4 aout 2006 Une
introduction au Hezbollah Lara Deeb
http://mai68.org/ag/1033.htm Le Hezbollah, ce mouvement chiite libanais dont les miliciens sont en train de combattre contre larmée israélienne dans le sud du Liban, est présenté de manière erronée dans la majorité des couvertures médiatiques du conflit en cours. Bien plus quune simple milice, ce mouvement est aussi un parti politique, qui joue un rôle fondamental dans la vie politique libanaise et qui fournit des services sociaux considérables à la population. Nullement une émanation de je ne sais trop quel sponsoring iranien ou syrien, le Hezbollah est né du combat contre loccupation israélienne du sud Liban entre 1982 et 2000 et, plus généralement, afin de défendre la communauté chiite du Liban, opprimée au cours des siècles. Bien quil ait beaucoup dadversaires au Liban, le Hezbollah est totalement chez lui dans ce pays, dont il est un élément constitutif. Lunique aspect positif de la campagne militaire israélienne est den apporter la démonstration. Les Chiites libanais et lÉtat libanais Au Liban, la relation entre lÉtat et la société est de nature "confessionnelle". Le pouvoir gouvernemental et les responsabilités sont alloués sur la base de lappartenance religieuse. Il y a dix-huit communautés ethnico-confessionnelles officiellement reconnues dans ce pays, de nos jours. La distribution des pouvoirs, fixée en 1943 par une loi non écrite le Pacte National, conclu entre les chrétiens maronites et les musulmans sunnites à la fin du Mandat français confère lessentiel du pouvoir à un Président de la République (nécessairement) chrétien maronite et à un Premier ministre (nécessairement) musulman sunnite, la fonction relativement moins prestigieuse de président du Parlement échouant à un musulman chiite. Les autres fonctions gouvernementales et les sièges restants au Parlement sont distribués en fonction dun ratio de 6 chrétiens contre 5 musulmans. Ces arrangements respectent prétendument la répartition de la population libanaise relevée lors du recensement de 1932, le dernier (!) à avoir été réalisé dans le pays. Ce système confessionnel est dépassé, car il ne prend pas en compte les changements démographiques. La communauté chiite ayant connu un accroissement plus rapide que les autres communautés, linflexibilité du système a aggravé sa sous-représentation au gouvernement. Concomitamment, lappartenance communautaire devenait de plus en plus un moyen daccéder aux ressources de lÉtat, le gouvernement jetant largent à pleines poignées pour créer des réseaux et des institutions à base confessionnelle, comme les écoles et les hôpitaux. Les Chiites étant sous-représentés au gouvernement, ils nont pas pu canaliser autant de ressources financières que les autres vers leur communauté, ce qui a eu pour effet de créer une pauvreté disproportionnée chez les Chiites libanais. Cet effet a été aggravé par le fait que les sièges chiites au Parlement étaient traditionnellement occupés par des propriétaires terriens féodaux et par dautres élites coupées du peuple. Jusquaux années 1960, la majorité des Chiites du Liban vivaient dans des régions rurales, principalement dans le Sud et dans la vallée de la Bekaa, où les conditions de vie étaient très loin datteindre le niveau de développement des autres régions du pays. A la suite dun programme de modernisation qui créa un réseau routier et introduisit des politiques de cultures de rapport [lucratives] dans les campagnes, beaucoup de musulmans chiites émigrèrent à Beyrouth, où ils sinstallèrent en créant une zone de banlieues déshéritées autour de la capitale. Lurbanisation rapide du Liban, résultant de son insertion dans léconomie capitaliste mondiale, accentua encore les disparités économiques au sein de sa population. Les origines Initialement, cette population urbaine composée essentiellement de Chiites libanais déshérités nétait pas mobilisée en fonction de lignes sectaires. Dans les années 1960 et au début des années 1970, les Chiites constituaient lessentiel des militants et des dirigeants du Parti Communiste Libanais et du Parti Socialiste National Syrien. Mais, à la fin des années 1970, Sayyid Musa Al Sadr, un clerc musulman charismatique qui avait étudié dans la ville sainte chiite irakienne de Najaf, commença à entrer en concurrence avec les partis de gauche, conquérant la loyauté de la jeunesse chiite. Al Sadr leur offrit lalternative du "Mouvement des Déshérités", dédié à lobtention par les déshérités de leurs droits politiques au sein de la société civile libanaise. Une milice émanant de ce mouvement, Amal, fut fondée au début de la guerre civile libanaise, en 1975. Aux côtés dAl Sadr, il y avait aussi dautres chefs religieux chiites libanais, dont la plupart avaient eux aussi étudié à Najaf et qui oeuvraient activement à établir des réseaux sociaux et religieux de base dans les banlieues chiites de Beyrouth. Parmi eux, nous citerons Sayyid Muhammad Husayn Fadlallah, qui est aujourdhui une des "sources démulation" les plus respectées parmi les Chiites, au Liban, mais aussi bien au-delà des frontières libanaises, et Sayyid Hasan Nasrallah. Une "source démulation" [marja al-taqlîd] est un érudit religieux dont lérudition est si largement reconnue que les Chiites musulmans sattachent à connaître son avis dans les questions religieuses, et à le suivre. Chez les Chiites, le titre de "sayyid" [maître, seigneur, NDT] indique une revendication dappartenir à la lignée de Mohamed, le prophète de lIslam. Entre 1978 et 1982, une série dévénements propulsa à lavant-scène la mobilisation chiite naissante et la coupa encore un peu plus des partis de gauche : deux invasions du Liban par Israël, la disparition inexpliquée de Musa Al Sadr et la révolution islamique en Iran. En 1978, en visite en Libye, Al Sadr sévanouit mystérieusement dans le paysage, et cest cette disparition qui suscita son immense popularité. Cette même année, pour repousser les combattants de lOLP qui étaient alors basés au Liban, Israël envahit le sud du pays, déplaçant 250 000 personnes. La première conséquence de ces deux événements fut la revitalisation du mouvement Amal, dont les miliciens combattirent les guérilleros de lOLP au Sud-Liban. Les Chiites avaient de plus en plus le sentiment que la gauche libanaise avait échoué, tant dans lobtention de plus de droits, pour les pauvres, que dans la protection du Sud contre les combats entre lOLP et Israël. Lannée suivante, la révolution islamique en Iran donna un nouveau type de modèle à suivre aux musulmans chiites du monde entier, et elle offrit une vision du monde alternative au capitalisme libéral occidental, différente de celle prônée par les mouvements de gauche. Le dernier ingrédient sans nul doute le plus important de ce salmigondis dévénements, ce fut la deuxième invasion du Liban, en juin 1982. Cette fois-ci, les troupes israéliennes, déterminées à chasser totalement lOLP du Liban, foncèrent vers le Nord et assiégèrent Beyrouth. Des dizaines de milliers de Libanais furent tués et blessés au cours de cette invasion, et 450 000 Libanais étaient chassés de chez eux. Entre le 16 et le 18 septembre 1982, sous la protection et la supervision de larmée israélienne sous les ordres dAriel Sharon alors ministre israélien de la Défense, une unité de la milice des Phalangistes libanais pénétra dans les camps de réfugiés de Sabra et Chatila, à Beyrouth, et ces Phalangistes violèrent, assassinèrent et mutilèrent atrocement des milliers de civils. Environ un quart de ces réfugiés étaient des Chiites libanais qui avaient fui la violence déchaînée dans le Sud. Limportance du rôle joué par linvasion israélienne du Liban, en 1982, dans lapparition du Hezbollah ne saurait être sous-estimée. À la suite des événements de 1982, beaucoup de membres éminents du mouvement Amal quittèrent ce parti, qui était de plus en plus impliqué dans des politiques venues den haut et de plus en plus détaché des luttes populaires contre la pauvreté et loccupation israélienne. Durant ces années, un certain nombre de petits groupes armés composés dhommes jeunes, organisés sous la bannière de lIslam, émergèrent dans le Sud, dans la vallée de la Bekaa et dans les banlieues de Beyrouth. Ces groupes étaient voués à la lutte contre larmée israélienne doccupation et ils prirent part, aussi, à la guerre civile libanaise, qui mettait à lépoque aux prises quelque quinze [15 !] armées et milices diverses. La formation militaire de base et léquipement des milices chiites furent fournis par lIran. Avec le temps, ces groupes fusionnèrent, fondant le Hezbollah, mais lexistence formelle de ce "Parti de Dieu" [car telle est la signification de Hezbollah, NDT] et de son aile armée, la Résistance Islamique, ne fut annoncée que le 16 février 1985, dans une "Lettre ouverte aux opprimés du Liban et du monde entier". Structure et commandement Depuis 1985, le Hezbollah a développé une structure interne complexe. Dans les années 1980, un conseil religieux réunissant des dirigeants éminents, appelé ëmajlis-al-shura, fut formé [majlis-al-shura = conseil de la concertation et du consensus, NDT]. Ce conseil composé de sept membres senrichit de branches chargées des divers aspects du fonctionnement du groupe, avec des comités des questions financières, juridiques, sociales, politiques et militaires. Il y avait également des conseils locaux, à Beyrouth, dans la Bekaa et dans le Sud. Vers la fin de la guerre civile libanaise, le Hezbollah commençant à prendre part à la vie politique de lÉtat libanais, deux autres organismes de prise de décision politique furent institués : un conseil exécutif et un bureau politique. Sayyid Muhammad Husayn Fadlallah est souvent qualifié de "chef spirituel" du Hezbollah. Cependant, tant lui-même que le parti ont à de multiples reprises rejeté ce type de relation et, de fait, il y a eu, durant un certain temps, une coupure, entre lui-même et le parti, sur la nature de linstitution islamique chiite quest la marjaiyya. Cette marjaiyya réfère à la pratique et à linstitution consistant à suivre ou à imiter un "marja al-taqlîd", cest-à-dire un érudit musulman chiite digne dêtre émulé. Fadlallah pense que les théologiens doivent travailler dans toutes sortes dinstitutions et quils ne doivent pas être affiliés à un seul parti politique, ni être impliqués dans les affaires triviales du gouvernement des choses dici-bas. En cela, il est très proche de la jurisprudence chiite traditionnelle, et très éloigné du concept de velayat-e faqih" [le gouvernement des clercs (expression persane, NDT)] promulgué par lAyatollah Ruhollah Khomeini, dIran. Le Hezbollah et son majlis al-shura [son conseil consultatif] marchent sur les brisées de lAyatollah Ali Khamenei, le successeur du Khomeini en tant que dirigeant