7 février 2007
GRIPPE
AVIAIRE
Danger réel ou manipulation planétaire ?
Par
François Roux
http://mai68.org/ag/1114.htm
http://cronstadt.org/ag/1114.htm
http://kalachnikov.org/ag/1114.htm
Origine : Monde libertaire # 1463 du 1er au 7 février 2007 (Fédération
Anarchiste)
Avec l'hiver doux et l'annonce d'un printemps précoce, les médias bruissent déjà du retour annoncé de la grippe aviaire.
Avant que la psychose que nous avons connue en 2006 ne rende à nouveau inaudible toute parole raisonnable, des paysans, des vétérinaires, des chercheurs, tentent d'alerter l'opinion sur la manipulation qui se cache derrière cette catastrophe annoncée.
Par François Roux
DES MILLIONS DE MORTS ? La grippe aviaire est une maladie animale, due au H5N1, virus très pathogène qui s'attaque presque exclusivement aux oiseaux. L'épizootie de la grippe aviaire a déjà causé l'abattage de centaines de millions de volailles et le décès de cent à deux cents personnes dans le monde. Les autorités sanitaires internationales disent craindre que la combinaison de ce virus avec celui de la grippe humaine n'entraîne une épidémie qui pourrait causer la mort de millions d'êtres humains. Pour parer la menace, elles préconisent des mesures drastiques d'abattage et de confinement des volailles, associées à de gigantesques campagnes de vaccinations préventives.
Qu'en est-il du risque réel et de sa supposée prévention ?
L'industrie de la viande malade
Les virus de la famille Influenza aviaire circulent chez les animaux sauvages sans provoquer aucun symptôme. La mutation qui rend le virus virulent survient là où existe une forte concentration de volailles sensibles, c'est-à dire dans les élevages industriels, et non dans les petites exploitations.
Les grandes épizooties de peste aviaire sont apparues à la fin des années 1950. Elles correspondent au développement des élevages industriels. Elles redoublent depuis les années 1990 dans le Sud-Est asiatique où le cheptel de volailles a triplé en dix ans. Cette production asiatique a été réalisée à partir de deux races très productives importées d'Occident. Les animaux y sont caractérisés par leur profil génétique peu variable (résultat d'une forte consanguinité), leur dépendance aux produits chimiques et leur faible résistance aux maladies naturelles.
Ce n'est pas le virus qui est épidémique mais les conditions d'élevage qui créent, chez les volailles, un terrain propice à l'expression du pouvoir pathogène de certains virus. Quant aux oiseaux sauvages, ils sont les victimes de la peste aviaire, et non ses vecteurs. Ce ne sont pas eux qui contaminent les élevages industriels, mais l'inverse.
Les recherches menées par les scientifiques pour retrouver le chemin suivi par les virus pathogènes ne les ont pas menés sur la trace des oiseaux migrateurs mais sur celle des grandes firmes de la filière aviaire, par exemple la compagnie thaïe Charoen Pokphand, première productrice de volailles et d'aliments pour volailles d'Asie, dont les implantations correspondent aux zones des élevages contaminés : Thaïlande, Vietnam, Cambodge, Chine, Indonésie,Turquie...
Au beau milieu des pays du Sud-Est asiatique touchés par la grippe aviaire, un seul, le Laos, reste épargné. Pourquoi ? Le Laos est un pays de petites fermes familiales. Il n'a connu que quarante-cinq cas d'infection en 2005 ; quarante-deux provenaient d'élevages intensifs industriels. Les trois poulaillers contaminés se trouvaient à proximité de grosses exploitations.
Psychose rurale
Le H5N1 n'est pas adapté à l'homme et il ne peut le transmettre. Seules peuvent contracter le virus des personnes fragiles et rendues sensibles à la maladie, vivant dans une grande promiscuité avec des volailles malades. Sur les deux milliards d'hommes exposés au virus dans le monde, cent à deux cents sont morts de la grippe aviaire en quatre ans, alors que la grippe humaine tue deux mille personnes certaines années en France. La transmission d'homme à homme supposerait une mutation du H5N1. Or ce virus extrêmement répandu circule depuis 1959 sans avoir muté et personne ne peut savoir si une hypothétique mutation aggraverait son pouvoir pathogène, ou si elle le diminuerait, et encore moins si elle déboucherait sur une épidémie humaine.
Malgré cela, le gouvernement français a mis en place début 2006 un dispositif de prévention digne de Groland revisité par Hitchcock : appel aux maires et à la gendarmerie pour effectuer le recensement et surveiller le confinement des volatiles, circulaires des autorités sanitaires recommandant de stocker les poisons et les gaz destinés aux oiseaux sauvages et domestiques, les masques de protection, les cercueils, les places dans les cimetières, appels à la délation dans les campagnes pour signaler tous les particuliers et les paysans dont les poules picoreraient en liberté...
Ainsi, par un habile tour de passe-passe, le confinement des volailles, responsable du caractère pathogène du virus, devient-il subitement la panacée pour se protéger dudit virus. Le problème devenant la solution et la solution le problème ; voilà qui ressemble fort à une manipulation bien orchestrée. Or, en système capitaliste, qui dit manipulation dit forcément profit sonnant et trébuchant.
Le salaire de la peur
Officiellement, cette application grand-guignolesque du fameux « principe de précaution » vise à protéger les exportations françaises de volailles, lesquelles, soit dit en passant, inondent les marchés africains de bas morceaux vendus à prix subventionnés qui ruinent les producteurs locaux.
