma : Ce sont ces gangs qui ont démantelé toutes les usines, renvoyé lIrak à lâge préindustriel. LIrak était un pays industrialisé ; dans les années 70 il était parmi les pays du sud émergents. Lusine de Massara qui produisait 30% des médicaments à lusage des Irakiens, a été vendue en pièces détachées aux Jordaniens et aux Koweitiens. Aujourdhui 80% des Irakiens nont plus demploi. 55% entre 18 et 55 ans, sont au chômage. Le seul emploi qui leur reste est de senrôler comme mercenaires auprès des politiciens Kurdes, Chiites et les armées occupantes. Outre les mercenaires arabes, il y a actuellement 50 000 mercenaires Français, Allemands, Anglais, Polonais, Roumains, latino américains, formés par les Américains pour travailler dans ces « armées privées ».
S.C.- Qui sont les poseurs des bombes qui ensanglantent le pays ?
Subhi Toma : Nous pensons que tous les attentats qui visent les mosquées, les écoles, les marchés, sont imputables à ces mercenaires. Les attaques de la résistance patriotique visent les troupes doccupation et les Irakiens qui collaborent avec elles. La résistance est constituée de soldats et dofficiers de larmée de Saddam Hussein.
S.C.- Chez nous, les médias ne parlent pas de résistance mais dAl Quaida et de Zarkaoui !
Subhi Toma : Qui est derrière le nom dAl Quaida ? Qui est Zarkaoui et où est-il ? Quel est le service secret qui agit en utilisant son nom ? Nous pensons que Zarkaoui nexiste pas. Les gangsters qui commettent ces attentats pour des services secrets occidentaux ont un salaire mensuel de 5 000 dollars. Lobjectif de ces massacres est de faire croire à lopinion que ceux qui résistent en Irak sont « des barbares » et que les Américains sont en Irak pour protéger les Irakiens. Et pour fabriquer ces « barbares », Bush a envoyé lambassadeur Negroponte en Irak et la chargé de former ces escadrons de la mort. Cétait Negroponte lui-même qui avait été envoyé en Amérique centrale pour organiser les escadrons qui ont entraîné la mort de dizaines de milliers de personnes. Ces milices privées sont là pour commettre des actes barbares que les occupants attribuent ensuite à la résistance patriotique pour la discréditer et diviser les Irakiens.
S.C.- Pourquoi la résistance ne dément-elle pas ?
Subhi Toma : Il y a chaque jour des communiqués de la résistance, diffusés via Internet, qui dénoncent les massacres de civils quils attribuent aux services spéciaux liés à loccupation. Mais les médias occidentaux nen parlent pas.
S.C.- Il nen demeure pas moins difficile dexpliquer que des Etats démocratiques puissent financer des groupes pour massacrer des innocents !
Subhi Toma : Pourquoi est-ce difficile ? Il est devenu parfaitement clair que des services secrets dEtats occidentaux infiltrent et manipulent des groupes locaux pour leur faire faire ce quils appellent « le sale boulot ». Cest la démarche du colonialisme. Cest de la barbarie. Les Etats-Unis veulent faire croire que les résistants irakiens sont des tarés. Ils ont fait la même chose au Vietnam. La force des Etats-Unis réside dans le fait que leur propagande passe dans les médias et que leurs atrocités sont acceptées par lopinion. Leur démocratie est une véritable escroquerie. Leurs actes dégoûtent les Irakiens de la démocratie. Aujourdhui, tout le monde sait que les services secrets américains avaient organisé en 1973 le coup dEtat qui avait porté Pinochet au pouvoir au Chili. Au Vietnam, avec lopération Phénix, larmée américaine a coupé la tête de paysans vietnamiens et les a ensuite exposés aux photographes pour faire croire au monde que les résistants communistes étaient des barbares. Cest la même stratégie. Pourquoi serait-il difficile de croire que les Etats-Unis et la Grande Bretagne fomentent ce même genre datrocités pour justifier leur agression en Irak et faire croire quil ny a pas de résistance, quil ny a que des « terroristes » ?
S.C.- Le fait que lIrak soit dévasté et le peuple ruiné ne semble pas affecter Bush. Na-t-il pas déclaré à la mi-décembre que son armée est en train de gagner ? !