suprême de la République islamique dIran. Mais, individuellement, les partisans ou les membres du parti sont libres de choisir quel marja [quel exemple] suivre, et beaucoup préfèrent prendre pour modèle Fadlallah, en lieu et place de Khamenei Limportant à retenir, cest que (pour chaque Chiite, en loccurrence libanais), lallégeance politique et lémulation religieuse sont deux choses séparées, indépendantes lune de lautre, qui peuvent, ou non, se recouper sur une seule individualité. Sayyid Hasan Nasrallah est le dirigeant politique actuel du Hezbollah. Bien quil soit aussi lui-même théologien et quil ait également fait ses études à Najaf, il na pas assez de prestige pour être un marja al-taqlîd, et il est lui-même un disciple religieux de Khamenei. Nasrallah est devenu secrétaire général du Hezbollah en 1992, après quIsraël eut assassiné son prédécesseur, Sayyid Abbâs Musâwî (ainsi que son épouse et son fils âgé de cinq ans). Nasrallah est très généralement considéré, au Liban même par ceux qui ne sont pas daccord avec lidéologie et les actions du parti comme un dirigeant qui "dit les choses comme elles sont". Cest sous sa direction que le Hezbollah sest engagé à travailler au sein de lÉtat et de commencer à participer aux élections une décision qui a entraîné le départ des clercs les plus révolutionnaires de la direction du parti. Le Hezbollah et les USA Aux USA, le Hezbollah est généralement associé aux attentats à la bombe qui détruisirent, en 1983, lambassade américaine, la caserne des Marines et le QG dune force multinationale sous direction française à Beyrouth. Le second de ces attentats entraîna directement le départ du Liban de larmée américaine. Le mouvement est également cité par le Département dÉtat en association avec les enlèvements dOccidentaux au Liban et à la crise des otages qui aboutit au scandale Iran-Contra, au détournement dun vol de la TWA en 1985 et aux attentats à la bombe contre lambassade dIsraël et un centre culturel à Buenos Aires au début des années 1990. Ces soupçons sont la raison déclarée de la présence du nom du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes tenue par le Département dÉtat. En 2002, le vice-secrétaire dEtat Richard Armitage donna une description du Hezbollah demeurée célèbre : « Cest une bande de terroristes », capable de « frapper partout dans le monde ». Il suggéra lidée qu« Al-Qaida est peut-être seulement une équipe de catégorie B, en matière de terrorisme. » Limplication du Hezbollah dans ces attentats demeure contestée [Note de do : en fait c'est le Mossad lui-même qui avait commis les attentats de Buenos Aires], toutefois. Même si elle est admise, il est tout aussi erroné que peu intelligent de reléguer le Hezbollah dans la case "terroristes". Il y a, à cela, plus dune bonne raison. Tout dabord, lactivité militaire du Hezbollah a généralement été consacrée à mettre un terme à loccupation israélienne du sud Liban. Depuis le retrait dIsraël, en mai 2000, les membres du Hezbollah ont opéré pour lessentiel à lintérieur de "règles du jeu" tacites mais mutuellement comprises dans des escarmouches frontalières de basse intensité, évitant les victimes civiles. Ensuite, le Hezbollah a évolué et il a changé considérablement depuis sa création : il est devenu à la fois un parti politique libanais légitime et une organisation-parapluie chapeautant une multitude dorganismes sociaux. Autre prétexte invoqué pour coucher le Hezbollah sur la liste des organisations terroristes : la réputation de ce groupement davoir mené de nombreuses "attentats kamikazes" ou "opérations de martyres". En réalité, sur les centaines dopérations militaires entreprises par cette formation durant linvasion et loccupation du Liban, douze seulement impliquaient la mort intentionnelle dun combattant du Hezbollah. Ce sont au minimum la moitié des "attentats suicides" contre les forces doccupation au Liban qui ont été effectués par des membres de partis laïcs et de gauche. Enfin, troisième raison, pour les USA, de qualifier le Hizbollah dorganisation terroriste : lidée que cette organisation a pour raison dêtre la destruction dIsraël, ou de la "Palestine occupée" selon la rhétorique du parti. Cette perspective est prônée par la Lettre ouverte de 1985, qui comporte des expressions telles que "le départ définitif dIsraël du Liban est un prélude de son effacement définitif de la carte et de la libération de la vénérable Jérusalem du joug de loccupation." On peut se poser des questions sur la faisabilité dun tel projet, en particulier en raison de limmense asymétrie en termes de puissance militaire et de puissance destructrice actuellement disponible. Les attaques par roquettes du Hezbollah, en ce mois de juillet 2006, qui ont commencé après le début des bombardements israéliens sur le Liban, ont tué jusquici dix-neuf civils et endommagé plusieurs bâtiments ; mais, cela nest rien en comparaison des dévastations et des morts causées par laviation israélienne au Liban. Jusquen mai 2000, la quasi totalité de lactivité militaire du Hezbollah se limita à libérer le territoire libanais de loccupation israélienne. Les attaques transfrontalières, de mai 2000 à juillet 2006, étaient des petites opérations à motivation tactique (Israël na dailleurs même pas répliqué militairement à toutes ces attaques). Le document fondateur du Hezbollah affirme, par ailleurs : « Nous ne