En réalité, le lobby de l'agriculture industrielle ne veut pas laisser passer une pareille occasion de se débarrasser des éleveurs indépendants qui l'empêchent d'accéder au contrôle total de la filière.
La présomption se confirme lorsque l'on examine de près les dispositions applicables en cas de foyer avéré. Celles-ci prévoient l'interdiction de la commercialisation des volailles à trois kilomètres à la ronde, sauf si elles sont « thermisées » à 70°C, ce qui ne peut concerner que les exploitations industrielles.
De plus, les barèmes d'indemnisation varient selon les labels, mais ne sont accessibles qu'aux aviculteurs disposant d'un bâtiment clos d'au moins deux cents mètres carrés !
Autrement dit, l'agro-industrie profite du désastre dont elle est responsable pour faire disparaître les petits producteurs, en aggravant au passage le risque de nouvelles épizooties, puisque ce n'est que du cheptel diversifié de ces élevages que peut venir le processus de sélection naturelle de souches résistantes de volailles.
Cette politique aberrante a été appliquée partout dans le monde sur les recommandations de l'OMS et la FAO, toutes deux dominées par les Américains. Son application dans les pays du Sud a pris la forme d'un zoocauste d'une brutalité répugnante. Si elle ne rencontre aucune opposition, elle plongera dans la famine les centaines de millions de familles pauvres pour lesquelles l'appoint d'une bassecour constitue un facteur de survie.
Un pactole pour l'industrie pharmaceutique
Tout problème sanitaire provoque aussitôt la montée au créneau d'un des lobbies les plus puissants du monde, celui de l'industrie pharmaceutique.
Celle-ci, par ailleurs intéressée au plus haut point à la prospérité de la filière agroalimentaire, qu'elle fournit abondamment en médicaments de toutes sortes, multiplie les pressions pour qu'un programme mondial de vaccination obligatoire soit entrepris : des centaines de millions de volailles, un vrai pactole !
Malgré le peu de fiabilité des produits existants et l'existence prouvée d'épidémies de peste aviaire d'origine vaccinale en Chine et en Italie, le lobby pharmaceutique a fini par obtenir de l'OMS le stockage préventif de millions de doses d'antiviraux. Dès la nouvelle connue, les actions des laboratoires se sont envolées. Décidément, voilà encore une catastrophe qui ne fera pas que des perdants.
Ne manque plus au tableau que le poulet génétiquement modifié pour résister à la grippe aviaire. Rassurez-vous : une équipe britannique l'annonce pour bientôt. À terme, les multinationales de l'agroalimentaire voudraient breveter quelques souches dans chaque espèce et éradiquer les autres afin de contrôler absolument et irréversiblement la totalité du marché.
Ne soyons pas les dindons de cette farce
La restructuration permanente de l'économie vers une concentration toujours accrue pour générer de plus en plus de profits est inscrite dans la nature même du capitalisme. Elle passe par la standardisation des productions et l'élimination ou l'assujettissement de toutes les entreprises moyennes, petites et individuelles.
Sur le gigantesque marché stratégique de l'alimentation, tous les moyens sont bons : la guerre sur les prix à coup de subventions, la cascade de normes pseudo-sanitaires avec leur cortège de contrôles, la marchandisation des gènes, et la désinformation à grande échelle.
La santé publique voudrait que l'on favorise la biodiversité dans les petits élevages naturels où vivent des animaux en bonne santé. La loi du profit exige de faire l'inverse. Pendant qu'il est encore temps, il existe un moyen simple pour les consommateurs de ne pas être, une fois de plus, les dindons de la farce : boycotter toutes les productions alimentaires industrielles. C'est facile en zone rurale, et en zone urbaine se multiplient les AMAP's qui permettent d'acheter directement à des petits producteurs bios.
Au bout du compte, le plus effrayant dans tout cela, c'est la facilité avec laquelle s'organise la désinformation généralisée qui entraîne les gouvernements, les instances internationales, les médias, les systèmes sanitaires et de santé publique, les élus, les forces « de l'ordre » et les populations dans une politique mortifère et contraire au bon sens élémentaire.
Le risque totalitaire, lui, est décidément bien réel.
François Roux
Sources :
Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments.
Confédération Paysanne de Haute- Provence : communiqué du 15 avril 2006.
Site du Grain.
Cahier du Gène, avril 2006
Ligue de Protection des Oiseaux, l'Oiseau magazine, n° 81.
Site interministériel de préparation à un risque de pandémie grippale.
Site de l'Organisation mondiale de la santé animale.
Jean Alain, vétérinaire, « Influenza aviaire : la grippe du poulet et le virus H5N1 », supplément technique n° 97 de la Dépêche vétérinaire du 24 décembre 2005.
Paul Polis, vétérinaire, Que la peste soit avec vous et avec votre porte monnaie !, mars 2006.
Bernard Vallat, directeur général de l'Office international des épizooties.
__________________
¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯
NOTE
de do :
Merci au Monde Libertaire et à François Roux pour ce très intéressant article qui complète bien le mien :
Terrorisme aviaire, le retour ! :
Vive la révolution : http://www.mai68.org
ou : http://kalachnikov.org
ou :
http://vlr.da.ru
ou :
http://hlv.cjb.net