Subhi Toma : Si nous avons tout perdu ; eux, ils nont pas gagné ! Cest terrible, cest terrible ! LIrak était un pays moderne, organisé et structuré. Un pays sécularisé. En 1930, il y avait des femmes juges ; en 1950, des femmes ministres. Ils en ont fait un désastre... ce nest plus un pays. Toutes les provinces sont dévastées, soumises à des bombardements depuis trois ans. Ils ont tout détruit. Mais ils nont pas réussi à atteindre leurs objectifs. Paul Wolfowitz, un des douze architectes de « la guerre préventive », disait que larmée américaine avait atteint un niveau de compétence technologique qui permettait aux Etats-Unis de mener plusieurs guerres en même temps. Avec lIrak, ils ont connu un revers total. Leur stratégie denvoyer des troupes et des chars est un échec. Ils ne feront plus jamais la même erreur. Ils ne pourront plus occuper lIran ni la Syrie.
S.C.- Nont-ils réalisé aucun de leurs objectifs ?
Subhi Toma : Economiquement ils nont pas rentabilisé ce quils ont investi. Ils nont pas encore signé le contrat pour exploiter le pétrole. Et ils se retrouvent avec 30 000 à 40 000 tués et blessés. Nous croyons que les Etats-Unis vont perdre la guerre, quils sont aujourdhui otages de cette guerre. Toutes leur manuvres politiques élections, Constitution visent à installer un gouvernement local qui sera prêt à signer les contrats et à leur confier lexploitation du pétrole et du gaz irakien, à accepter quil y ait des bases militaires américaines en Irak, pour contrôler 80% du Moyen-Orient. Sils obtiennent cela ils vont partir.
S.C.- Ny a-t-il pas un gagnant, tout de même, Israël qui a toujours affiché sa volonté daffaiblir lIrak ?
Subhi Toma : Oui, on peut dire quIsraël est stratégiquement gagnant. Il nacceptait pas lexistence dun Etat organisé comme lIrak. Il y a des Israéliens qui sont présents en Irak sous diverses formes. Il se peut quIsraël ait atteint un de ses objectifs. Mais ce quIsraël fait au Moyen-Orient simposer par la brutalité et le mépris nest pas une solution. Cinquante ans de coercition contre les Palestiniens nont pas réussi à en finir avec eux. Et cela ne marchera pas non plus avec les Irakiens. Tant que cette logique de guerre prévaut, nous allons tous souffrir, car cela dépasse le cadre du Moyen-Orient.
S.C.- Cette guerre aurait-elle été possible si les dirigeants arabes avaient fait front pour la condamner ? En la facilitant nont-ils pas participé à loppression de leurs peuples ?
Subhi Toma : Bien sûr. Lorsquil y a un désastre de cette importance il ny a pas quun seul facteur. La dégénérescence des régimes arabes a abouti à cela. Je suis tout à fait daccord. Ces régimes arabes sont les alliés stratégiques des Etats-Unis.
S.C.- La soumission des leaders arabes à Washington ne se retournera-t-elle pas contre eux ? Leurs peuples ne se vengeront-ils pas ? Et vous, que ressentez-vous ?
Subhi Toma : Il y a une pensée orientale qui dit : « Si la bêtise gifle lintelligence il ne faut pas que lintelligence se comporte comme la bêtise ». La haine napporte pas de solution. Nous devons uvrer pour amener lOccident à avoir une attitude dégalité avec nous. Si ce nest pas cela, alors cest lidéologie de la violence.
S.C.- Comment ces victimes de la guerre que lOccident a humiliées, atteintes dans leur dignité, vont-elles pouvoir se relever ?
Subhi Toma : Quand jétais là-bas, jai vu dans la rue les soldats américains frapper des Irakiens, les jeter au sol, les écraser de leurs bottes, les encagouler avec des sacs de plastique. Jai compris que, par ces actes humiliants et brutaux, les Américains étaient en train de pousser les Irakiens à la résistance. Je reviens de Damas. Les Syriens sont, eux aussi, désespérés. Jai eu le sentiment quils sont, comme vous le suggérez, profondément atteints par ces humiliations permanentes des Etats-Unis et dIsraël. Ils sont convaincus que leur tour va venir et quils doivent se préparer à résister.
S.C.- Il est difficile de se convaincre malgré ce que vous venez détayer quil y a en Irak une résistance bien organisée. Si tel était le cas pourquoi les Irakiens auraient-ils participé aussi massivement à des élections servant les intérêts de loccupation ?