reconnaissons aucun traité avec Israël, aucun cessez-le-feu et aucun accord de paix, ni bilatéral, ni global ». Ce langage avait été adopté en des temps où linvasion du Liban par Israël venait de donner naissance à la milice Hezbollah. Augustus R. Norton, auteur de plusieurs ouvrages et articles consacrés au Hezbollah relève que, "même si linimitié du Hezbollah envers Israël ne doit toujours pas être écartée, le fait est quil négocie, tacitement, depuis des années, avec Israël." Les discussions indirectes du Hezbollah avec Israël, en 1996 et en 2004, ainsi que sa volonté déclarée de parvenir actuellement à un échange de prisonniers, tout cela dénote un certain réalisme de la part de la direction de ce parti. La résistance, la politique et la règle du jeu En 1985, Israël se retira de la plupart du territoire libanais, mais il continua à occuper la partie sud du pays, en contrôlant environ un dixième du Liban au moyen à la fois de soldats israéliens et dune milice de supplétifs libanais, lArmée du Liban Sud [ALS]. La Résistance islamique du Hezbollah prit la direction des opérations, même si dautres contingents participaient à la lutte contre loccupant. Le parti oeuvra également à défendre et représenter les intérêts des Chiites dans la politique libanaise. La guerre civile libanaise prit fin en 1990, après la signature, lannée précédente, des accords de Taif. Ces accords de Taif réaffirmaient une variante du Pacte National, en accordant plus de pouvoir au Premier ministre et en augmentant le nombre des ministres musulmans au gouvernement. Mais, même si la force numérique ou confessionnelle des divers constituants de la population libanaise est vivement contestée, les analystes les plus prudents estiment quà la fin de la guerre civile, les musulmans chiites représentaient au minimum un tiers de la population, soit la plus importante communauté confessionnelle. Dautres estimations sont encore bien plus élevées. Lorsque les premières élections daprès-guerre civile furent tenues au Liban, en 1992, beaucoup des différentes milices (qui, bien souvent, émanaient de partis politiques) retrouvèrent leur statut de parti politique, et ces partis participèrent aux élections. Le Hezbollah décida, lui aussi, dy prendre part, déclarant son intention de travailler dans le cadre du système politique libanais existant, tout en conservant ses armes afin de poursuivre sa campagne de guérilla contre loccupation israélienne dans le sud, comme les accords de Taif ly autorisaient. À ces premières élections, le parti remporta huit sièges, ce qui lui conféra le plus important groupe parlementaire dans le Parlement fort de cent vingt-huit sièges, ses alliés remportant quatre sièges supplémentaires. Depuis lors, le Hezbollah sest gagné la réputation même chez ceux qui rejettent avec véhémence son idéologie de parti politique "propre" et compétent, tant au niveau national quau niveau local. Cette réputation est tout particulièrement importante au Liban, où la corruption gouvernementale est avouée et assumée, où le clientélisme est la norme et où les responsabilités politiques sont bien souvent héréditaires. En tant que corporation, les parlementaires libanais constituent le corps législatif le plus fortuné du monde. La politique parlementaire du parti étant généralement respectée, le soutien national aux actions de la Résistance islamique, dans le Sud, fluctua au fil des années. Les attaques israéliennes contre les civils et les infrastructures du Liban dont la destruction de centrales électriques, à Beyrouth, en 1996, 1999 et 2000 ont contribué généralement au renforcement du soutien national à la Résistance. Cela fut particulièrement le cas après le bombardement, par Israël, dun refuge de lONU, où des civils avaient trouvé refuge, à Qana, le 18 avril 1996, entraînant la mort de 106 civils. Loccupation du sud Liban fut particulièrement coûteuse pour Israël. Le Premier ministre israélien Ehud Barak fit du retrait du sud Liban un élément de ses promesses électorales en 1999, puis il annonça que ce retrait serait effectué, en juillet 2000. Un mois et demi après la date buttoir annoncée, après des désertions dans lALS et leffondrement déventuels pourparlers avec la Syrie, Barak donna lordre dun retrait chaotique du Liban, qui prit beaucoup de gens par surprise. À trois heures du matin, le 24 mai 2000, le dernier soldat israélien sortait du sol libanais et refermait derrière lui le portail du point-frontière de Fatima. Beaucoup dobservateurs prédirent que lanarchie, la violence sectaire et le chaos viendraient combler le vide laissé derrière elles par les forces israéliennes doccupation et lALS, qui ne tarda pas à séparpiller. Ces prédictions furent démenties par le Hezbollah, qui réussit à maintenir lordre dans la région frontalière. En dépit du retrait israélien, un conflit territorial reste pendant : il concerne une zone de quelques kilomètres carrés, appelée les Fermes de Shebaa, demeurées sous occupation israélienne. Le Liban et la Syrie affirment que le flanc des collines est territoire libanais, tandis quIsraël et lONU ont déclaré quil est partie constitutive des Hauteurs du Golan et quil appartient, par conséquent, à la Syrie (bien quoccupé par Israël). Depuis 2000, le Liban attend par ailleurs quIsraël lui remette la carte indiquant la localisation de quelques 300 000 mines installées par larmée israélienne