23 janvier 2007

LA TRAHISON DES MAOS DU NÉPAL

Par Himalove

http://mai68.org/ag/1104.htm
http://cronstadt.org/ag/1104.htm
http://kalachnikov.org/ag/1104.htm

NÉPAL : L'ADIEU AU PEUPLE EN ARME

La fin d'une révolution sous tutelle coloniale

« Ceux qui font des révolutions à moitié ne font que se creuser un tombeau ! » Saint-Just

    Le 18 janvier 2007, à Shaktipur, Chitwan, Nawalparasi, les bataillons de l'Armée populaire de libération (maoïstes népalais) déposaient leurs armes devant 111 Gurkhas (mercenaires népalais) extraits de régiments britanniques.

    Rien de glorieux à cette reddition qui s'accompagne du recensement et du fichage des miliciens communistes.

    La scène diffusée sur les télés indiennes ressemble aux redditions de bandits orchestrées de temps à autre au Bihâr par le gouvernement indien.

    « Il ne s'agit pas d'un abandon des arsenaux, mais de leur emmagasinage dans des conteneurs des nations unies » tente d'expliquer, en vain, un cadre du parti.

    Difficile d'enseigner aux masses les raisons de cette débandade de l'armée rouge.

    Le général Jan Erik Wilhemlsen, bras droit de Ian Martin, représentant l'ONU au Népal et commandant du Gurkha Interim Special Task Force, réserverait les clefs de ces conteneurs aux commissaires politiques.

    Nul ne sait si cela a suscité des débats au sein d'un parti qui exigeait la fermeture des centres de recrutement Gurkha, tenu par des officiers britanniques.

    Le 19 janvier 2007, le politburo dissolvait les gouvernements du peuple.

    Pourquoi cette "mort subite", une telle capitulation, alors que le Parti maoïste prétendait contrôler 80 pour cent du territoire ?

    Comment, dès lors, empêcher les compagnies étrangères, la Texaco, l'ONGC (1), par exemple, de faire main basse sur les ressources naturelles et de recruter du personnel ?

    Car la première conséquence de ce démantèlement est de transformer les militants orphelins en soldat de fortune.

    Des "chaospatis" (2) prêts à s'embaucher chez l'ennemi pour un salaire de misère.

    RAISON D'UNE TRAHISON

    L'adieu aux armes, la dissolution des Comités populaires, respecte l'esprit d'un traité (Comprehensive Peace Agreement), signé le 21 novembre 2006, avec le Premier ministre Girija Prasad Koirala, âgé de 85 ans.

    Le vieil homme est surnommé, à Nepalgang, "le fantôme de la liberté"...

    « On a connu des bolcheviks plus tenaces et moins soucieux de la parole donnée aux bourgeois et aux moribonds » murmurent les vrais communistes à Katmandou.

    Ce jour-là, au moment où des maoistes subalternes ratifiaient le CPA, le président chinois Hu Jin Tao rencontrait à New Delhi son homologue indien, le docteur Manmohan Singh.

    L'ex-gouverneur de la Reserve Bank of India est l'auteur, dans les années 90, de la politique dite de « libéralisation, privatisation, globalisation ».

    C'est lui, le "sadarji", qui réussit (3), par des mesures drastiques, à alléger la dette extérieure de l'Union Indienne.

    Dans leur sillage, le presque chef d'État Prachanda (chef des maopatis, les maos népalais), qui a accordé récemment un entretien au journal "Le Figaro", discutait avec les membres de la Banque mondiale.

    À la différence des maharadjas et des bourgeois enrichis par une économie parasite (le tourisme), les maoïstes népalais se proposent de reconstruire sérieusement « à la chinoise » le royaume le plus pauvre du monde.

    Et, ainsi, rembourser les dettes du royaume que la clique Gyanendra était incapable d'endiguer.

    La politique du "bol de fer" cher à Mao séduit les investisseurs.

    Dans cette perspective, la "route des martyrs", construite sans moyen financier, sous la mitraille, à l'Ouest du Népal, apparaît comme une curieuse vitrine de la nouvelle économie politique.

    Un auteur anglo-saxon pourrait écrire que « la révolution maopati est le raccourci sanglant — nécessaire — d'un régime féodal endetté vers un capitalisme triomphant ».

    L'abandon du caractère anti-impérialiste de la Cause signale cette honteuse dérive ; et la désertion des campagnes au profit des villes, la trahison des camarades.

    La distribution aux "nouvelles élites" de valises remplies de roupies parachève le processus.

    On parle, en Inde, pudiquement d'un plan Marshall...

    Le suzerain Thakur versait, à l'été 2006, 10 millions de dollars aux valets de ferme népalais.

    Quatre-vingt-trois députés, estampillés "maos", entrent ainsi à l'Assemblée ; et sont conviés à participer à un prochain gouvernement d'union.

    Des considérations géo-stratégiques entre la Chine, l'Inde, l'Angleterre, et une mise en valeur d'un "transfert de pouvoir" semblent avoir pris le pas sur un réel programme révolutionnaire.

