1 octobre 2000
La Bretagne c'est la vie ? Bien sûr... la lutte aussi !
Je tiens à m'expliquer sur les raisons qui me poussent à choisir cette forme de lutte qui ne doit en aucun cas être considéré comme un acte de désespoir, au contraire !
C'est une forme de lutte comme une autre, même si c'est la mobilisation extérieure qui sera déterminante. Étant enfermé dans 10m², 21h30 sur 24 et étant privé de fait de toute activité en raison de mes interdictions de communiquer avec les autres détenus politiques Bretons et Basques, le choix de formes de lutte et de résistance s'offrant à moi est limité.
Suite à la mort d'une jeune travailleuse bretonne, ce que tout le monde considère injustifiable, l'État français en a profité pour criminaliser l'idée indépendantiste et, plus largement, tous ceux et celles qui se réclament de la lutte pour les droits du peuple breton.
Ceci a été fait en incarcérant des militants, en pratiquant une chasse aux sorcières digne du Maccarthysme. C'est pourquoi cette lutte pour les droits des prisonniers politiques bretons dépasse, au niveau des enjeux et de la mobilisation que cela mérite, les stricts problèmes carcéraux et judiciaires. Cette lutte est pour moi indissociable de mon engagement indépendantiste et anti-capitaliste. La justice et la police française ont eu recours à des méthodes violentes (coups, menaces, insultes, saccages de domiciles...), à des arrestations massives de personnes dont le seul tort est d'être indépendantiste ou d'en fréquenter, à des faux témoignages, à l'usage de faux, à la diffamation et le ministre de l'Intérieur de l'époque a même bafoué en public la présomption d'innocence. La classe politique française et bretonne dans son immense majorité, si prompte à invoquer les Droits de l'Homme, est restée muette, se rendant ainsi complice de ces pratiques.
Notre incarcération en France est justifiée par la nécessité d'être près géographiquement des magistrats instructeurs. Pourtant, il n'est pas rare qu'il s'écoule plusieurs mois entre deux entrevues avec le juge d'instruction. Vu la distance, cela constitue, avant toute éventuelle condamnation, une punition pour nos proches et nos familles. De plus, je tiens à indiquer, à titre personnel, qu'en cinq mois de préventive, je n'ai été entendu qu'une fois pendant 2h30. A aucun moment, on ne m'a questionné sur mon emploi du temps, pourtant connu. Cela permet à certains de continuer à distiller des insinuations par voie de presse. Je rappelle que certains camarades en sont rendus à un an de préventive !
Malgré les promesses du juge d'instruction, je n'ai toujours pas accès à mon dossier. Peut-être redouterait on que j'y trouve confirmation d'un autre cafouillage policier que l'on cherche à faire payer à d'autres ?
Le maintien en détention de détenus malades nécessitent des soins que l'administration pénitentiaires se refuse à administrer, constitue une menace pour la vie de ces camarades. Sur ce sujet là également, il y a un déficit de mobilisation.
Cette grève de la faim doit constituer avec les autres mobilisations à venir une occasion de relever la tête pour tous ceux et celles diffamé-es et attaqué-es par la police et la justice française avec la complicité d'une classe politique de charognards qui souhaiteraient que, lorsque l'un évoque la Bretagne, on pense à une région typique de l'ouest de la France, peuplée de gens travailleurs et corvéables se contentant de l'avenir radieux que nous prépare Paris et les capitalistes. Pour moi la Bretagne existe d'abord parce qu'il y a un peuple breton privé de ses droits, à qui ont à même enlevé sa conscience nationale. Un peuple qui, malgré tout, se bat pour l'amélioration de ses conditions de vie dues à une politique économique imposée par Paris et les capitalistes, qui se bat pour le respect de son environnement, qui n'accepte pas la mort programmée de la langue bretonne, pas plus que la partition de son territoire.
Fort de ce constat, j'ai choisi d'être de ceux qui défendent l'idée d'une Bretagne, libre, indépendante, réunifiée, brittophone et socialiste. Pour moi, cela ne sera jamais un délit.
Malgré la prison je reste un militant et je n'ai plus qu'une chose à dire, Battons nous !
Gaël Roblin,
prisonnier politique breton
La santé, e dibenn miz gwengolo 2000.
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