au Sud Liban. Des "règles du jeu" tacites, fondées sur laccord de ne pas cibler des civils, conclu après le bombardement de Qana en 1996, ont présidé au contentieux frontalier israélo-libanais depuis lan 2000. Les attaques du Hezbollah contre des postes militaires israéliens dans les Fermes de Shebaa occupées, par exemple, recevaient comme réponse un bombardement israélien limité davant-postes du Hezbollah et quelques franchissements du mur du son par les avions de guerre israéliens au-dessus du territoire libanais. Les deux camps, à loccasion, ont violé ces "règles du jeu". Toutefois, les rapports sur les violations de frontière établis par les observateurs de lONU indiquent quIsraël a dix fois plus violé la Ligne Bleue marquant la frontière entre les deux pays que le Hezbollah. Les forces israéliennes ont enlevé des bergers et des pêcheurs libanais. Le Hezbollah a emmené un homme daffaires israélien au Liban, en octobre 2000, affirmant quil sagissait dun espion. En janvier 2004, par lintermédiaire de médiateurs allemands, le Hezbollah et Israël ont conclu un marché aux termes duquel Israël libérait des centaines de prisonniers libanais et palestiniens, en échange de cet homme daffaires et du corps de trois soldats israéliens. À la dernière minute, les responsables israéliens ont rejeté lordonnance de la Cour suprême israélienne, et ils ont refusé de remettre les trois derniers prisonniers libanais, dont Samir Al Qantar, le plus "ancien" de ces prisonniers, incarcéré depuis vingt-sept ans pour avoir tué trois Israéliens après sêtre infiltré à travers la frontière en territoire israélien. Le Hezbollah sest engagé à ouvrir de nouvelles négociations, quelque part, quand cela savèrera opportun. Le nationalisme du Hezbollah Comme je lai indiqué, le Hezbollah suit officiellement Khamenei en qui il voit le marja du parti, et il entretient des relations chaleureuses avec lIran depuis les années 1980, époque où ce pays a contribué à armer et à entraîner la milice qui allait devenir le Hezbollah. Il se consulte régulièrement avec les dirigeants iraniens, et il reçoit une aide économique dun montant indéterminé. LIran a par ailleurs continué à aider militairement la Résistance islamique, fournissant notamment des roquettes de son arsenal. Ces relations, toutefois, ne signifient nullement que lIran dicte en quoi que ce soit la politique du Hezbollah ni ses prises de position, ni quil soit en mesure de contrôler les actions de ce parti. Par ailleurs, les efforts iraniens visant à infuser dans les milieux chiites libanais une identité pan-chiite irano-centrée se sont heurtés à leur identité arabe et nont fait que renforcer le nationalisme libanais du Hezbollah lui-même. Cest à peu de choses près la même chose qui sest produite avec la Syrie, souvent considérée tellement proche du Hezbollah que la milice de ce parti est parfois qualifiée de "carte libanaise" de la Syrie dans ses efforts pour reprendre le contrôle des hauts plateaux du Golan aux mains dIsraël. Même si le Hezbollah entretient de bonnes relations avec le gouvernement syrien, la Syrie ne contrôle ni à fortiori ne dicte les décisions ou les actions du Hezbollah. Les décisions du parti sont prises de manière indépendante, en accord avec la représentation que le Hezbollah se fait des intérêts du Liban et de ses intérêts propres au sein de la politique libanaise. Après lassassinat de lex-Premier ministre libanais Rafîq al-Harîrî, en février 2005, et après le retrait syrien du Liban qui en découla, la position du Hezbollah a souvent été décrite, de façon erronée, comme "pro-syrienne". En réalité, la rhétorique du parti a été choisie avec soin afin de ne pas faire opposition au retrait syrien, et de manière à le relooker en un retrait qui naboutirait pas à la coupure des liens avec le Liban, et qui se déroulerait dans une atmosphère empreinte de "gratitude" envers la Syrie. Il nest pas douteux que le Hezbollah soit un parti nationaliste. Sa vision du nationalisme diffère de celle de bien des Libanais, et en particulier du nationalisme "phénicien" épousé par la droite chrétienne maronite, et aussi du nationalisme néo-libéral et soutenu par les USA du parti de Harîrî. Le Hezbollah prône un nationalisme qui considère le Liban comme un État arabe qui ne saurait se couper de causes telles la question palestinienne. Son idéologie politique conserve un aspect extérieur islamique. La Lettre ouverte de 1985 affirme laspiration du parti à créer un État islamique, mais seulement à travers la volonté populaire. "Nous ne voulons pas dun Islam qui règnerait au Liban par la force", indique en effet ce document. La décision prise par le parti de participer aux élections de 1992 a souligné son engagement à oeuvrer au sein des structures existantes de lÉtat libanais, et il a marqué, par ailleurs, le glissement de la focalisation du parti sur une résistance panislamique à Israël vers la politique intérieure libanaise. De plus, depuis 1992, les dirigeants du Hezbollah ont fréquemment reconnu les contingences propres à la société multiconfessionnelle libanaise ainsi que limportance de la coexistence intercommunautaire et du pluralisme dans ce pays. Il convient également de noter que beaucoup des électeurs du Hezbollah ne souhaitent pas vivre dans un État islamique. Non, ce quils veulent, cest que le parti Hezbollah défende leurs intérêts et les représente au