    Nous assistons là à l'émergence de "nouveaux renégats" dont la mission est de neutraliser la lutte des classes.

    Cette assemblée "constituante", adoubée par les nations unies, compterait 330 députés.

    Avec 83 "maoïstes" dans l'hémicycle, dont 15 pour cent d'intouchables, c'est dire que le peuple restera à jamais un tiers-état !

    La révolution népalaise a certes brisé une idole, vieille de 238 ans, mais non la croyance au timonier blanc.

    Car, dans cette révolution riche en couleurs, c'est l'impérialisme, incarné par les Nations unies, qui a déterminé lors du dernier Jana Andolan (4) en avril 2006, le mode de passage du féodalisme à une démocratie bourgeoise et nommé a priori leurs représentants.

    « Le Parti communiste maoïste a brisé l'échine d'un tigre royal sans chiffonner l'uniforme du chasseur blanc » résume un vieux chaman en pays gurung.

    Le souffle du Progrès, dans ce pays exotique tout juste libéré d'un roi ubuesque, ne dissipe pas un certain malaise...

    Le cirque de l'humanitaire rappelle, à l'ombre des Annapurnas, l'époque coloniale : lorsque les missionnaires convertissaient les âmes avec un bol de riz, et transmutaient les hommes les plus rebelles en personnes soumises.

        HIMALOVE

1.Oil National Gas Company. Le trust pétrolier indien constituait une joint venture avec la Texaco, en 2002, afin d'exploiter des gisements découverts à Nepalganj et à Chitwan.

2.« Chaospati » est le terme péjoratif employé par les royalistes pour désigner les maopatis.

3.Le paysage indien porte les séquelles de cette politique capitaliste ; on compte des centaines de fermiers endettés, suicidés chaque mois, avec les pesticides vendus par une multinationale.

4. Jana Andolan = révolution. Selon les observateurs népalais, Jana Andolan I, en 1950, Jana Andolan II, en 1990, ont abouti rapidement à des traités inégaux, signés par les Koirala ou les Rana avec l'Inde, dépossédant le pays de ses ressources naturelles (Traité Mahakali, par exemple). La révolte populaire d'avril 2006, "très encadrée" à Katmandou, a été taillée sur le modèle de la baisaki de 1990 ; les ambassades US, indienne et anglaise ont négocié directement avec l'état major maopati afin que les manifestants ne prennent pas d'assaut le palais royal...

Gurkha : Note de do : description des "Gurkhas" faite par Himalove il y a deux ans : « la Royal Népal Army, son organisation, la sélection de ses officiers, son entraînement, sont supervisés par des nations étrangères, le Royaume Uni et l'Inde (et aujourd'ui, aussi les Américains), qui chaque année, puisent dans ce vivier des régiments entiers de mercenaires au service d'intérêts autres que ceux du peuple népalais. Les mercenaires gurkhas se sont illustrés durant toutes les guerres en Europe et sur tous les continents, particulièrement dans les années 50 et 60 dans la lutte contre les communistes en Malaisie et Indonésie. Il y a des traités qui, pour certains, datent d'une centaine d'années, signés avec les puissances étrangères, et qui règlementent cela. C'est pourquoi les maopatis demandent l'annulation de ces traités, la fermeture de tous les camps de recrutement "gurkhas" et le renvoi des officiers étrangers. Les officiers américains, aujourd'hui présents "discrètement" au Népal, ont orienté l'entraînement des gurkhas vers la lutte "antiterroriste" en milieu civil. Ce type d'armée ne pourra jamais devenir une armée démocratique et populaire. » L'on voit bien le sens de l'adieu aux armes fait aujourd'hui par les maopatis (maos népalais) devant lesdits Gurkhas !

Pour en savoir plus sur le Népal :

« La Chute de la maison Shah Dev » http://mai68.org/ag/800.htm

« Le poignard népalais et la croix gammée hindoue » http://mai68.org/ag/800.htm

« La Clef de la révolution népalaise se trouve à New Delhi » http://www.mai68.org

« La Fin de l'ère Gurkha » http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=63935

« La Griffe des Léopards rouges » http://mai68.org/ag/1006.htm

« Népal : des maoïstes à visage humain », publié, entre autres, sur le site France-info, mais aussi ici :

http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=62989

« Le Népal est-il un protectorat indien ? » http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=62543

Post-Scriptum : Si un éditeur est intéressé par un livre sur la révolution maopati, me contacter.

himalove@yahoo.com

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COMMENTAIRE de do :

Salut Himalove

Cette histoire des Maos népalais me rappelle celle des maos sponts français.

Les chefs de la Gauche Prolétarienne ont dissous leur propre parti, officiellement en échange d'un journal, "Libération", dont on voit ce qu'il est devenu.

De telles trahisons ne sont possibles que dans un parti, donc avec des chefs.

La seule façon de ne pas être trahi par les chefs, c'est de ne pas en avoir !

LES SYNDICATS SONT DES BORDELS ET LES PARTIS LES MEILLEURS PROXÉNÈTES DES MASSES !

VIVE L'ANARCHIE !

Amitié,
do
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