4 février 2002

 

Pantxo BELIN
Askatasunaren eleduna
Porte parole d'Askatasuna association de soutien et de défense des prisonniers politiques basques
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Bayonne le 7 février 2002

 

ASKATASUNA ILLÉGALISÉ PAR LE JUGE GARZON

Une attaque ouverte à la liberté d’expression et d’opinion politique

L’ordonnance d’illégalisation d’Askatasuna, mouvement national basque a été notifié par le juge madrilène Balthasar Garzon aux avocats mercredi 5 février. Déclarant le mouvement illégal, il ne stipule aucun fait délictueux précis, et n’inculpe personne.

Cette nouvelle ordonnance est d’autant plus contestable qu’elle est totalement arbitraire et elle est posée de façon indiscriminée. D’un point de vue juridique, cet arrêté ne comporte aucun fondement, et même pire, il est basé sur un rapport policier établit à la va-vite et dont le juge instructeur n’a en aucun moment vérifié la véracité et l’exactitude. Ainsi, il comporte un bon nombre de fausses affirmations avérées, qui auraient pu être facilement repérées. Donc nous pouvons caractériser cette mesure comme une ordonnance purement policière servant un objectif politique. Le juge Garzon a repris à son compte un rapport policier fait en 15 jours, et ne se donnant même pas la peine de l’instruire, de mener une véritable enquête, il a purement et simplement mis hors la loi un mouvement qui n’a pas encore 2 mois d’existence.

Pas l’ombre d’une preuve n’est apportée à l’encontre d’Askatasuna. Ce ne sont que des " théories " du juge Garzon qui au final ne sont que ces propres élucubrations.

Pourtant, même si au vu du contenu de cette ordonnance, cela nous paraît totalement ridicule, les effets en sont très graves, et les perspectives plus qu’inquiétantes. Rien n’est précisé sur les mesures à prendre en conséquence. Les portes sont ouvertes pour que n’importe qui parlant au nom d’Askatasuna, organisant un rassemblement pour la défense des droits des prisonniers politiques basques, dénonçant la torture et pourquoi pas pour avoir coller une affiche avec la signature Askatasuna, risque l’arrestation et l’incarcération.

De plus, nous considérons que cette mesure est un véritable non-sens, Askatasuna est un mouvement national basque, structuré et agissant des deux côtés des Pyrénées, donc cette mesure reste limitée géographiquement et n’a donc aucune traduction en territoire français et au sein de l’Europe, où les activités d’Askatasuna ne font pas l’objet de telles mesures.

Notre conclusion face à cette situation est que si jusqu’à présent la démocratie espagnole était dans une sorte de coma, aujourd’hui nous avons la preuve qu’elle est morte. C’est la faillite de l’Etat de droit en Espagne. Les droits de libre expression, d’opinion politique et de libre association sont gravement remis en cause. Cette criminalisation tout azimut n’est pas le fait d’un juge isolé, mais il s’agit d’une véritable stratégie politique mise en place par le gouvernement espagnol visant à illuminer toute expression contestataire divergente. Effectivement ce travail de dénonciation des violations des droits de l’homme en Pays Basque est une véritable " épine dans le pied " de l’Espagne, qui s’en débarrasserait bien volontiers, même si pour cela elle doit bafouer toutes les règles de droit établies.

Pourtant, nous tenons à affirmer que le juge Garzon n’arrêtera pas notre travail, nous ferons en sorte que toutes les dynamiques que nous avons mises en place dans des centaines de villes et villages du Pays Basque perdurent. Nous ne laisserons pas la peur nous envahir, quand la situation exige que nous fassions front à cette attaque sans précédent.

 

Remise en contexte de cet évènement:

Une ordonnance avait été émise par le juge Garzon le lundi 21 janvier concernant les activités délictueuses d’Askatasuna, se basant sur un rapport policier daté du 2 janvier 2002. En effet, suite à l’opération menée contre les Gestoras Pro Amnistia dans la nuit du 31 octobre 2001, basée sur la procédure 33/01, se soldant par l’arrestation et l’incarcération de 11 membres de sa direction, de son porte-parole Juan Mari Olano arrêté le 3 décembre 2001 à Bayonne et actuellement détenu en France sous écrous extraditionnel (la date du procès d’extradition est fixée pour le 8 mars à Pau), avaient conduit le juge Garzon dans son ordonnance du 19/12/2002 à illégaliser les Gestoras Pro Amnistia, ainsi qu’à déclarer illicite toutes ces activités. 25 ans d’histoire anti-répressive sont d’un coup de crayon devenu hors la loi.

Ainsi, le gouvernement espagnol profita de l’occasion pour inclure Gestoras dans la " liste international des organisations terroristes ". D’autres part, 14 personnes sont actuellement inculpées dans ce même dossier, elles sont convoquées les 13 et 14 février prochain devant le juge Garzon, pour leur militantisme au sein des Gestoras Pro Amnistia. Suite à cette convocation, ces14 personnes risquent toutes d’être immédiatement incarcérées, avec parmi elles trois avocats.

Création d ‘Askatasuna : Le 14 décembre 2001, au terme d’un processus de plus d’un an, les Gestoras Pro Amnistia, au Pays Basque Sud, et la Coordination des Comités de Soutien, au Pays Basque Nord, se sont dissous afin de laisser la place à un nouvel organisme national de soutien aux prisonniers politiques basques : Askatasuna, et cela lors d’une assemblée nationale, assemblée ouverte à la presse, le 16 décembre 2001 à San Sebastian. Askatasuna, mouvement travaillant sur l’ensemble du Pays Basque s’était défini alors comme un mouvement pro amnistie, travaillant contre la répression, de défense des droits des prisonniers politiques basques, de dénonciation de la torture et des violations des libertés démocratiques, pour une résolution démocratique du conflit.

Des fonctions qui avaient été remplies par les Gestoras Pro Amnistia depuis leur fondation en mars 1976, et par la Coordination des Comités de Soutien aux Prisonniers Politiques Basques, depuis novembre 1997, des fonctions qui sont assumées par des milliers de personnes et des centaines de comités locaux. Dans leur travail quotidien, ces deux organismes anti-répressif ont rencontré et travaillé conjointement avec nombre d’ONG internationales de défense des droits de l’Homme, acquérant ainsi une référence indiscutable. Askatasuna incarne l’héritage du chemin tracé par ces deux organismes.

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NOTE de do : Pour voir les preuves de l'actuelle torture espagnole, lire l'intervention 335


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