sein dun Liban pluraliste. La nature nationaliste du parti sest renforcée tout au long de la transition du Hezbollah, de milice résistante quil était, jusquau parti politique et au-delà. Après le retrait syrien, il est devenu évident que ce parti allait jouer un rôle plus important au gouvernement libanais. De fait, lors des élections de 2005, le Hezbollah a accru sa représentation parlementaire, passant à quatorze sièges, au sein dun bloc parlementaire avec dautres partis, qui en a remportés trente-cinq. Toujours en 2005, pour la première fois, le parti a décidé de participer au gouvernement, et il détient actuellement le ministère de lEnergie. Le Hezbollah ne considère pas que sa participation au gouvernement entre en quoi que ce soit en contradiction avec le maintien de son statut de milice non-étatique. De fait, le premier point du programme électoral du Hezbollah, en 2005, était un appel à "sauvegarder lindépendance du Liban et à le protéger contre la menace israélienne en maintenant la Résistance, en conservant laile militaire du Hezbollah et son armement, en vue de lobtention de la libération totale des territoires libanais encore occupés." Cette position place le parti en contravention avec la résolution 1559 du Conseil de sécurité de lONU, qui en appelait au "démantèlement et désarmement de toutes les milices libanaises et non-libanaises", en septembre 2004, ainsi quavec ces forces politiques qui, au Liban, cherchent à faire mettre en application ladite résolution. Avant les événements actuels [juillet 2006], Nasrallah et dautres dirigeants du parti ont participé à une série de meetings de "dialogue national" visant à discuter des termes dun désarmement du Hezbollah. Ce dialogue nétait parvenu à aucune conclusion avant le déclenchement des violences actuelles, pour partie à cause de linsistance mise par le Hezbollah à affirmer que ses armes étaient encore nécessaires, afin dassurer la défense du Liban. Mais, ce parti a aussi une plate-forme sociale, et il se considère représenter non seulement les Libanais chiites, mais plus généralement tous les Libanais pauvres. La milice Amal créée par Sayyid Musa Al Sadr sétait elle aussi transformée en parti politique, principal rival politique du Hezbollah parmi les Chiites libanais, bien que travaillant aujourdhui en tandem. Nabih Berri, depuis longtemps président du Parlement, et chef dAmal, est lintermédiaire entre le Hezbollah et les diplomates en quête des conditions dun cessez-le-feu et dun échange de prisonniers. Le parti joue par ailleurs le jeu politique habituel au Liban, qui veut que les candidats jouent sur des alliances régionales multiconfessionnelles, plutôt que sur des individualités, et il sallie (transitoirement, toutefois), avec des hommes politiques qui ne soutiennent pas nécessairement son programme. Lors des élections parlementaires de 2005, la sunnite , sur la liste du Hezbollah à Saïda [Sidon], était Bahiyya Al Harîrî, la soeur de lancien Premier ministre libanais assassiné. Depuis les élections, le plus puissant allié du mouvement chiite est lancien général Michel Aoun, personnage "anti-syrien" par excellence dans la politique libanaise. Le mouvement dAoun, aux côtés du Hezbollah, apporta une importante contribution aux manifestations monstres organisées le 10 mai dernier à Beyrouth pour protester contre les projets de privatisation du gouvernement, qui auraient entraîné de nombreuses suppressions de postes dans le secteur public libanais. Action sociale Entre autres conséquences de la guerre civile libanaise, la stagnation économique, la corruption gouvernementale et un fossé allant sélargissant entre une classe moyenne de plus en plus réduite et des pauvres de plus en plus nombreux. Les quartiers chiites de Beyrouth avaient aussi à faire face à des déplacements massifs de population en provenance du Sud et de la vallée de la Bekaa. Dans ce climat économique, le clientélisme communautaire devint un outil indispensable à la survie. Un réseau social musulman chiite sest développé, au cours des années 1970 et 1980, avec des acteurs clés dont Al Sadr, Fadlallah et le Hezbollah. Aujourdhui, le Hezbollah joue le rôle dune organisation-parapluie sous laquelle beaucoup dinstitutions sociales sont gérées. Certaines dentre elles apportent des allocations mensuelles et assurent une aide dans les domaines alimentaire, éducatif, du logement et de la santé à la population déshéritée ; dautres se consacrent au soutien aux orphelins ; dautres encore se vouent à la reconstruction des zones endommagées par la guerre. Il y a aussi des écoles sponsorisées par le Hezbollah, des cliniques et des hôpitaux quasi gratuits. Il y a même une école spécialisée dans laccueil denfants atteints du syndrome de Down. Ces institutions sociales sont situées partout au Liban et elles sont au service de la population locale sans égard pour lappartenance confessionnelle, même si elles sont particulièrement concentrées dans les régions chiites du pays. Elles sont en quasi totalité gérées par des volontaires bénévoles, en particulier des femmes, et le plus gros de leur financement provient de dons individuels, de bourses de parrainage dorphelins et du denier du culte. Les musulmans chiites versent chaque année un "denier du culte" appelé le "khums", ce qui signifie "le cinquième", correspondant effectivement au cinquième de leurs économies après