Subhi Toma : Les dirigeants irakiens savaient que face aux bombardements, ils ne pouvaient pas tenir. Mais ils savaient quune fois que les troupes américaines entreraient dans les villes, les choses se compliqueraient pour elle. La résistance grandit de jour en jour. Les engins artisanaux que les Irakiens utilisent contre les chars américains tuaient au début un soldat par jour, maintenant cinq. Sil ny avait pas une résistance forte, pourquoi, malgré leur ampleur les troupes américaines, ne sont-elles pas arrivées en trois ans à limiter les attaques ? Cest la preuve quil y a un soutien populaire à la résistance. LIrak est un pays vaste. La population est épuisée mais elle a encore un potentiel. Quant aux élections, la participation des Chiites et des Kurdes était acquise. Il y a eu lidée, aussi, que de contribuer au processus politique pouvait contribuer à accélérer le départ des Américains. La résistance nest pas seulement armée, elle est aussi politique.
S.C.- Quand Bernard Kouchner attribuait encore récemment à Saddam Hussein la mort de 2,5 millions dIrakiens dit-il la vérité ?
Subhi Toma : Non. Il y avait une répression politique qui éliminait ses opposants politiques. Jai fait de la prison en Irak. Jai été torturé. Je peux comparer ce qui se passait sous Saddam Hussein avec ce qui se passe aujourdhui. Monsieur Bernard Kouchner exagère les crimes de Saddam Hussein, amplifie ses défauts, pour justifier son adhésion à lembargo et à la guerre abominable des Etats-Unis. Monsieur Kouchner et ses amis de gauche ont soutenu lembargo qui a causé la mort dun demi-million denfants et ruiné toute la société. Pour justifier sa participation à un tel crime Monsieur Kouchner continue de faire de Saddam Hussein un personnage bien plus monstrueux quil nétait.
S.C.- Voulez-vous dire que les troupes américaines en Irak commettent des actes bien plus abominables que du temps de Saddam Hussein ?
Subhi Toma : Bien sûr ! Ce qui se passait sous Saddam Hussein, quantité de régimes latino-américains lont fait. Cétait aux Irakiens de régler leurs problèmes. Cela ne pouvait justifier daller détruire un pays, un peuple. Tous ceux qui voulaient que cette guerre se fasse ont menti. Ils se sont servis de la religion pour diviser les Irakiens. Ils ont prétendu que le régime de Saddam Hussein était contre les Chiites. Comment Saddam pouvait-il être lennemi des Chiites alors que 80% des membres du parti Baath et de larmée irakienne étaient Chiites ? Autre exemple : sur les 55 personnalités dont la tête a été mise à prix par les Etats-Unis, 35 dentre-elles étaient Chiites ! Faire croire que les Chiites étaient les victimes de Saddam est une escroquerie.
S.C.- Quand, dans les années quatre vingt-dix, des politiciens progressistes appelaient à intervenir, au nom du « droit dingérence humanitaire » dans la partie Kurde de lIrak, nouvrait-ils pas la porte à la guerre ?
Subhi Toma : Le droit dingérence humanitaire était une proposition douteuse. Le ministre des affaires étrangères Hubert Védrine avait reconnu que ce « droit dingérence » était une nouvelle forme de colonisation. Je suis allé en Irak durant lembargo. Jai vu les enfants mourir. Quand jai vu des démocrates soutenir lembargo, jai alors pris conscience que la politique et la démocratie nétaient pas cette chose noble que je croyais ; jai compris que tous ces politiciens tous partis confondus qui ne faisaient rien pour empêcher lembargo, participaient à un crime impardonnable. On pouvait éviter la guerre. Les promoteurs de la guerre avaient un parti pris. Ce nétait ni le parti de la paix ni de la démocratie. Quand on leur demandait de faire un geste en faveur des enfants irakiens qui mouraient à cause de lembargo, ces « démocrates » répondaient : « Nous aiderons les démocrates ». Comment peut-on demander à des victimes si elles sont démocrates ?
S.C.- Faut-il considérer les responsables politiques et médiatiques qui ont appuyé cette guerre, complices de crimes ?
Subhi Toma : Bien sûr ! Il y a participation active, il y a participation passive. Je pense que tous ceux qui ont justifié lembargo et soutenu la guerre contre le peuple irakien ont participé dune façon ou dune autre aux crimes contre le peuple irakien.
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