leurs dépenses courantes. La moitié de ce denier du culte est allouée à lentretien du marja auquel ils adhèrent. Depuis 1995, année où Khamenei a nommé Nasrallah et un autre dirigeant du Hezbollah comme ses mandataires religieux au Liban, les revenus "khums" des Chiites libanais adeptes de Khamenei sont allés directement dans les vastes coffres-forts du Hezbollah. Ces Chiites donnent aussi leur "zakat", cest-à-dire laumône exigible de tous les musulmans en mesure de la payer, au vaste réseau dinstitutions sociales locales du Hezbollah. Le plus gros de ce soutien financier provient de Chiites libanais vivant à létranger. Qui soutient le Hezbollah ? Un des buts proclamés de la guerre actuelle menée par Israël étant l« élimination » du Hezbollah du Sud du Liban, il est fondamental de relever que ce parti bénéficie dun très large soutien, non seulement dans le Sud, mais dans lensemble du Liban un soutien qui ne dépend absolument pas de lappartenance communautaire. Etre né dans une famille musulmane chiite, voire même être un musulman chiite pieux et pratiquant, ne détermine en rien laffiliation politique de quiconque. Le statut socio-économique nentre pas non plus en ligne de compte. On suppose parfois que le Hezbollah se servirait de ses organisations sociales pour sacheter des soutiens, ou que ces organisations ne sont que des couvertures pour des "activités terroristes". Ces représentations des choses ne font que trahir une vision simpliste de ce quest réellement ce parti. Une lecture plus attentive et exacte suggère que la popularité dont jouit ce parti est fondée pour partie sur sa dévotion aux pauvres, mais aussi sur son programme politique et sur ses réalisations au Liban, sur son idéologie islamiste, et sur sa résistance à loccupation du Liban et aux violations de sa souveraineté par Israël. La popularité du Hezbollah est fondée sur une combinaison didéologie, de résistance et dune approche du développement politico-économique. Pour certains, lidéologie du Hezbollah est considérée représenter une alternative viable à un gouvernement libanais soutenu par les USA et à ses projets économiques néo-libéraux au Liban, ainsi quune opposition au rôle joué par les USA au Moyen-Orient. Ses électeurs ne sont pas seulement les pauvres, mais de plus en plus des Libanais appartenant aux classes moyennes, et on y trouve aussi beaucoup de Libanais extrêmement mobiles et hautement éduqués. Beaucoup de ses partisans sont des musulmans chiites, mais il y a parmi eux également beaucoup de Libanais appartenant à dautres communautés religieuses, qui soutiennent ce parti et/ou la Résistance islamique. "Partisan du Hezbollah" est en soi une expression on ne peut plus vague. Il y a des membres officiels du parti et/ou de la Résistance islamique ; il y a des volontaires oeuvrant dans des organisations sociales affiliées au parti ; il y a ceux qui ont voté pour le Hezbollah aux dernières élections ; il y a ceux qui soutiennent la Résistance dans le conflit actuel, quils soient daccord ou non avec son idéologie. Prétendre débarrasser le Sud du Liban du Hezbollah, en faire son objectif, cela risque de revenir à dépeupler totalement le Sud, ce qui équivaudrait à une épuration ethnique de cette région. Dans le conflit actuel, alors que lopinion publique libanaise semble divisée sur la question de savoir si cest le Hezbollah ou Israël quil faut incriminer dans la dévastation qui sest abattue sur le pays, cette division ne suit pas nécessairement des lignes de faille confessionnelles. Plus important : il y a beaucoup de Libanais qui ne sont pas daccord avec lidéologie islamiste du Hezbollah, ou avec son programme politique, et qui pensent que son opération du 12 juillet [comportant notamment la capture de deux soldats israéliens, NDT] fut une erreur, mais qui soutiennent la Résistance islamique et qui voient en Israël leur ennemi. Ces positions ne sont en rien mutuellement exclusives. Un des effets des bombardements israéliens sur certains quartiers sélectionnés de Beyrouth a été daccentuer les oppositions de classe au Liban, ce qui ne pourra quaugmenter la popularité du Hezbollah parmi les Libanais qui se sentaient déjà exclus par le style de reconstruction et de développement mis en oeuvre par Hariri. Les violences actuelles Le 12 juillet, des combattants du Hezbollah ont attaqué un convoi de larmée israélienne, capturant deux soldats. Le parti a déclaré avoir capturé ces soldats afin de les utiliser comme des moyens déchange lors de négociations indirectes en vue de la libération de trois prisonniers libanais détenus sans procès et contre lavis rendu par la Cour suprême dIsraël. Comme je lai déjà indiqué, il existe des précédents de négociations de cette nature. Le raid du Hezbollah avait été planifié depuis des mois, et le parti avait fait au moins déjà une tentative visant à capturer des soldats israéliens. Nasrallah avait déclaré déjà auparavant que lannée 2006 serait lannée où des négociations auraient lieu en vue de la libération des trois prisonniers libanais demeurant dans les geôles israéliennes. Au cours dune interview diffusée le 20 juillet par la chaîne arabe Al-Jazeerah, il a également déclaré que dautres dirigeants, au Liban, étaient au courant de son intention de donner lordre dune tentative de capture [de soldats israéliens], bien quils neussent pas été au courant des détails de cette opération en particulier. Après la capture de ses (deux) soldats, Israël a déclenché lassaut de son aviation contre les villes et lensemble des infrastructures du Liban à une échelle inédite depuis linvasion de 1982. Cette attaque a été accompagnée dun blocus maritime, puis, plus récemment, dune incursion terrestre. Linvasion terrestre est fortement contrée par les combattants du Hezbollah, ainsi que par ceux dautres partis. Tant le Parti Communiste Libanais que le parti Amal ont annoncé la mort de combattants originaires de leurs rangs dans la bataille. Ce sont au moins 516 Libanais qui ont perdu la vie, pour la plupart des civils ; le bilan des morts communiqué par le gouvernement libanais sétabli à 750 personnes, au minimum. Un décompte de lONU indique quun tiers des victimes sont des enfants. Dans plusieurs cas, des villageois qui avaient été prévenus par Israël au moyen de tracts lancés par avion ou de messages téléphoniques automatiques dabandonner leurs maisons qui allaient être bombardées ont été tués quelques instants après sur les routes, les Israéliens ayant pris leurs voitures pour cibles. Le 30 juillet, des avions israéliens ont bombardé un immeuble de trois étages utilisé comme abri à Qana, tuant au minimum 57 civils, remettant dans les mémoires le massacre perpétré au même endroit en 1996. Le gouvernement libanais estime que 2000 personnes ont été blessées depuis le 12 juillet, tandis que non moins de 750 000 personnes ont été contraintes de quitter leur domicile. Le Hezbollah a répliqué, pratiquement dès le début de la campagne des bombardements israéliens, en tirant des centaines de roquettes sur Israël, tuant jusquici dix-neuf civils israéliens. À noter également que 33 soldats israéliens ont été tués dans les combats. Au Liban, en particulier dans le Sud, des villages entiers ont été nivelés par les bombes, ainsi que des quartiers entiers dans les faubourgs du Sud de Beyrouth. Les pistes et les réservoirs de kérosène de laéroport international de Beyrouth, les routes, les ports, les centrales électriques, les ponts, les stations services, ainsi que les camions transportant des fournitures médicales, des ambulances et des minibus bondés de civils ont été pris pour cibles et détruits. LONU met en garde contre une crise humanitaire, et elle a indiqué que des enquêtes sur des crimes de guerre sont en cours après la prise pour cible de civils tant au Liban quen Israël. Lassociation Human Rights Watch a documenté lutilisation par Israël de bombes à fragmentation, dont elle pense quelles "violent linterdiction des attaques indiscriminées du droit humanitaire", les "petites bombes en grappes" étant largement répandues par le bombardement et nexplosant souvent pas, comme elles devraient le faire lors de leur impact, devenant de faite des mines terrestres antipersonnelles. Des témoins oculaires, à Beyrouth, ont rapporté que le type des destructions, dans les quartiers durement bombardés, évoque celles causées par des armes thermonucléaires, ou par des "bombes à vide" (à implosion), dont les effets de souffle frappent par définition aveuglément. Les médecins libanais qui reçoivent les corps des morts et les blessés ont allégué que les bombes israéliennes peuvent renfermer du phosphore blanc, une substance qui est considérée, si elle est utilisée lors dopérations offensives, comme une arme chimique prohibée. Le but initialement affiché par Israël, à savoir assurer la libération des deux soldats capturés, sest évanoui dans le discours officiel israélien, cédant la place à deux nouveaux objectifs : le désarmement, ou tout au moins l« affaiblissement » de la milice du Hezbollah, et son élimination du Sud Liban. Daprès un article publié le 21 juillet dans le quotidien américain San Francisco Chronicle, "un haut responsable de larmée israélienne" a présenté des plans en vue dune offensive aux mêmes fins à des diplomates américains et dautres pays plus dun an avant que le Hezbollah ne capture les deux soldats israéliens. Tout en violant de nombreuses résolutions de lONU, larmée israélienne semble tenter, toute seule avec le soutien des États-Unis, toutefois de faire mettre en application la Résolution 1559 du Conseil de sécurité de lONU. On
ne voit pas très bien de quelle manière le bombardement
aérien des infrastructures du Liban et lassassinat de civils
libanais pourrait contribuer en quoi que ce soit à la réalisation
de ces objectifs, dautant que le soutien au Hezbollah et à
la Résistance islamique semble saccroître. La colère
contre les exactions dIsraël lemporte sur le désaccord
idéologique avec le Hezbollah chez beaucoup de Libanais, actuellement.
Par conséquent, il est vraisemblable que le soutien dont bénéficie
ce parti va continuer à grandir. Signé :
Lara Deeb Lara Deeb, anthropologue, est professeur assistante à lUniversité Irvine de Californie, où elle enseigne la sociologie des femmes. Elle est lauteur de louvrage "Une modernité ré-enchantée : genre et manifestations publiques de la piété chez les Chiites du Liban" [An Enchanted Modern : Gender and Public Piety in Shii Lebanon] Traduit de langlais par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique (http://www.tlaxcala.es).
Lire ici quelques remarques sur le hezbollah :
http://mai68.org/ag/1036.htm |
Vive la révolution : http://www.mai68.org
ou : http://kalachnikov.org
ou :
http://vlr.da.ru
ou :
http://hlv.cjb.net